
LA DÉCISION PRÉSIDENTIELLE QUI ÉTONNE
Le président de la République a choisi le deuxième nom de la liste qui lui était proposée pour la désignation du président de la section des finances de l’institution.
EXTRAITS DE L’ARTICLE CI CONTRE DU MONDE DU 22 02 2024 :
« Les autres membres ou ex-membres du Conseil d’Etat interrogés par Le Monde partagent ces appréciations sur les qualités professionnelles de M. Josse. L’un d’eux rapporte cependant que l’arbitrage élyséen a « surpris » au Palais-Royal, d’autant plus M. Schwartz était, de longue date, pressenti pour obtenir une présidence. »
« Un conseiller d’Etat, toujours en activité, se montre beaucoup plus sévère, en soutenant que cet épisode porte atteinte à l’indépendance de l’institution. A ses yeux, Emmanuel Macron commet même une « faute » : « Si, aujourd’hui, le président de la République s’immisce dans les choix, comment pourra-t-on le reprocher à Marine Le Pen, dans l’hypothèse où elle est élue et où elle décide de s’affranchir des usages ? » »
DES MOTIVATIONS POLITIQUES
« Il faut plonger – lit on dans l’Opinion – dans le sérail du Conseil d’Etat pour comprendre le veto mis par le président de la République à une récente nomination. Le contexte politique, l’actualité sur l’immigration, les relations complexes entre l’exécutif et la haute juridiction administrative en constituent la toile de fond. »
EN JANVIER 2022 DÉJÀ :
« Didier Tabuteau, une nomination surprise à la tête du Conseil d’Etat »
TITRAIT LE MONDE Par Jean-Baptiste Jacquin QUI POURSUIVAIT :
« A 63 ans, ce spécialiste des questions de santé publique a été nommé, mercredi, en conseil des ministres, vice-président de l’institution du Palais-Royal, dont il présidait la section sociale.
« Président de la section sociale de l’institution du Palais-Royal depuis juin 2018, il est également enseignant à Sciences Po, où il est responsable de la chaire Santé, et codirecteur de l’Institut Droit et santé….
« Son nom n’avait d’ailleurs jamais été évoqué par les visiteurs du soir de Matignon ou de l’Elysée.
« Emmanuel Macron a donc précipité les choses, alors que la vacance annoncée à la tête du Conseil d’Etat risquait d’être inscrite à son passif. Selon la formule officielle du conseil des ministres, M. Tabuteau a été nommé « sur proposition du garde des sceaux, ministre de la justice ». En réalité, cette nomination stratégique est traditionnellement une prérogative du président de la République. »
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« CNews, immigration, genre… Enquête sur le Conseil d’Etat et ses décisions très politiques »
TITRE LE FIGARO Par Paule Gonzalès 22 02 24 QUI POURSUIT :
« Ces dernières années, la plus haute juridiction administrative a multiplié les décisions contestées sur des sujets sensibles.
« La coupe était pleine. Elle a débordé le 13 février dernier. En rendant sa décision sur CNews, obligeant le gendarme de l’audiovisuel à passer au peigne fin le pluralisme et l’indépendance de la chaîne d’information et de débats, le Conseil d’État a suscité une onde de choc dont il n’avait pas anticipé l’ampleur. L’émoi a largement dépassé les médias du groupe Bolloré. Tout le Landerneau médiatique s’inquiète d’une décision qui, en s’appuyant sur la loi de 1986, oblige l’Arcom à un contrôle strict du «pluralisme des courants de pensées» au sein de la chaîne de télévision, et pas seulement en ce qui concerne les invités politiques.
« En filigrane, le spectre d’un étiquetage idéologique des débatteurs, chroniqueurs et journalistes prenant la parole sur les plateaux. De quoi entamer les libertés d’expression et éditoriale. Un «premier pas dans un monde cauchemardesque, orwellien et aseptisé, où toutes les pensées seraient identifiées et surveillées par la puissance publique», s’inquiète M François-Henri…
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ARTICLE : Nomination au Conseil d’Etat : le choix d’Emmanuel Macron, contraire à l’usage, surprend en interne
Emmanuel Macron est très attentif au choix des personnalités qui sont appelées à exercer d’importantes responsabilités dans les plus hautes institutions de notre pays. Dans le processus de tamisage, il tient à imprimer sa marque et à rappeler l’étendue de ses prérogatives, quitte – parfois – à bousculer des pratiques bien établies. Démonstration vient d’en être apportée avec la récente désignation du président de la section des finances du Conseil d’Etat.
Comme l’a révélé La Lettre, les magistrats du Palais-Royal avaient recommandé au chef de l’Etat trois noms, le premier sur la liste – Rémy Schwartz – ayant leur préférence. C’est finalement celui qui apparaissait au deuxième rang – Philippe Josse – qui a été retenu, à la demande du locataire de l’Elysée. L’arbitrage a été officialisé lors du conseil des ministres du 14 février. Très inhabituelle, la décision de M. Macron a provoqué de l’étonnement, voire des critiques, parmi les membres de cet organe essentiel de la République.
Le rituel est rodé. Pour une présidence de section administrative (chargée de rendre des avis, comme celle des finances), l’exécutif se voit généralement proposer trois noms par le bureau du Conseil d’Etat, qui réunit les magistrats les plus haut placés du Palais-Royal. S’agissant de la section du contentieux (qui tranche les litiges entre l’administration et les individus), un seul nom est soumis au pouvoir en place.
Quelques exceptions
Depuis la Libération, un usage s’est progressivement installé, qui consiste à nommer président de section le premier de la liste présentée par le Conseil d’Etat. Cette coutume a toujours été respectée, à quelques exceptions près. Exemples : Christian Vigouroux, dont la candidature pour une section administrative avait été écartée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, et Guy Braibant, qui a subi le même sort pour la section du contentieux durant le premier mandat de François Mitterrand.
Pour M. Vigouroux, il est possible que son compagnonnage avec la gauche ait joué contre lui. Cela étant, en 2009, M. Sarkozy avait aussi prouvé qu’il pouvait sélectionner des prétendants d’un autre bord que le sien, en nommant à la présidence d’une section Olivier Schrameck, alors que ce dernier avait été directeur du cabinet du socialiste Lionel Jospin à Matignon (1997-2002).
Quant à M. Braibant, Le Monde a raconté que la possible promotion de cet ancien adhérent du Parti communiste français avait suscité des oppositions au Palais-Royal, auxquelles M. Mitterrand aurait cédé. Il semble aussi, selon nos informations, que le bureau ait, à l’époque, été très hésitant et que le choix de l’exécutif, en 1985, se soit aligné sur la préférence personnelle du vice-président du Conseil d’Etat alors en fonctions, Pierre Nicolaÿ.
Dans le cas de la section des finances, aujourd’hui, le bureau du Conseil d’Etat a donc inscrit en tête de sa liste M. Schwartz, la deuxième place étant attribuée à M. Josse. Un fin connaisseur de la maison voit dans M. Schwartz « un candidat incontestable » : il a une fonction-clé dans la section du contentieux, où il officie depuis de très nombreuses années. Il est, par ailleurs, plus ancien que M. Josse au « tableau » du Conseil d’Etat – ce qui est pris en compte dans les propositions de nomination.
En même temps, poursuit cette même source, M. Josse s’avère « tout aussi incontestable » : au regard du poste à pourvoir, ses titres sont même « supérieurs » à ceux de M. Schwartz, car c’est « un spécialiste absolument remarquable des finances publiques ». Après plusieurs années en cabinets ministériels sous le deuxième mandat de Jacques Chirac, M. Josse a été directeur du budget de 2006 à 2011 – période au cours de laquelle il a croisé M. Macron, celui-ci étant alors affecté à l’inspection générale des finances.
Profil idéal
Puis M. Josse a intégré le Conseil d’Etat, où il a beaucoup travaillé sur des dossiers de contentieux fiscal et de droit budgétaire. Autrement dit, M. Josse aurait le profil idéal pour le fauteuil qui lui est dévolu : celui d’un expert, au cerveau agile, qui ne pourra pas se faire enfumer par Bercy.
Les autres membres ou ex-membres du Conseil d’Etat interrogés par Le Monde partagent ces appréciations sur les qualités professionnelles de M. Josse. L’un d’eux rapporte cependant que l’arbitrage élyséen a « surpris » au Palais-Royal, d’autant plus M. Schwartz était, de longue date, pressenti pour obtenir une présidence.
Un conseiller d’Etat, toujours en activité, se montre beaucoup plus sévère, en soutenant que cet épisode porte atteinte à l’indépendance de l’institution. A ses yeux, Emmanuel Macron commet même une « faute » : « Si, aujourd’hui, le président de la République s’immisce dans les choix, comment pourra-t-on le reprocher à Marine Le Pen, dans l’hypothèse où elle est élue et où elle décide de s’affranchir des usages ? »
Sollicité, le Conseil d’Etat n’a pas souhaité s’exprimer. De son côté, l’Elysée se borne à un résumé très sobre des faits : « Le président avait trois noms qui lui ont été soumis, indique-t-on. Il n’a pas choisi le premier mais le deuxième, en raison de son expérience en matière de finances publiques pour présider précisément la section dédiée à cette matière. »