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GRANDEURS ET LIMITES DE LA DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE, « LA RÉPUBLIQUE DE SAILLANS »

« PAS DE PROGRAMME, PAS DE CANDIDAT  »

Un de nos lecteurs Georges Ferber, nous propose de revenir sur l’expérience de démocratie participative qui s’est déroulée à SAILLANS.

Il rappelle que c’est sous la bannière  » Pas de programme, pas de candidat   » que le petit groupe de citoyens du village de Saillans, dans la Drôme, décide d’organiser sa première réunion publique, avant les élections municipales de 2014. Forts d’une victoire collective contre le projet d’implantation d’un supermarché Casino, défendu par l’ancien maire, ils sont une dizaine à penser qu’il n’est plus possible de gérer les affaires de la commune sans demander l’avis de ceux qui la composent.

Une première réunion rassemble plus d’une centaine d’habitants, sur les 1 200 que compte ce village des contreforts du Vercors. Les citoyens s’expriment par groupe de dix et réfléchissent aux besoins du village. Trois autres réunions suivront pour élaborer un programme, puis constituer une liste, à partir de candidats volontaires. Le 23 mars 2014, la liste citoyenne « Autrement pour Saillans… Tous ensemble » l’emporte avec 56,8 % des voix, pour une participation de 80 %.

Dès le départ, ses membres s’attellent à la question de la gouvernance.

Comment changer l’organisation, la structure même de l’or­ganigramme de la commune, afin « de lutter ­contre l’accaparement du pouvoir par le maire et ses adjoints et la faible parti­cipation des habitants » ? Tout simplement en inversant la pyramide du fonctionnement classique d’une mairie. A la place du maire, c’est désormais des ­citoyens et des habitants que vont émaner toutes les décisions. Quelques jours après les élections, les portes de l’hôtel de ville s’ouvrent : 250 habitants s’inscrivent dans une ou plusieurs des huit commissions prioritaires ­élaborées pendant la campagne électorale.

Chacune est organisée en groupe actions projets (GAP). Des réunions menées par un animateur-citoyen formé à l’exercice per­mettent de débattre en vue d’un consensus, proposé puis voté en conseil municipal, simple chambre d’enregistrement des décisions prises en amont par les habitants.

Voici un article – et une vidéo – qui font le bilan de cette initiative.

ARTICLE

« LA RÉPUBLIQUE DE SAILLANS  », SUR LCP, REVIENT SUR LES IMPASSES DE LA DÉMOCRATIE PARTICIPATIVE

Dans un trop court documentaire, passionnant, Dorine Brun et Sarah Jacquet tirent un bilan mitigé de l’expérience politique conduite dans ce village drômois entre 2014 et 2019.

Par Mouna El Mokhtari Publié le 26 avril 2021 Le Monde  

« A partir d’aujourd’hui, dans la salle du conseil municipal, les habitants reviendront sur cinq ans de démocratie participative », annoncent, en mars 2019, Dorine Brun et Sarah Jacquet, au mégaphone, dans les rues de Saillans (Drôme).

En 2014, les citoyens de ce petit bourg au pied du Vercors – 1 300 âmes – avaient amorcé une expérience politique inédite en France : élire une équipe municipale composée d’habitants sans étiquette politique. La liste « Autrement pour Saillans… Tous ensemble » a géré la commune six ans durant en concertation permanente avec les citoyens-électeurs. Un essai qui ressemble, à première vue, à un échec en 2020, lorsqu’ils perdront les élections, pour 18 voix d’écart.

Se mettre « à la place du maire »… Plus d’une dizaine d’habitants sont venus tirer publiquement, dans le – trop court – documentaire (qui doit devenir un long-métrage pour le cinéma d’ici à la fin de l’année), un bilan de cette expérience inédite. Au départ, il y a la fronde d’un collectif face au projet de l’intercommunalité d’installer, près du village, un supermarché Casino – finalement abandonné. Quelques-uns nourrissent alors l’idée d’une liste citoyenne pour remporter les municipales. Ils établissent un système collégial et participatif de gouvernance où les habitants sont concertés pour toutes les décisions : les travaux de voirie, l’éclairage public, les rythmes scolaires, l’accueil de migrants, ou encore des projets comme le centre aquatique de la communauté de commune.

La politique en action

Les réalisatrices, elles-mêmes saillansonnes et présentes à l’image, montrent ce travail au téléspectateur en même temps qu’aux concitoyens de leur village. On perçoit la recherche du compromis, la concertation qui doit aboutir à une décision débattue collectivement. Voilà pour l’utopie, bien réelle. Les habitants, s’ils disent leur « chance de vivre ça », soulignent les limites de cette démocratie participative, moins partagée qu’on le croyait. « Nous avons voulu creuser les questions démocratiques : est-ce que tout le monde trouve sa place et arrive à se faire entendre ?, détaille la coréalisatrice Sarah Jacquet. Comment faire quand des personnes prennent le pouvoir en parlant plus fort ? Que change cette expérience à leur rapport à la politique locale ? »

Le duo de documentaristes a voulu répliquer le processus transparent de concertation locale, conviant le téléspectateur à vivre une part de l’expérience. Grâce à un cadrage attentif aux divers visages et à la parole non formatée de cette « classe politique » d’un autre genre, Dorine Brun et Sarah Jacquet captent l’essence de la politique en action. Loin de conclure à l’échec, elles exposent les questions passionnantes qui peuvent mûrir l’expérience. La République de Saillans a fait des émules : aujourd’hui, en France, 66 municipalités sont gérées par des listes citoyennes, dont Annecy et Chambéry.

https://player.vimeo.com/video/463858571

VIDEO:

La République de Saillans, de Dorine Brun et Sarah Jacquet (Fr., 2020, 52 min)

1 réponse »

  1. J’ai envie de dire no comment. Et pourtant, chacun comprendra que les belles paroles ne suffisent pas. Il eu fallu préalablement acquérir les savoir-faire et les savoir-être pour développer une vraie démocratie participative dont on nous rabâche les oreilles.
    Vous comprendrez pourquoi j’ai choisi de développer la révolution managériale pour développer une intelligence collective durable. Parce que la chose est bien plus complexe que certains le pensent !
    Un beau contre-exemple pour mes conférences.

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