
« IL EST PARTI ET NOUS, ON EST TOUJOURS LÀ… ». CENSURE ET SANCTION À LA PROVENCE
TITRAIT METAHODOS HIER https://metahodos.fr/2024/03/23/marseille-il-est-parti-et-nous-on-est-toujours-la-censure-et-sanction-dun-directeur-de-redaction/
« Les salariés de « La Provence » en grève illimitée après la mise à pied du directeur de la rédaction »
TITRE LE POINT QUI POURSUIT : « Aurélien Viers a été sanctionné, ce vendredi 22 mars, après une première page sur la visite surprise d’Emmanuel Macron à Marseille, jugée ambiguë par la direction du quotidien de l’armateur CMA CGM.
« Vif émoi à rédaction marseillaise de La Provence. L’ensemble des salariés a voté une grève illimitée, ce vendredi 22 mars, après une assemblée générale du personnel, indique Le Figaro . Selon le quotidien, le personnel du journal détenu par l’armateur Rodolphe Saadé a voté en faveur de cette grève à 129 voix pour, sur un total de 163 participants.
« Les journalistes dénoncent la mise à pied de leur directeur de la rédaction, Aurélien Viers, après une première page jugée ambiguë sur la visite surprise d’Emmanuel Macron. « Nous demandons l’abandon des sanctions contre Aurélien Viers, et qu’il revienne immédiatement », assure Audrey Lettelier, déléguée au Syndicat national des journalistes, majoritaire dans l’entreprise, auprès du Figaro. »
ARTICLE – Macron à Marseille : la mise à pied d’Aurélien Viers de « La Provence » relance le débat sur l’indépendance des médias
La suspension du directeur de la rédaction après une Une sur Emmanuel Macron provoque la colère dans les médias de Rodolphe Saadé et l’indignation dans la classe politique.
Par Anthony Berthelier LE HUFFPOST 23/03/2024
La mise à pied du directeur de « La Provence » indigne et relance le débat sur l’indépendance des médias (photo de Rodolphe Saadé prise en 2018).
« Des promesses d’indépendance piétinées. » En plus de susciter la fronde d’une partie des titres détenus par Rodolphe Saadé (via le groupe WhyNot Media, une branche de CMA CGM), la mise à pied du directeur de la rédaction de La Provence, Aurélien Viers, provoque l’indignation d’une partie de la classe politique.
La crise est partie de l’annonce de la mise à pied du directeur de la rédaction pour la Une de jeudi concernant le jour d’après la visite d’Emmanuel Macron à Marseille. En couverture, le journal titrait : « Il (Emmanuel Macron, ndlr) est parti et nous, on est toujours là… », en reprenant les mots d’un habitant cité en page intérieure.
Patatras. Le lendemain, vendredi, le directeur de la publication, Gabriel d’Harcourt, présente les « plus profondes excuses » du journal pour cette présentation qui pouvait « laisser croire que nous donnions complaisamment la parole à des trafiquants de drogue décidés à narguer l’autorité publique ». Le directeur de la rédaction est suspendu.
« On peut acheter un titre, mais pas sa liberté »
Depuis, les journalistes de La Provenceet de La Tribune (un autre titre du groupe) dénoncent collectivement une ingérence inadmissible de la part de Rodolphe Saadé, le propriétaire de CMA CGM, présenté comme proche d’Emmanuel Macron – et qui vient d’annoncer le rachat d’Altice Media, maison mère de BFMTV et RMC.
Autant d’enjeux qui trouvent un écho tout particulier dans la sphère politique, à l’heure où certains élus se penchent sur le fonctionnement des médias et la possibilité de mieux garantir leur indépendance.
À gauche notamment, de nombreuses voix s’élèvent pour soutenir haut et fort les rédactions du groupe WhyNot Media dans leur fronde. « Soutien total à la rédaction de La Provence », écrit ainsi la tête de liste écologiste Marie Toussaint ce samedi matin sur les réseaux sociaux, en ajoutant, à l’adresse de Rodolphe Saadé : « On peut acheter un titre, mais pas sa liberté ».
Avant elle, le numéro 1 des Insoumis Manuel Bompard a dénoncé des « pressions inacceptables », quand son homologue socialiste Olivier Faure s’étonnait presque que cette scène, « pas tolérable », se déroule « en France en 2024 » : « La démocratie ne se défend pas qu’en dehors de nos frontières ! »
Débat à l’Assemblée début avril
Surtout, pour certains élus, le sort d’Aurélien Viers souligne la nécessité de légiférer pour protéger davantage l’indépendance des rédactions. « Il est temps de faire voter une loi pour l’indépendance et contre la concentration des médias », estime ainsi Manuel Bompard, en reprenant une proposition insoumise de longue date. Mais c’est sans doute les écologistes qui imposeront le débat à l’Assemblée nationale ces prochaines semaines.
La députée Sophie Taillé-Polian va en effet profiter de la niche parlementaire allouée à son groupe début avril pour défendre un texte visant à mieux garantir cette indépendance. Et elle prévient déjà : « Rodolphe Saadé doit comprendre qu’il s’agit là d’un principe constitutionnel, pas d’une option. »
Dans ce contexte, les réactions à droite ou dans la majorité sont bien plus rares. Un des seuls à s’exprimer, l’ancien député LR Julien Aubert, estime à travers l’exemple de La Provence que « toute la presse » doit être libre, au-delà du cas de CNews. Une façon de rapprocher cette crise liée au groupe CMA CGM aux déboires de la chaîne d’informations détenue par Vincent Bolloré, souvent accusé d’encourager les idées d’extrême droite, et sur le gril d’une commission d’enquête au Palais Bourbon.
En attendant les prochains débats à l’Assemblée, sur la loi écologiste, et les suites de la commission d’enquête sur les règles de la TNT (et donc des chaînes d’infos), la fronde risque de se poursuivre au sein des rédactions de Rodolphe Saadé. Les journalistes de La Provence ont décidé une grève illimitée, et ceux de La Tribune doivent cesser le travail mardi prochain.