
ÉMISSION – Jeux paralympiques : une autre idée de la performance et de la différence
Mercredi 28 août 2024 FRANCE CULTURE
Deux semaines après la fin des JO, les Paralympiques ont rallumé la flamme. Un évènement qui suscite déjà l’engouement médiatique. Mais avant de devenir une compétition populaire ; les Jeux paralympiques ont parcouru un long chemin pour changer la perception du handicap.
Avec
- Georges Vigarello Historien, philosophe, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales
- Nathalie Iannetta Directrice des Sports de Radio France
- Bertrand Quentin philosophe, à l’université de Gustave Eiffel à Marne la Vallée
Deux semaines après la conclusion des Jeux olympiques, les Jeux paralympiques ont repris le relais. L’événement attire déjà l’attention des médias. Cependant, avant d’atteindre une telle visibilité, les Jeux paralympiques ont dû surmonter des obstacles importants pour modifier la perception du handicap.
Le handicap : une réalité plurielle
Au cours de l’histoire, les mots pour désigner le handicap ont évolué. Ces mots s’inscrivent traditionnellement dans la désignation de ce qui relève du normal ou de l’anormal, explique Georges Vigarello. « Les mots se sont progressivement atténués pour parler de ce qui est de l’ordre de l’intolérable, pour prendre davantage en compte la souffrance. On a d’abord parlé de déficience, pour passer ensuite à la notion de handicap, qui est un mot plus respectueux. Reste que ces situations peuvent être aussi vécues comme quelque chose qui est de l’ordre du normal. C’est ça, le véritable enjeu,estime l’historien. Dans le cadre des Jeux paralympiques, certains athlètes considèrent que la façon dont ils sont désignés n’est pas idéale. Ils peuvent se vivre, eux, comme représentant quelque chose qui est parfaitement normal et qui mérite d’être prise en compte comme telle. C’est de l’ordre de la réalité personnelle. »
À écouter : Non, les Jeux paralympiques ne célèbrent pas les « sportifs en situation de handicap »
Regrouper tous les handicaps sous un même concept peut sembler étonnant
« On peut parler du handicap moteur, du handicap sensoriel, du handicap mental, psychique. Chacun de ces handicaps peut présenter des difficultés radicalement différentes » et donc pour Bertrand Quentin, « regrouper toutes ces réalités autour de ce concept de handicap peut sembler étonnant. Et d’ailleurs, dans l’histoire, ça ne tombait pas du tout sous le sens que de mettre sous la même catégorie l’estropié et le fou, qui n’avaient rien à voir. »
« Le terme « handicap » est très récent. Le mot a une histoire qui remonte au XVIe siècle, explique le philosophe. Il existait alors un jeu de hasard, le « hand in cap », on mettait sa main dans un chapeau à l’intérieur duquel des objets étaient cachés et il fallait en deviner le prix. Cela n’avait pas de rapport avec ce que nous appelons le handicap, mais il y avait quand même cette idée de hasard, de chance. Et ensuite, on est passé aux courses de chevaux, au XVIIe, XVIIIe siècle, où le handicap est devenu le fait de rajouter un poids aux meilleurs chevaux, de manière à garder du suspense dans la course. Paradoxalement, c’étaient les meilleurs chevaux qui portaient le handicap. Aux XVIIe, XVIIIe siècle se développe cette idée de compensation, qui conduit à l’entrée du mot handicap dans le dictionnaire de la langue française en 1917. Dès 1918, des soldats reviennent mutilés de la guerre. »
À écouter : Handicap : qu’attendre des jeux paralympiques ?
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