
NOS 2 PRÉCÉDENTES PUBLICATIONS CONCERNANT LES MAIRES :
LES MAIRES FACE AUX ÉMEUTES (1/3) : ILS VEULENT D’ABORD ÊTRE ÉCOUTÉS, ET APPELLENT À UNE ACTION VÉRITABLE DE TERRAIN https://metahodos.fr/2023/07/04/maires/
LES MAIRES ET LES ÉMEUTES (2/3) : « Ils sont le vrai visage de la France » – « On a perdu 5 ans » https://metahodos.fr/2023/07/05/ils-sont-le-vrai-visage-de-la-france/
« Emeutes urbaines : les maires au premier rang des fractures françaises »
TITRE LE MONDE QUI POURSUIT :
… « Dans la France d’aujourd’hui, avec sa complexité, ses incohérences et son délabrement, ce n’est pas drôle d’être un politique », constate Jacqueline McConnico (venue participer à la minute de silence organisée devant la mairie de Bagnolet (Seine-Saint-Denis) L’une de ses amies est maire à la campagne. « Elle se fait insulter à longueur de journée, déplore-t-elle. Le danger d’incendie ne concerne pas que les forêts, mais aussi le terreau social… »
« Toujours au front
« C’est décidément le mandat de toutes les crises. Après avoir traversé, depuis leur élection en 2020, la pandémie, l’inflation et la crise énergétique, certains maires ont vu la violence enflammer leur commune ces derniers jours. Ils sont toujours au front, « la dernière lumière qui s’éteint dans la ville », comme le rappelle Karine Franclet, édile (Union des démocrates et des indépendants, UDI) d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
« Au président de la République, Emmanuel Macron, qui recevra mardi 4 juillet à l’Elysée les 220 maires ayant eu à subir des émeutes sur leur commune, ils ont des choses à dire. Tous sont sous le choc, même si c’est l’action qui prime. « Je ne pense qu’à ça », reconnaît Jean-Luc Moudenc, maire (ex-LR) de Toulouse. L’élu est en contact « trois fois par jour » avec le préfet, « à l’écoute de ce que disent nos propres canaux d’information dans les quartiers »….
« Mais la mobilisation n’entame pas l’émotion d’élus désarmés devant un tel déchaînement de violence. « C’est ce qui m’empêche de dormir », a déclaré le maire (Génération. s) de Trappes (Yvelines), Ali Rabeh, sur BFM-TV, le 1er juillet. Aux jeunes de sa ville, il tient ce « discours dérisoire, vain » : « J’ai pas envie de vous récupérer à la morgue, ou au commissariat dans le meilleur des cas. »
« A Reims (Marne), reconnaît le maire (Horizons) Arnaud Robinet, on n’a jamais connu ça. Même en 2005, lors de la grande révolte des banlieues ; même pendant la crise des « gilets jaunes » en 2018-2019. Il avoue « un sentiment de désarroi », et, tout emmêlé, « de colère » lorsqu’il s’est rendu sur le lieu des exactions ces dernières heures, qu’il a croisé des commerçants qui avaient perdu leur bien, des agents publics leur outil de travail.
« Colmater, écoper »
« Tous continuent à aller au contact, à discuter avec les habitants de leur ville, à « colmater, écoper », dit Ali Rabeh. « Je suis en empathie avec la population, dont la voiture, le service public ou le commerce sont cramés », confie Mathieu Hanotin. Le maire (PS) de Saint-Denis rappelle que les premières victimes des émeutes sont les habitants des quartiers. Un centre administratif a en partie brûlé dans sa ville dans la nuit du vendredi 30 juin au samedi 1er juillet, compromettant dorénavant les missions de l’état civil. « J’ai croisé une maman qui a perdu son passeport dans l’incendie, raconte M. Hanotin. Elle avait prévu un séjour au pays en famille. Le voyage de trois ans ; 6 000 euros de billets d’avion… »
« Etre proche des citoyens, les deux pieds dans la réalité, c’est la noblesse de la fonction. « Les citoyens nous demandent tout », rappelle Arnaud Robinet. Cette familiarité fait de l’édile « l’élu préféré des Français ». « On a eu le sentiment que cela le protégeait, relève encore le maire de Reims. Mais, aujourd’hui, ce déferlement de violence le vise aussi. Car il est l’élu de proximité, le seul à portée de baffes. Alors, quand on veut s’en prendre à la République, à l’autorité, on s’en prend au maire. »
« De ce poste d’observation incomparable, Arnaud Robinet le constate : « Notre société est totalement fracturée, dit-il. On le voit depuis les “gilets jaunes”. On n’arrive plus à se parler, à se comprendre. » C’est aussi le message porté par le maire de Trappes. Il a entendu, médusé, les jeunes lui dire qu’ils voulaient « régler [leurs] comptes », notamment avec la police. « Ils veulent faire exploser le système, c’est nihiliste, une forme de suicide collectif », note Ali Rabeh. Il prévient : « Si on ne démolit pas ces ghettos et si on n’arrive pas à lutter contre les égoïsmes qui condamnent certains à s’enfermer entre riches et à enfermer les pauvres entre eux, nous sommes condamnés à revivre le même scénario. » Car, poursuit-il, « vous pourrez mettre tout l’argent que vous voudrez dans les écoles, vous aurez quand même de l’échec collectif, de l’humiliation et de la violence. »
« Il faut pourtant bien continuer à investir dans l’éducation, soulignent beaucoup de maires. Le Toulousain Jean-Luc Moudenc estime que l’une des clés, « c’est la détection précoce de l’échec scolaire. Puis, il faut mettre le paquet ». Ce qui signifie, dans son esprit, un diagnostic global, la construction d’« une perspective positive » pour les jeunes. Parce que, sinon, prévient M. Moudenc, c’est « un engrenage très rapide », et bien souvent le trafic de drogue. « Pendant quelques années, ça se passe bien, relate-t-il. Et puis un jour, le jeune court moins vite et il se fait prendre. Ou il tombe dans un règlement de comptes et ça peut se terminer par une flaque de sang sur le trottoir. »
« Une volonté intacte de s’engager
« Arnaud Robinet met lui aussi la question de l’éducation au cœur du problème, et de la solution. Mais tout l’argent investi, « on voit que cela ne suffit plus », dit-il. Pour le maire de Reims, il faut recentrer l’école sur l’instruction des matières fondamentales et la transmission des valeurs. Et aider par ailleurs les familles à assumer leur rôle d’éducation.
« Certes, à court terme, « il faut rétablir l’ordre, et c’est à l’Etat de le faire, rappelle M. Moudenc. Mais là où nous avons un rôle à jouer, c’est pour retisser le lien. Il faut créer des espaces de parole pour se parler, s’écouter, se comprendre, réexpliquer la mission des forces de l’ordre. »
« Tous affirment leur volonté intacte de s’engager. « La solution, je ne la connais pas, reconnaît la maire d’Aubervilliers. Mais il faut continuer à se battre pour améliorer le cadre de vie. » Karine Franclet évoque de « beaux projets » de rénovation de plusieurs quartiers.
« Le rôle de l’élu, estime le maire de Toulouse, c’est d’opposer la raison au raccourci consistant à dire : « Tout cet argent que l’on met dans les quartiers, voilà ce qu’ils en font. Autant arrêter ! » Les exactions de « cent excités », défend-il, « n’invalide en rien toute l’action publique déployée » jusqu’à présent. « Ce n’est pas le moment de baisser les bras et de dire qu’il n’y a plus rien à faire, conclut Karine Franclet. Parce qu’après, qui va s’occuper de la ville ? »
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« Emmanuel Macron loin de l’idylle avec les édiles »
TITRE LIBÉRATION LE 4 7 23 QUI POURSUIT :
« Les 250 maires longuement invités par le chef d’Etat, mardi à l’Elysée, sont sortis déçus de la réunion, malgré l’annonce d’une loi d’urgence de reconstruction.
« Séance de thérapie de groupe sous les ors de la République. Après plusieurs nuits de tensions, près de 250 maires, en première ligne face aux violences, ont été reçus ce mardi 4 juillet pendant de longues heures par Emmanuel Macron à l’Elysée. L’occasion pour le chef de l’Etat de chercher à «comprendre les causes profondes» de la crise actuelle. En fin de matinée, une file d’attente d’édiles de toutes couleurs politiques s’organise donc petit à petit devant le 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré.
« Qu’ils viennent de grandes métropoles comme Marseille, Bordeaux ou Lyon, de petites villes comme Louviers (Eure) ou de très petites villes comme Lux (Saône-et-Loire), tous les maires sont logés à la même enseigne. Ce n’est qu’après un rigoureux contrôle de sécurité que les élus sont invités à entrer dans la cour. Puis dans la salle des fêtes du palais.
« Si ce mardi 4 juillet la parole est longuement laissée aux maires, l’hôte du jour ouvre tout de même la rencontre par un court propos introductif. «Pour une fois, il a été très bref», sourit un participant.
«Le pic que nous avons connu dans les premiers soirs est passé, affirme Emmanuel Macron, debout, micro en main. Maintenant, c’est l’ordre durable, républicain que nous voulons tous et auquel nous allons nous atteler. C’est la priorité absolue.» Le chef de l’Etat explique vouloir «apporter une réponse en profondeur» avec les élus assis face à lui. »
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« «Je ressors un peu désespéré», les maires peu convaincus par leur réunion avec Macron »
TITRE EUROPE 1 QUI POURSUIT :
« Cette réunion de plus de quatre heures à l’Élysée n’a toutefois pas pleinement convaincu les édiles, qui s’interrogent sur les ambitions de l’exécutif.
« Je suis arrivé avec peu d’espoir, je ressors un peu désespéré, je ne le cache pas. Je ne vois pas de grandes ambitions », regrette Ali Rabeh, le maire de Trappes dans les Yvelines, au micro d’Europe 1.
« Robert Ménard, le maire de Béziers dans l’Hérault, n’est pas vraiment plus convaincu que son homologue : « On ressort, de ce que j’ai entendu, avec l’idée que ça ne va pas se régler ».… »
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CE QU’ATTENDENT LES MAIRES – AU-DELÀ D’UN SOUTIEN :
LA CONSIDÉRATION POUR LEUR RÔLE DANS LA DÉMOCRATIE ET LA RÉPUBLIQUE – UN VÉRITABLE PARTENARIAT DANS LES POLITIQUES PUBLIQUES
TWIT DU JOUR

ARTICLE
Le maire de Trappes dénonce « l’arrogance » d’Emmanuel Macron et réclame « un plan vigoureux, massif et ambitieux » pour les banlieues
France Info
Plus de 200 maires de communes touchées par les émeutes de ces derniers jours sont reçus ce mardi à l’Elysée. « En réalité, on s’intéresse aux banlieues quand ça brûle. Et une fois le feu éteint, on oublie, on retourne à l’actualité normale », regrette le maire de Trappes, dans les Yvelines.
Alors qu’Emmanuel Macron reçoit à l’Élysée mardi 4 juillet plus de 200 maires des communes victimes de violences urbaines, Ali Rabeh, maire de Trappes, dans les Yvelines, a dénoncé ce mardi sur franceinfo l’« arrogance » du chef de l’État qui, avec Matignon, « n’a même pas daigné répondre aux demandes de rendez-vous »des associations et des maires de banlieue qui ont alerté dans une tribune le 24 mai sur le fait qu’ils se trouvaient « au bord du précipice ».
Le maire de Trappes réclame « un plan vigoureux, massif, ambitieux et qui ne demande pas forcément d’argent supplémentaire » pour les banlieues. Il lance un cri d’alarme : « Arrêtons de vivre chacun dans un entre-soi, chacun dans son enclave. Soyons capables d’accepter d’organiser la mixité à l’échelle de tous les quartiers, de toutes les villes », a-t-il appelé.
franceinfo : Le risque pour les habitants des banlieues, c’est de tomber dans une forme de fatalisme ?
Ali Rabeh : C’est exactement notre crainte à nous les maires, les habitants de ces quartiers, à tous ceux qui sont bénévoles au quotidien sur le terrain. C’est qu’en réalité, on s’intéresse aux banlieues quand ça brûle. Et une fois le feu éteint, on oublie, on retourne à l’actualité normale. Le pouvoir politique détourne les yeux, comme l’a fait Emmanuel Macron depuis six ans maintenant. Les causes structurelles, l’absence de mixité sociale, l’échec scolaire, collectif, se poursuivent. Évidemment, nous préparions ainsi les ingrédients de la future explosion.
Pourtant, les maires ont appelé à l’aide à plusieurs reprises. Vous n’avez pas été entendus ?
Depuis l’appel à l’aide de Grigny et le plan Borloo en 2017, les maires travaillaient d’ailleurs pour proposer tout un plan d’action élaboré, structuré de tous bords politiques. Les maires, de nouveau, depuis la crise Covid, alertent et annoncent, l’explosion sociale et l’explosion de ces émeutes qui étaient attendues. Il y a à peine un mois, 30 maires ont publié une tribune dans Le Monde pour dire que nous étions au bord du précipice. Mais rien n’a été entendu par l’Élysée et Matignon. Ils n’ont même pas daigné répondre aux demandes de rendez-vous de ces associations et de ces maires de banlieue. Maintenant, nous sommes dans le précipice.
Du côté de la majorité, on répond que ce n’est pas parce qu’il y a eu ce fameux malentendu avec Jean-Louis Borloo que rien n’a été fait. Vous êtes d’accord ?
Ça n’a rien à voir avec des malentendus. Il y a l’arrogance habituelle d’un pouvoir politique et d’un président de la République qui ne comprend tout simplement pas ce qui se passe sur le terrain. Il ne connaît pas sa population. Depuis la crise des « gilets jaunes » jusqu’à la crise des banlieues. Aujourd’hui, il y a deux mondes différents, mais qui vivent les mêmes difficultés et que le président a traité par la même arrogance. On n’est pas sur une histoire de malentendu, on est sur une différence de diagnostic et une incapacité à prendre en compte le réel pour pouvoir agir efficacement.
« Il faut que de cette crise émerge quelque chose de positif »Ali Rabeh, maire de Trappes
à franceinfo
[Il] reste malgré tout [un] espoir, même s’il est bien mince en allant à ce rendez-vous convoqué la veille pour le lendemain par l’Élysée, c’est l’espoir qu’il ait malgré tout une prise de conscience au-delà de saupoudrage de subventions. Je ne demande plus de subventions dans nos quartiers. J’en ai marre de ces subventions qui nous permettent de nous acheter une bonne conscience. Je demande un plan vigoureux, massif, ambitieux et qui ne demande pas forcément d’argent supplémentaire pour organiser la mixité. C’est à la société dans son ensemble que je lance ce cri d’alarme : « Arrêtons de vivre chacun dans un entre-soi, chacun dans son enclave, enclaves de richesses d’une part, enclaves de pauvreté d’autre part. Soyons capables d’accepter d’organiser la mixité à l’échelle de tous les quartiers, de toutes les villes ». Pour cela, il faut aussi que nous respections tous la loi et les maires délinquants qui refusent de construire des logements sociaux en Île-de-France par exemple et partout en France, créent de fait les conditions du malheur de ces quelques villes qui accueillent toute la misère de notre territoire.
C’est une affaire de tous ?
Vous pouvez refaire la façade de l’immeuble ou en détruire un, ça ne changera rien au fait que derrière, ce sera toujours des familles misérables qui vivent une accumulation de malheurs. Un taux de pauvreté trois fois supérieur à la moyenne nationale, un taux de chômage deux fois supérieur à la moyenne nationale, des familles qui sont beaucoup moins diplômées, beaucoup moins équipées et des problèmes médicaux massifs dans ces quartiers où il y a beaucoup moins de médecins, beaucoup moins de spécialistes. Ces malheurs se concentrent et se cumulent sur ces territoires.
La politique de la ville permet d’aider certains à s’en sortir par l’école, par l’entrepreneuriat, par la culture, par le sport. Ceux qui s’en sortent s’en vont dès qu’ils le peuvent. Ces ghettos restent des ghettos puisqu’ils accueillent uniquement des familles en grande difficulté. Il faut sortir de ça. Pour ça, il faut que toutes les familles, quel que soit leur niveau de richesse, leurs revenus puissent se loger partout, y compris dans les villes très riches. À Maisons-Laffitte, dans les Yvelines, il y a 10 % de logements sociaux. Le maire viole délibérément la loi et refuse de construire. À Trappes, il y a 60 % de logements sociaux. Donc tant qu’on ne sort pas de cela, on vivra chacun dans une sorte de ségrégation qui nous condamne au malheur.