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ÉMEUTES (49) : Ne plus loger les plus « précaires » dans les quartiers « prioritaires » – DÉRIVE TECHNICISTE ?

LA MIXITÉ PAR LA SÉGRÉGATION, ET L’INCLUSION PAR L’EXCLUSION ?

Pour favoriser la mixité sociale, Elisabeth Borne – à l’étonnement de tous – a dit vendredi ne plus vouloir attribuer de logements aux « personnes les plus précaires » dans les quartiers prioritaires. « C’est double-peine : vous êtes mal logés, on reconnaît le fait que vous avez des difficultés, mais les logements les moins chers, vous ne pourrez pas y avoir droit », regrette la Fondation Abbé Pierre.

L’IDÉE TERRIFIANTE ET TECHNICISTE DE CONTRAINDRE LES PLUS PAUVRES À UNE MOBILITÉ FORCÉE

Le gouvernement va demander aux préfets de ne plus attribuer de logements dans les quartiers prioritaires aux ménages les plus en difficulté, afin de favoriser la mixité sociale, a notamment annoncé la Première ministre.

« Il y a des régions où en moins d’un an vous avez un logement social et d’autres où il faut deux, trois, voire huit ans pour obtenir un logement social », estime sur franceinfo Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat.

A-t-on pesé cette décision au sein de l’exécutif ? Q

ui a été associé à une réflexion qui concernerait le contexte, les conséquences et les mesures bien plus lourdes et structurelles qui donneraient à cette décision toute techniciste quelques maigres chances d’être acceptable sur les plans politiques et éthiques ?

Article

Mixité sociale et logement : « On est face à une fausse bonne idée qui pourrait avoir des conséquences lourdes »,

réagit la Fondation Abbé Pierre après les annonces d’Elisabeth Borne

France Info. 27/10/2023

« On est face à une fausse bonne idée qui pourrait avoir des conséquences lourdes », réagit vendredi 27 octobre sur franceinfo Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre après les annonces d’Elisabeth Borne pour les quartiers populaires. La Première ministre a dévoilé une mesure-choc : les préfets ont pour consigne de ne pas attribuer de logements sociaux dans les quartiers prioritaires de la ville aux ménages bénéficiant du Droit au logement opposable (Dalo).

Ces familles « Dalo » disposent d’un droit au logement reconnu par une commission départementale. Elles sont près de 35 000 à avoir obtenu cette reconnaissance de droit au logement en 2022. Plus de 93 000 ménages « Dalo » restent cependant en attente d’un relogement, en majorité en Île-de-France.

franceinfo : Vous la comprennez cette proposition ?

Christophe Robert : On est face à une fausse bonne idée qui pourrait avoir des conséquences lourdes, parce que la Première ministre dit qu’il ne faudra plus reloger des personnes reconnues prioritaires de par leur situation sociale, au titre du Dalo, dans les quartiers prioritaires de la ville. C’est double-peine : vous êtes mal logés, on reconnaît le fait que vous avez des difficultés, mais les logements les moins chers, ceux qui pourraient être disponibles dans ces territoires, vous ne pourrez pas y avoir droit. Ça va réduire la capacité à mettre en oeuvre le droit au logement.

« Si on veut faire de la mixité sociale, c’est l’inverse qu’il faut faire »Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre

à franceinfo

C’est ne pas empêcher des personnes de pouvoir accéder aux logements, mais accroître les solutions qui sont proposées partout sur le territoire. Or, là, le risque c’est qu’on freine la possibilité de reloger les ménages reconnus prioritaires Dalo dans un certain nombre de logements, notamment dans les quartiers où les logements sont les moins chers.

À ce stade, il n’y a pas de projet de gouvernement qui proposerait une solution alternative à ces familles les plus modestes à qui l’on refuserait qu’elles s’installent dans un quartier en difficulté ?

Je ne crois pas. Déjà, Manuel Valls, Premier ministre en 2015 après l’attentat de Charlie Hebdo, avait voulu interdire le logement des personnes reconnues prioritaires Dalo dans les quartiers prioritaires. Et puis il avait compris qu’en fait c’était dans l’autre sens qu’il fallait agir. Il y avait donc eu la loi relative à l’Egalité et la citoyenneté de 2017 qui, justement, imposait des quotas de relogement de ménages prioritaires en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville. Aujourd’hui, l’objectif c’est 25 % d’attributions de logements sociaux aux ménages les plus modestes. On est à 17 %. C’est là qu’il faut mettre le paquet ! Autrement, ça veut dire que des familles en situation d’urgence absolue, reconnues prioritaires Dalo, n’auront pas accès à environ un tiers du parc HLM de France.

Vous regrettez une forme d’effet pervers ?

C’est pour ça que je parle de fausse bonne idée. La mixité sociale doit marcher dans les deux sens. Elle ne peut pas marcher par l’interdiction d’une partie du parc immobilier aux ménages les plus en difficulté. On sait à la Fondation Abbé Pierre à quel point ça peut avoir des effets délétères et des conséquences lourdes pour les plus fragiles d’entre nous.

Est-ce que vous en voulez aux maires qui n’appliquent pas la loi SRU qui demande aux communes d’au moins 50 000 habitants de disposer de 20 % de logements sociaux ?

Voilà une bonne illustration de ce que j’essaie d’expliquer. On ferme la porte à un tiers des logements sociaux dans les quartiers prioritaires, mais on ne fait pas l’effort là où il y a 3 %, 4 % ou 5 % de logements sociaux. Depuis que la loi a été votée en 2000, la moitié des logements sociaux ont été construits dans les communes soumises à la loi SRU, donc c’est plutôt une bonne loi. Dans la grande majorité, la loi est respectée. Et puis il y a un tiers de communes qui ne le respectent pas, dont une partie qui sciemment ne le font pas et préfèrent payer des pénalités. C’est là où nous avons besoin d’un Etat fort qui impose de construire les logements sociaux manquants.

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