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LE « DROIT DE MENTIR » : POLITIQUE ET MORALE

ÉMISSION : Faut-il rendre la politique morale ?

Jeudi 18 juillet 2024 

Rendre la politique morale, c’était un désir de Kant, formulé comme tel dans l’appendice d’un opuscule qu’il a publié en 1795, intitulé « Projet de paix perpétuelle ». Qu’entendait-il par là ? Et comment tente-t-il, par le droit notamment, de rendre cela possible théoriquement ? 

Avec

  • Antoine Grandjean Professeur de philosophie moderne et contemporaine à l’université de Lille
  • Jean-François Kervégan Professeur émérite de philosophie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et membre honoraire de l’Institut Universitaire de France

« Avec Philosophie » s’interroge cette semaine sur Kant. Dans ce quatrième épisode, Géraldine Muhlmann et ses invités s’intéressent au lien entre moral et politique dans la pensée de Kant.

Rendre moral la politique par le droit

Dans son texte Projet de paix perpétuel, Kant souligne l’importance de rendre la politique morale, par le droit notamment. Jean-François Kervégan précise : “par politicien moral, il entend le politicien qui, dans son action, se confirme rigoureusement au principe du droit”. Ainsi, “Kant entend par morale un ensemble de normes qui sont, pour une part, juridiques, pour une part, éthiques”. Il ajoute : “Kant dit “Le politique moral, le politique tel qu’il devrait être, ne devrait pas faire un pas sans plier le genou devant l’idée du droit””.

Pour rendre les politiciens moraux, il faut les obliger par le droit à une certaine publicité de leurs actes. Antoine Grandjean explique : “au fond, ce que soutient Kant, c’est qu’ils doivent, d’une certaine manière, pouvoir expliciter leur comportement comme gouvernants : c’est ça, l’exigence de publicité”. Autrement dit, “la publicité, ce n’est pas ça : c’est pouvoir dire publiquement en vertu de quoi on agit”.

À écouter : Le Mensonge : la querelle Kant / Constant

Constant et Kant : sur le droit de mentir

Une célèbre controverse lie Kant et Constant, sur la possibilité de mentir selon les principes kantiens. S’il semble que Constant ne visait pas particulièrement Kant dans sa critique, elle permet d’éclaircir quelques points sur la théorie kantienne. Antoine Grandjean explique : “ce que dit Constant dans ce texte c’est que l’absolutisme des principes, dont Kant est bien sûr un exemple, conduit, si on ne trouve pas des principes d’application qui sont des principes intermédiaires, à des absurdités dans la politique et aussi dans la morale au sens de l’éthique, la morale au sens courant”.

Or, “ce que l’on ne comprend pas quand on fait ce type d’objection, explique Jean-François Kervégan, c’est la distinction entre le plan moral ou le plan éthique et le plan juridique”. Ainsi, “l’argument de fond de Kant à propos du droit de mentir est un argument juridique”. Il détaille : “un contrat passé entre deux individus présuppose implicitement, la bonne foi des contractants. Il est donc présupposé que j’ai l’intention d’accomplir ce à quoi je me suis engagé. Si cette clause disparaît, alors plus aucun contrat n’est possible car il ne peut plus y avoir de confiance entre les contractants. Cet argument juridique est l’argument de fond de Kant pour expliquer que juridiquement, le droit de mentir est une impossibilité”.

Pour en parler

Antoine Grandjean, professeur de philosophie moderne et contemporaine à l’université de Lille. Il a notamment publié :

Jean-François Kervégan, professeur émérite de philosophie à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et membre honoraire de l’Institut Universitaire de France. Parmi ses publications, on trouve :

>>> Série d’émissions en partenariat avec Philosophie Magazine, qui publié un « Hors-série » (n°60, Hiver 2024) consacrée à Emmanuel Kant.

“Emmanuel Kant”, Hors-série Philosophie magazine, n°60, Hiver 2024.

“Emmanuel Kant”, Hors-série Philosophie magazine, n°60, Hiver 2024. – Philosophie Magazine

LIEN VERS L’ÉMISSION

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