
RÉPONDRE À L’AMOUR D’UNE MÈRE
Un soir de Juin 2023 lors des dernières représentations assurées par Franck DESMEDT pour le remarquable texte de Romain GARY.
Une toute remarquable adaptation du texte qui a ému ce vendredi soir 2 juin 2023 , le public présent voyageant grâce au spectacle de l’enfance de l’écrivain à sa recherche d’un équilibre entre l’exigence de la mère et son ambition à l’age adulte d’y répondre, à son engagement politique auprès de Charles de Gaulle, de sa passion d’écriture.
Franck Desmedt est aussi, depuis quatre ans, le directeur du Théâtre de la Huchette, et nous a fait part en fin de spectacle de son prochain travail d’adaptation de l’œuvre de Joseph KESSEL académicien , écrivain, grand reporter et aventurier , témoin de son temps et de la nature humaine ayant traversé le XXe siècle, dont il a été l’infatigable observateur. entre 1922 et 1975, il est l’auteur de 80 livres …
Quelques citations extraites de la soirée théâtrale de La promesse de l’aube :
« J’ai voulu disputer aux dieux absurdes et ivres de leur puissance, la possession du monde, et rendre la terre à ceux qui l’habitent de leur courage et leur amour ».
« L’idée de me jeter sous un train et de me dérober ainsi à ma honte et à mon impuissance me passa par la tête, mais, presque aussitôt, une farouche résolution de redresser le monde et de le déposer un jour aux pieds de ma mère, heureux, juste, digne d’elle, enfin, me mordit le coeur d’une brûlure dont mon sang charria le feu jusqu’à la fin ».
« Nous étions alors vraiment au fond du trou – je ne dis pas de l’ « abîme », parce que j’ai appris depuis, que l’abîme n’a pas de fond, et que nous pouvons tous y battre des records de profondeur sans jamais épuiser les possibilités de cette intéressante institution ».
« La psychanalyse prend aujourd’hui, comme toutes nos idées, une forme aberrante totalitaire ; elle cherche à nous enfermer dans le carcan de ses propres perversions. Elle a occupé le terrain laissé libre par les superstitions, se voile habilement dans un jargon de sémantique qui fabrique ses propres éléments d’analyse et attire la clientèle par des moyens d’intimidation et de chantage psychiques, un peu comme ces racketters américains qui vous imposent leur protection.
« Cependant, je me battis courageusement, comme il sied à un Français, et je gagnai la bataille ».
« Je reste là, au soleil, le coeur apaisé, en regardant les choses et les hommes d’un oeilamical et je sais que la vie vaut vraiment la peine d’être vécue, que le bonheur est accessible, qu’il suffit simplement de trouver sa vocation profonde, et de se donner à ce qu’on aime avec un abandon total de soi ».
« Attaqué par le réel sur tous les fronts, refoulé de toutes parts, me heurtant partout à mes limites, je pris l’habitude de me réfugier dans un monde imaginaire et à y vivre, à travers les personnages que j’inventais, une vie pleine de sens, de justice et de compassion ».
« J’étais jeune, plus jeune que je ne le croyais. Ma naïveté cependant était vieille et désabusée. Éternelle, en vérité : je la retrouve dans chaque génération nouvelle, depuis celles des « rats » de Saint Germain des Près, de 1947, jusqu’à la beat generation californienne qu’il m’arrive de fréquenter parfois, pour m’amuser à reconnaître en d’autres lieux et sur d’autres visages, les grimaces de mes vingt ans ».
« Bien avant celle que notre État major dressa à nos frontières, ma mère avait élevé atour de moi une ligne Maginot de certitudes tranquilles et d’images d’Épinal qu’aucun doute ni aucune inquiétude ne pouvaient entamer ».
« Les succès foudroyants de l’offensive allemande ne me firent guère d’effets. Nous avions déjà vu cela en 14-18. Nous autres, Français, nous nous ressaisissions toujours au dernier moment, c’était bien connu ».
« On imagine mon soulagement lorsque ma bêtise congénitale et mon inaptitude au désespoir trouvèrent soudain à qui parler et lorsque des profondeurs de l’abîme, exactement comme je m’y attendais, surgit enfin une extraordinaire figure de chef qui non seulement trouvait dans les évènements sa mesure mais encore portait un nom bien de chez nous. Chaque fois que je me trouve devant de Gaulle, je sens que ma mère ne m’avait pas trompé et qu’elle savait tout de même de quoi elle parlait ».
« Je comprends fort bien ceux qui avaient refusé de suivre de Gaulle. Ils étaient trop installés dans leurs meubles, qu’ils appelaient la condition humaine. Ils avaient appris et ils enseignaient « la sagesse », cette camomille empoisonnée que l’habitude de vivre verse peu à peu dans notre gosier, avec son goût doucereux d’humilité, de renoncement et d’acceptation. Lettrés, pensifs, rêveurs, subtils, cultivés, sceptiques, bien nés, bien élevés, férus d’humanités, au fond d’eux-mêmes, secrètement, ils avaient toujours su que l’humain était une tentation impossible et ils avaient donc accueilli la victoire d’Hitler comme allant de soi ».
« Pendant trois ans et demi, j’ai été soutenuainsi par un souffle et une volonté plus grands que la mienne et ce cordon ombilical communiquait à mon sang la vaillance d’un coeur trempé mieux que celui qui m’animait ».
Le bonheur est accessible, il suffit simplement de trouver sa vocation profonde, et de se donner à ce qu’on aime avec un abandon total de soi.
Je suis convaincu que les frustrations éprouvées dans l’enfance laissent une marque profonde et indélébile et ne peuvent plus jamais être compensées
Si on pouvait mourir de honte, il y a longtemps que l’humanité ne serait plus là
Je vois la vie comme une grande course de relais où chacun de nous, avant de tomber, doit porter plus loin le défi d’être un homme.
Décidé à faire dans le génie, je n’arrivais qu’à manquer de talent.
L’humour est une déclaration de dignité, une affirmation de la supériorité de l’homme sur ce qui lui arrive.
La vérité meurt jeune. Ce que la vieillesse a «appris» est en réalité tout ce qu’elle a oublié.Je feins l’adulte, mais, secrètement, je guette toujours le scarabée d’or, et j’attends qu’un oiseau se pose sur mon épaule, pour me parler d’une voix humaine et me révéler enfin le pourquoi et le comment.
J’ai beau me consoler en pensant qu’aucun trône n’est solide à l’époque actuelle, le petit prince en moi continue à s’étonner.
Il y a longtemps que je ne crains plus le ridicule; je sais aujourd’hui que l’homme est quelque chose qui ne peut pas être ridiculisé.
Je devais un jour opter pour la littérature, qui me paraissait le dernier refuge, sur cette terre, de tous ceux qui ne savent pas où se fourrer. Partout où vous allez, vous portez en vous le poison des comparaisons et vous passez votre temps à attendre ce que vous avez déjà reçu.
Rien ne vous isole plus que de tendre la main fraternelle de l’humour à ceux qui, à cet égard, sont plus manchots que des pingouins.
J’en arrivais presque à conclure qu’un pseudonyme ne suffisait pas, comme moyen d’expression littéraire, et qu’il fallait encore écrire des livres.