
ANTICOR EMPÊCHÉ PAR L’EXÉCUTIF
Alors que sa demande d’agrément a fait l’objet d’un refus par le gouvernement sortant et par le gouvernement démissionnaire, l’association anticorruption Anticor tente d’obtenir des réponses.
L’association Anticor conteste le refus implicite du gouvernement de lui accorder son agrément judiciaire
Une audience en référé-suspension est prévue ce mercredi dans le dossier du renouvellement de l’agrément d’Anticor. Fin juillet, le gouvernement avait implicitement refusé de le renouveler.Une audience en référé-suspension est prévue ce mercredi dans le dossier du renouvellement de l’agrément d’Anticor.
NOTRE PRÉCÉDENTE PUBLICATION ET LE DOSSIER DE METAHODOS
LE CAMP PRÉSIDENTIEL – SANS MAJORITÉ, SANS GOUVERNEMENT, SANS LÉGITIMITÉ – REFUSE UNE NOUVELLE FOIS L’AGRÉMENT D’ANTICOR
1. ARTICLE – Anticor au tribunal ce mercredi pour tenter d’obtenir le renouvellement de son agrément
Le 07 août 2024 Le télégramme
Que va décider le tribunal ? Anticor a saisi le tribunal administratif de Paris pour obtenir l’annulation du refus implicite du gouvernement de renouveler l’agrément de l’association. Une audience en référé-suspension est prévue ce mercredi, à 10 h.
Fin juillet, le gouvernement avait une nouvelle fois refusé d’octroyer à Anticor l’agrément lui permettant d’intervenir dans des dossiers de corruption, en ne publiant aucune décision au Journal officiel dans les temps impartis. Cette absence vaut refus implicite selon l’association.
Nouvelle demande formulée
« Voilà désormais plus d’un an que le gouvernement joue la montre en ne répondant ni à nos demandes d’agrément, ni à nos demandes d’explication a posteriori », avait regretté Paul Cassia, président de l’association. « Cette stratégie du pourrissement est préoccupante pour ce qu’elle dit du rapport de l’exécutif à la lutte contre la corruption. »
Depuis, Anticor a de nouveau demandé à Matignon d’expliquer son choix et déposé une nouvelle demande d’agrément, la troisième, auprès du Premier ministre.
Se constituer partie civile
Anticor bataille depuis plus d’un an pour retrouver son agrément, perdu en 2023, après que deux dissidents ont saisi la justice administrative, estimant la procédure de renouvellement irrégulière et qu’Anticor ne remplissait pas les conditions exigées.
Cette disposition lui permet pourtant d’intervenir dans des procédures judiciaires, dont les dossiers politico-financiers, notamment en se constituant partie civile en cas d’inaction du parquet. Cette procédure permet la plupart du temps de relancer les investigations avec la désignation d’un juge d’instruction.
Anticor est impliquée dans plus de 160 procédures dont l’attribution du Mondial de football au Qatar, l’enquête pour prise illégale d’intérêts visant le secrétaire général de l’Élysée Alexis Kohler, proche d’Emmanuel Macron, ou celle de la cession de la branche énergie d’Alstom à General Electric.
Un an d’attente
En juin 2023, le tribunal administratif de Paris a annulé un arrêté signé en avril 2021 par le Premier ministre d’alors Jean Castex, qui renouvelait pour trois ans cet agrément. Puis la cour administrative d’appel a confirmé cette annulation en novembre 2023.
Anticor avait alors déposé, dès juin 2023, une nouvelle demande d’agrément.
Cette demande a alors été confiée à la ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, en raison d’un déport du ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti puis de l’ancienne Première ministre Elisabeth Borne, à cause de risque de conflits d’intérêts.
« Opportun d’attendre »
Mais à expiration du délai de six mois, en décembre 2023, la ministre n’avait pas répondu à la demande de renouvellement, ce qui équivalait à une « décision implicite de refus », selon une source au ministère des Affaires étrangères. L’association a contesté devant le Conseil d’Etat l’annulation de son agrément et devant le tribunal administratif l’absence de réponse du gouvernement. Deux procédures toujours en cours.
Sollicité, Matignon a rappelé vendredi que « quand le Premier ministre (Gabriel Attal, ndlr) a pris ses fonctions, un refus implicite était né » et il est « contesté devant le tribunal administratif ». « Compte tenu du calendrier de la procédure, il semble opportun d’attendre l’issue du contentieux en cours », selon Matignon.
2. ARTICLE – L’association anticorruption Anticor suspendue à la décision du tribunal
Ouest-France Wilhem LELANDAIS FOYER.Publié le 06/08/2024
Cela fait maintenant plus d’un an qu’Anticor tourne au ralenti. La célèbre association anticorruption s’est distinguée dans la cession de la branche énergie d’Alstom à General Electric, les contrats russes d’Alexandre Benalla ou encore la mise en examen du bras droit d’Emmanuel Macron Alexis Kohler. Mais depuis plus d’un an, elle doit aussi faire face au non-renouvellement de son agrément anticorruption.
En cause, des doutes sur la transparence de l’association vis-à-vis d’un don de 64 000 € effectué, en 2020, par Hervé Vinciguerra, un homme d’affaires proche de l’ex-ministre socialiste Arnaud Montebourg.
Privée de son précieux sésame, Anticor se retrouve désormais « dans la même situation que les autres citoyens », explique son président Paul Cassia. Impossible pour elle de demander l’audition de témoin, d’accéder au dossier de l’enquête ou de saisir un juge indépendant si un procureur décide de classer l’enquête sans suite. De quoi faire perdre tout intérêt à son existence. « Sur le long terme, ce serait impossible de continuer », confirme Paul Cassia, laissant entendre la possible fin de parcours pour l’association, créée en 2002.
Pas question pour le moment d’imaginer cette issue, et les regards sont tournés vers l’audience du tribunal administratif du mercredi 7 août 2024. L’association espère forcer l’exécutif à réexaminer sa demande d’agrément.
147 procédures en cours
Si Anticor venait à disparaître, cela serait « problématique », prévient Benjamin Guy, responsable de la communication de Transparency International France, une des deux autres associations disposant de cet agrément en France, avec Sherpa. L’association n’en est pas encore arrivée là, mais les problèmes provoqués par le non-renouvellement de son agrément ont déjà fait leur apparition.
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L’association anticorruption est actuellement engagée dans pas moins de 147 procédures judiciaires et « cette histoire d’agrément a fragilisé beaucoup d’entre elles, quasiment toutes celles qui ont été traitées par la justice depuis un an », rapporte Paul Cassia.
Et, « à part sur quelques dossiers emblématiques », impossible pour les deux autres associations agréées, qui cumulent une vingtaine de procédures en cours à elles deux, de reprendre le flambeau et d’assumer le rôle d’Anticor dans les tribunaux. « Nous, on ne s’occupe pas des contentieux, mais plutôt de proposer des cadres de loi pour encadrer les pratiques », signale Benjamin Guy, de Transparency.
Un manque de transparence
Le responsable de la communication de Transparency et Paul Cassia s’inquiètent également du message envoyé. « C’est un mauvais signal pour les citoyens, pour les autres associations et pour la lutte contre la corruption en général », regrette le premier.
D’autant plus que ce n’est pas un refus auquel est confronté Anticor depuis quelques mois, mais à une absence de réponse. Alors qu’une décision devait être prise avant le 26 juillet, le gouvernement est resté muet. « C’est de la désinvolture », souffle Paul Cassia. Même son de cloche du côté de Benjamin Guy, qui note également l’opacité de la procédure pour obtenir le précieux agrément anticorruption, réclamant qu’elle soit plus « claire, détaillée, avec du contradictoire et collégiale ».