
IL FALLAIT OSER L’ESCOBARDERIE – S’EN ÉTONNER ? :
« Hormis une dérive des dépenses initialement prévues qui est du fait des collectivités locales, il n’y a pas de dérapage de la dépense de l’État » (Macron)
Dans le contexte de dérapage des finances publiques, Emmanuel Macron cible les collectivités territoriales et ça ne passe pas auprès des élus locaux. Le patron de l’association des maires de France vient d’écrire au chef de l’État.
( VOIR ARTICLE 1 )
Pour alimenter le débat, le ministère du budget vient de recevoir un rapport qui évalue le coût de « l’enchevêtrement des compétences » à « plusieurs milliards« , alors qu’Emmanuel Macron aimerait réformer le fameux « millefeuille territorial« .
( VOIR ARTICLE 2 )
1. ARTICLE – Dépenses publiques : le bras de fer entre l’exécutif et les collectivités locales
Aurélie Herbemont FRANCE INFO. 29/05/2024
David Lisnard, le président LR de l’Association des maires de France (AMF), a envoyé mardi 28 mai dans la soirée un courrier à Emmanuel Macron pour lui proposer un débat sur les finances publiques du pays. Un débat après les élections européennes, ou à l’occasion du congrès des maires à l’automne prochain, si le président préfère. À ce stade, l’Élysée ne fait aucun commentaire sur cette proposition de joute budgétaire. Si David Lisnard réclame un débat, c’est à cause d’une petite phrase d’Emmanuel Macron dans L’Express la semaine dernière : « Hormis une dérive des dépenses initialement prévues qui est du fait des collectivités locales, il n’y a pas de dérapage de la dépense de l’État« .
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Cette accusation de « dérive » des dépenses des collectivités a fait bondir les élus locaux. « Macron a encore manqué une occasion de se taire », torpille un élu qui accuse le président de chercher des « boucs émissaires« . L’agacement s’est manifesté par un communiqué conjoint des associations des régions, des départements et des maires pour dénoncer une « affirmation déloyale« , « provocatrice » ou encore une « atteinte à la confiance entre l’exécutif et les élus locaux« . Les collectivités territoriales ripostent en expliquant que, certes, leurs dépenses ont augmenté cette année, mais pas de leur fait. Elles ciblent l’inflation, qui pèse sur les prix de l’énergie, sans oublier le transfert de charges de l’État vers les collectivités, comme la revalorisation des allocations sociales ou des salaires des fonctionnaires territoriaux.
En jeu, la préparation du budget pour 2025
« Les collectivités locales se plaignent en permanence« , dédramatise un conseiller de l’exécutif. Un autre ironise sur leur façon de dire « l’État est méchant, les collectivités sont gentilles« . Ce qui est en jeu derrière, c’est la préparation du budget pour 2025. Le gouvernement cherche encore des milliards d’économies et les collectivités locales pourraient aussi être mises à contribution. « Si Bercy est trop gourmand, les maires n’auront d’autre choix que de fermer des services publics et de diminuer les investissements, y compris dans la transition écologique« , riposte un cadre de l’AMF. Bref, le bras de fer État-collectivités risque de continuer. Pour alimenter le débat, le ministère du budget vient de recevoir un rapport qui évalue le coût de « l’enchevêtrement des compétences » à « plusieurs milliards« , alors qu’Emmanuel Macron aimerait réformer le fameux « millefeuille territorial« .
2. ARTICLE – État, départements, communes… Le «millefeuille administratif» coûte au moins 7,5 milliards d’euros par an aux contribuables
Par Le Figaro 29 05 24
Un rapport remis ce mercredi au gouvernement tente pour la première fois de chiffrer le gaspillage d’argent public induit par les compétences partagées entre plusieurs collectivités et l’État.
Un potentiel gisement d’économies pour l’État ? Le coût du «millefeuille administratif» français, lié aux compétences partagées par l’État et les collectivités, «peut être estimé à 7,5 milliards d’euros», affirme un rapport remis au gouvernement ce mercredi 29 mai. Alors que l’exécutif a déjà acté 10 milliards d’euros de coupes dans les dépenses de l’État en 2024 et cherche 10 milliards d’économies supplémentaires, les coûts de l’enchevêtrement des compétences «peuvent être diminués», note le gouvernement dans un communiqué. Mais ils «ne peuvent pas être tous supprimés».
Le chiffre est issu d’un rapport commandé fin 2023 au maire de Charleville-Mézières Boris Ravignon. Il existe en France «trop d’empilements : vous avez des services de l’État, des opérateurs, des agences, quatre niveaux de collectivités, parfois des syndicats, des sociétés d’économie mixte… Ce qui ne va pas, c’est que sur une politique publique, on soit quatre ou cinq autour de la table», avait déploré le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave au lancement de la mission.
Les collectivités plus perdantes que l’État
Le rapport de Boris Ravignon précise que le coût du «millefeuille administratif» pèse principalement sur les collectivités (6 milliards d’euros), l’État supportant une charge financière quatre fois moindre (1,5 milliard d’euros). Dans le détail, le coût de l’enchevêtrement des compétences est estimé à 4,8 milliards d’euros pour les communes, 696 millions d’euros pour les intercommunalités, 355 millions d’euros pour les départements et 117 millions pour les régions.
«Cette évaluation reste un ordre de grandeur, et sans doute un minimum, étant entendu que les opérateurs» de l’État (France Travail, Agence nationale de l’habitat…) n’ont pas été inclus dans le calcul, souligne l’auteur du rapport. Pour parvenir à ce chiffre, la mission a sondé plus de 200 collectivités et préfectures par questionnaire et identifié trois types de coûts induits par le partage entre administrations de certaines compétences (multiplication des comités, coordination et instruction des demandes de financement).
Les coûts liés à la coordination entre différentes administrations qui exercent conjointement une politique publique représentent à eux seuls 85% des 7,5 milliards d’euros. Parmi les compétences dont le partage coûte le plus cher, la mission cite l’enseignement (1,2 milliard d’euros), l’urbanisme (819,5 millions) et la voirie (566 millions).
Supprimer un échelon ?
Pour autant, «la France n’a pas une catégorie de collectivités à supprimer, une strate d’élus à liquider pour que tout s’arrange», martèle Boris Ravignon en conclusion de son rapport. «Le souhait le plus vif de la mission, c’est que la réflexion se poursuive, pour examiner toutes les responsabilités que notre État, enfin recentré et stratège, pourrait déléguer en confiance aux collectivités françaises», poursuit-il.
Le maire de Charleville-Mézières plaide également pour un «chantier de simplification des normes», autre cheval de bataille du gouvernement ces derniers mois en plus de la maîtrise des dépenses publiques. Parmi les pistes à creuser, Boris Ravignon suggère de simplifier la gestion des ressources humaines dans les collectivités ou de revoir les règles et l’organisation de la commande publique pour la rendre «plus efficace et plus efficiente».
Selon Thomas Cazenave, cité dans le communiqué du gouvernement, le rapport est une «contribution à la réflexion plus globale souhaitée par le président de la République» autour de la décentralisation, un thème sur lequel une autre mission a été confiée au député de la majorité Eric Woerth. Le rapport Ravignon «nourrira la concertation à venir avec les associations d’élus», ajoute Thomas Cazenave.