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ANTISÉMITISME ET DÉTESTATION DE L’OCCIDENT – PARLER ENFIN DE L’ISLAMO-GAUCHISME – POINT DE VUE

ARTICLE

Aura-t-on enfin le droit de parler d’islamo-gauchisme ?

Renée Fregosi 09/10/2023 JDD

La philosophe et politologue Renée Fregosi* dénonce la non-condamnation des exactions commises par le Hamas en Israël, par la France insoumise et le NPA.

Selon l’essayiste, la gauche propalestinienne partage avec les islamistes, l’antisémitisme et la détestation de l’Occident.

Dans son communiqué après l’attaque lancée sur Israël samedi par le Hamas, LFI à travers son Groupe parlementaire à l’Assemblée Nationale déclare : « L’offensive des forces armées palestiniennes menée par le Hamas intervient dans un contexte d’intensification de la politique d’occupation israélienne à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem Est ». Une fois encore, Israël est considérée comme seul coupable dudit « conflit israélo-palestinien ». Et le communiqué du NPA peut se permettre d’être encore plus explicite puisque ce petit parti ne s’adresse qu’à ses partisans : « Le NPA rappelle son soutien aux PalestinienNes et aux moyens de lutte qu’ils et qu’elles ont choisi pour résister ».

Depuis les années 60-70, le propalestinisme se répand en effet à gauche, et dans la dernière période, il a tendu à en devenir l’axe idéologique. Le propalestinisme consiste en un engagement inconditionnel en faveur de la « cause palestinienne ». Caractérisée à la fois par sa tonalité islamiste et sa dimension « révolutionnaire », la cause palestinienne est la conséquence logique de l’invention du « peuple palestinien ». Il n’a en effet jamais existé à proprement parler de peuple palestinien avant que ce terme n’ait été promu dans un but stratégique de négation de l’État d’Israël. En parrainant la création de l’OLP en 1964, dans le contexte de la guerre froide, l’URSS transformait les « Arabes de Palestine » en « peuple palestinien ».

Cette gauche partage en effet avec les islamistes, en premier lieu, la détestation de l’Occident et de la France. Mais elle rejoint également les islamistes dans leur haine à l’égard des Juifs.

Avec le retour en force de la « violence révolutionnaire » et l’effondrement de la gauche démocratique, le propalestinisme constitue l’ultime mythe mobilisateur de l’eschatologie messianique révolutionnaire dont l’islamo-gauchisme est la matrice. A partir des années 90-2000, cet islamo-gauchisme commence en effet à s’affirmer à travers la chaîne d’équivalences entre Palestiniens, Arabes, immigrés, migrants, musulmans, militants islamistes, ex-colonisés, néo-colonisés, nouveaux « damnés de la terre ». On a vu ainsi se mettre en mouvement cette circulation du « sujet révolutionnaire » réactivant le processus des religions séculières et entrant en congruence avec la dynamique politique de l’intégrisme musulman dont l’offensive s’intensifie à partir des années 90-2000 également.

Ainsi la grande majorité de l’électorat musulman des « quartiers » notamment est imprégné par l’idéologie islamiste qui les « désavoue » de la France, de ses institutions, de sa culture et de sa langue, mais qui réactive aussi une judéophobie musulmane traditionnelle. Pour séduire cet électorat, il s’agit donc de partager les éléments principaux de la vision islamiste. Mais il ne faut pas croire que ceux qui le font à gauche, s’alignent sur les positions islamistes uniquement par cynisme électoraliste. Un part de « sincérité », c’est- à-dire de conviction, entre également dans ce positionnement. 

Cette gauche partage en effet avec les islamistes, en premier lieu, la détestation de l’Occident et de la France. Mais elle rejoint également les islamistes dans leur haine à l’égard des Juifs. On a vu en effet ressurgir cette lamentable tradition de l’antisémitisme de gauche ce « socialisme des imbéciles » comme l’appelait le socialiste allemand Auguste Bebel (les Juifs étaient assimilés au capitalisme, à la finance, aux riches), sous la forme nouvelle de « l’antisionisme ». Désormais ce n’est plus l’abolition du prolétariat qui est à l’ordre du jour, mais la défense « des petits, des dominés, des discriminés, des exclus » contre « l’impunité des privilégiés, des élites, des dominants, des bénéficiaires de la mondialisation ». Au nom d’un égalitarisme délétère, cette gauche qui défend les revendications de l’islam politique sans se soucier de leur caractère anti-démocratique, antirépublicain et y compris sexiste, communie également dans l’antisémitisme avec l’islamisme. Car les Juifs seraient non seulement des profiteurs, des exploiteurs, des expropriateurs, mais aussi des privilégiés, comme l’affirme le hashtag #JewishPrivilege (« privilège juif ») qui fait flores sur les réseaux sociaux depuis son lancement en 2020.

Les Juifs en Israël réaliseraient un génocide du « peuple palestinien » car ils seraient devenus les nouveaux nazis. N’est-ce pas le slogan des manifestations « pro-palestiniennes » et « contre l’islamophobie » auxquelles LFI participe et donne sa caution ?

L’antisionisme contemporain exprime bien une nouvelle forme d’antisémitisme : les Juifs ne sont plus les « métèques », les « méprisés », que l’on peut violenter impunément, mais des « super-blancs » dominateurs et cela parce que Israël a l’impudence de persévérer à exister. Jacques Vichniac en 1968 déjà (un an après la guerre des 6 jours) dans son essai « La gauche contre Israël ? essai sur le néo-antisémitisme » notait le parallélisme saisissant entre haine des Juifs et ressentiment à l’égard d’Israël : « Dans les deux cas, on cherche à priver l’homme ou l’État de sa force vive et des principaux attributs qui ont permis à cette force des hommes et des États de se manifester au cours de l’Histoire » : on dénie à Israël comme à l’époque du statut des dhimmis, on déniait aux Juifs, la légitimité à porter des armes et à se défendre, à posséder un territoire national et de la terre, à avoir de l’argent et des biens en suffisance, à avoir de la fierté et à marcher la tête haute.  

L’antisionisme propalestiniste reprend en effet des éléments de l’antisémitisme traditionnel : les Juifs et l’argent, les Juifs et le pouvoir, les Juifs et le cosmopolitisme, les Juifs et la fourberie, les juifs et leurs « jérémiades », pour les traduire en thématiques antijuives contemporaines prenant pour cible l’État d’Israël. L’État d’Israël serait illégitime parce que son territoire ne serait pas une terre juive (l’histoire est niée et les lieux historiques juifs sont baptisés de noms arabes faisant référence à l’islam : « le mont du Temple » est devenue « l’esplanades des mosquées », la « Judée et la Samarie » sont « la Palestine », et Hébron, Jéricho et jusqu’à Jérusalem sont revendiquées comme des villes arabes ou des lieux saints musulmans et non Juifs). Les Juifs seraient donc des colonisateurs (connotés négativement) qui usurperaient la terre des Arabes et plus particulièrement desdits « Palestiniens ». Et même, les Juifs en Israël réaliseraient un génocide du « peuple palestinien » car ils seraient devenus les nouveaux nazis. N’est-ce pas le slogan des manifestations « pro-palestiniennes » et « contre l’islamophobie » auxquelles LFI participe et donne sa caution ? 

*Dernier ouvrage paru : Cinquante nuances de dictature. Tentations et emprises autoritaires en France et ailleurs. Éditions de l’Aube 2023

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