
CONSEIL D’ÉTAT ET CONTRÔLE DE L’INFORMATION : APRÈS LA PRUDENTE MODÉRATION DE L’ARCOM, LA GRANDE GÊNE DE RSF
TITRAIT METAHODOS https://metahodos.fr/2024/02/21/conseil-detat-et-controle-de-linformation-apres-la-timide-moderation-par-larcom-la-grande-gene-de-rsf/
CONTRÔLE POLITIQUE DE L’INFORMATION : L’ARCOM TEMPÈRE LE CONSEIL D’ÉTAT ?
TITRAIT ÉGALEMENT METAHODOS https://metahodos.fr/2024/02/19/controle-politique-de-linformation-le-patron-de-larcom-se-veut-rassurant/
« Françoise Laborde : « Ficher les personnes intervenant à la télé est une atteinte terrible à la liberté de penser » »
TITRE MARIANNE Emilien Hertement 20/02/2024 QUI POURSUIT :
« La journaliste et ancienne membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’ancêtre de l’ARCOM, Françoise Laborde, condamne la décision du Conseil d’État envers CNEWS et appelle à mettre fin la comptabilisation des temps de parole dans l’audiovisuel…. »
ARTICLE : Après l’action de RSF auprès de l’Arcom, CNews est visée, mais c’est l’audiovisuel public qui est touché
Aude Dassonville LE MONDE 21 02 2024
La polémique autour du réexamen par l’Arcom de la gestion du pluralisme de CNews profite aux chaînes privées, qui font pression sur France Télévision et Radio France.
Ceux qui se souviennent de la publicité pour les bonbons rafraîchissants appellent encore ce genre d’effets collatéraux « le double effet Kiss Cool ». En obtenant gain de cause auprès du Conseil d’Etat qui, mardi 13 février, a « enjoint » l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle (Arcom) à réexaminer la gestion du pluralisme par CNews, Reporters sans frontières a provoqué un effet secondaire qu’il n’avait sans doute pas prévu : la mise en accusation de l’audiovisuel public.
Contrariée d’affronter, une nouvelle fois, les critiques sur la faible diversité des points de vue sur son antenne, la chaîne conservatrice a en effet, dans un geste défensif, instantanément refilé le mistigri à ses concurrentes financées par les citoyens. Jordan Bardella a eu le même réflexe : « La décision rendue par le Conseil d’Etat sur CNews, au nom du “pluralisme” et de l’indépendance de l’information, va-t-elle s’appliquer au service public audiovisuel où règne ouvertement l’entre-soi politique et la pensée unique ? », a demandé le président du Rassemblement national sur X.
Une question purement et doublement rhétorique, puisque le respect du pluralisme s’impose à tous les médias audiovisuels. Les animateurs de la chaîne de Vincent Bolloré auraient donc tout aussi bien pu évoquer leurs concurrentes BFM-TV et LCI, voire TF1 et M6, qui diffusent des journaux d’information et invitent des politiques (à des fréquences diverses). Aucun ne l’a fait. Peut-être parce qu’à leurs yeux, leurs consœurs du privé sont exemptes de toute critique – ou devraient l’être au nom de leur caractère privé, justement. Peut-être, aussi, parce que l’audiovisuel public constitue leur meilleur terrain d’entente.
« Asymétries concurrentielles »
Il y a moins d’un an, les groupes TF1, M6, Canal+ et Altice, réunis au sein de l’Association des chaînes privées, se sont lancés dans une dénonciation des « avantages compétitifs » dont bénéficierait France Télévisions à leur détriment. A l’époque, l’honnêteté de l’information et le respect du pluralisme ne faisaient pas partie de leurs récriminations. Les reproches se concentraient plutôt sur les « asymétries concurrentielles » dont ils disaient pâtir, en matière de fictions, de divertissements et d’événements sportifs, notamment.
Le moment était opportun. Les discussions sur les contrats d’objectifs et de moyens de France Télévisions et de Radio France allaient s’ouvrir, destinés à graver dans le marbre la feuille de route des deux entreprises pour les cinq prochaines années. La réflexion sur la pérennisation du système transitoire de financement appelé à remplacer l’ancienne redevance (la fraction de TVA) devait commencer.
Et le Sénat s’apprêtait à faire adopter une proposition de loi en vue de créer une holding de l’audiovisuel public, une révolution de structure dont chacun sait qu’elle réclame du temps, de l’argent et de l’énergie. Depuis, le ministère de la culture a changé de locataire, les projets de Rachida Dati demandent encore d’être précisés, et ces sujets sont toujours d’actualité. Il est donc encore temps, pour les chaînes privées, de maintenir la pression sur leurs concurrentes aux audiences un peu trop élevées et au budget trop opulent à leurs goûts. Surtout quand leur propre modèle de financement par la publicité connaît des vicissitudes.
Le « ressenti » vs le « réel »
Dans ces conditions, les soupçons en partialité tombent à point nommé. Même l’économiste Julia Cagé, quand elle fait référence aux travaux de recherche (déjà anciens) qu’elle a menés avec d’autres chercheurs pointant la « reprise en main du groupe Canal+ par Vincent Bolloré », renvoie vers une étude dont il ressort que tous les médias sont soumis à des biais en faveur de tel ou tel camp politique.
Donc, y compris Radio France et France Télévisions, où l’on préfère garder le silence plutôt que se risquer à une déclaration susceptible d’alimenter la polémique. « Qu’on vienne inspecter nos émissions, et qu’on sorte de la température ressentie pour se rendre compte de la température réelle », cingle cependant un cadre de l’une des entreprises concernées, certain d’être irréprochable.
Dans les médias publics, on n’a pas oublié la charge d’Emmanuel Macron en 2017, quand il avait parlé de « honte de la République » à l’évocation de l’audiovisuel public, et l’on s’efforce d’éviter, autant que faire se peut, les reproches en parti pris (le respect des temps de parole des politiques n’est pas pris en défaut par l’Arcom).
Le passage de l’émission quotidienne des humoristes de France Inter, estampillés à gauche, à une programmation hebdomadaire illustre à n’en pas douter ce souhait. « CNews a un problème de pluralisme assez manifeste, mais réussit, grâce à des méthodes de communication très performantes, à en faire un sujet pour nous ! », déplore un autre cadre. L’audiovisuel public se retrouve encore une fois sur le banc des accusés, et il n’avait pas besoin de ça.