
LE CONSEIL D’ÉTAT ET L’ÉTAT DE DROIT, NOS CINQ ARTICLES
1. ARTICLE – Le Conseil d’État confirme le statut de réfugié d’un Algérien condamné pour agression sexuelle sur mineur, malgré les réserves de l’Ofpra
2. NOUVELLE ORGANISATION ET PROCÉDURE DEVANT LA COUR NATIONALE DU DROIT D’ASILE AVEC LE DÉCRET DU 8 JUILLET 2024.
3. ARTICLE – Immigration : le Conseil d’État limite le dispositif des «refus d’entrée»
4. ARTICLE – Contrôles aux frontières, l’arrêt du Conseil d’État qui change la donne
5. ARTICLE – Immigration : Ciotti alerte Darmanin sur la décision du Conseil d’État de limiter les «refus d’entrée»
LE CONSEIL D’ÉTAT « RÉÉCRIT » LA LOI RELATIVE AU DROIT D’ASILE POUR LES PERSONNES CONDAMNÉES …
… « soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française. »
L’Algérie n’est pas un pays en guerre.
Condamné en 2019 pour agression sexuelle sur un mineur, Medhi F., un Algérien, a obtenu en 2023 le statut de réfugié. Le Conseil d’État a confirmé cette décision, malgré l’opposition de l’Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides).
En juillet 2019, il avait été condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement, ainsi qu’à une peine complémentaire d’interdiction du territoire français (ITF) pour des faits d’agression sexuelle sur un mineur de 15 ans.
L’Ofpra refuse sa demande en invoquant l’article L. 511-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) :
« Le statut de réfugié est refusé ou il y est mis fin dans les situations suivantes : / (…) 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France (…) soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française. »
Medhi F. porte son dossier devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). En 2023, cette dernière casse la décision de l’Ofpra et lui accorde la qualité de réfugié, parce qu’elle estime que le texte exige la réunion de deux conditions cumulatives : une condamnation et une menace grave pour la société « à la date de la décision »…
L’Algérie n’est pas un pays en guerre. Comment cet individu peut-il rester avec le statut de réfugié alors qu’il a été condamné à 4 ans de prison après avoir agressé sexuellement un mineur ? VOIR ARTICLE 1
FAUDRAIT IL RÉFORMER LA CNDA ?
Nous vous proposons la lecture de l’article 2 qui commente le décret n° 2024-800 du 8 juillet 2024 pris pour l’application de l’article 70 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration et relatif à l’organisation et à la procédure applicable devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). VOIR ARTICLE 2
Le Conseil d’État avait déjà réécrit la réglementation relative aux «refus d’entrée»
« Le dispositif des «refus d’entrée», rétabli en 2015 pour lutter contre le terrorisme, ne permettra plus le refoulement aux frontières de la France des étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire de l’Union européenne.
Le Conseil d’État a limité vendredi le dispositif des «refus d’entrée» aux frontières intérieures, rappelant qu’ils devaient s’inscrire dans le cadre d’accords bilatéraux prévoyant que les pays voisins reprennent les étrangers ayant transité sur leur sol.
Concrètement, la plus haute juridiction administrative annule une phrase du code régissant le droit des étrangers (Ceseda) qui, en substance, permettait, dans un large cas de figure, le refoulement aux frontières intérieures de l’UE des étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire. » VOIR ARTICLE 3
Contrôles aux frontières,le Conseil d’État rectifie la réglementation relative aux expulsions et la rend pratiquement inapplicable
Le Conseil d’État avait annulé une disposition du code régissant le droit des étrangers. Celle-ci permettait, dans un large cas de figure, l’expulsion, aux frontières intérieures de l’Union européenne, des étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire.
«Ces décisions juridiques incompréhensibles risquent d’aboutir à la suppression de tout contrôle à la frontière franco-italienne, avait jugé l’actuel ministre de l’intérieur.
Je lance un cri d’alerte car on dépendra du bon vouloir des autorités italiennes». Pour lui, ce nouveau dispositif «va mettre des bâtons dans les roues» des forces de l’ordre.
Le président des Républicains en avait profité pour marteler sa volonté de réforme constitutionnelle qui serait approuvée par référendum
La seule option selon lui de redonner un pouvoir au législateur. «Nous sommes dans cette situation aujourd’hui alors que Monsieur Darmanin s’est glorifié sur les plateaux télé que le texte qu’il avait voté réglerait tout, a lancé Éric Ciotti avec un parfum d’élections européennes. On a la preuve qu’il n’a rien réglé, au contraire».
« Saisie par l’Association pour le droit des étrangers (ADDE), la plus haute juridiction administrative a annulé une disposition importante du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). L’article concerné, le L.332-3, permettait les « refus d’entrée », dans le cadre des contrôles aux frontières intérieures, avec reconduite des étrangers vers l’Italie et l’Espagne, qui ont conclu des accords de réadmission avec la France en 2015. » VOIR ARTICLE 4 ET 5
1. ARTICLE – Le Conseil d’État confirme le statut de réfugié d’un Algérien condamné pour agression sexuelle sur mineur, malgré les réserves de l’Ofpra
L’Ofpra refuse sa demande en invoquant l’article L. 511-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) : « Le statut de réfugié est refusé ou il y est mis fin dans les situations suivantes : / (…) 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France (…) soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française. »
Condamné en 2019 pour agression sexuelle sur un mineur, un Algérien a obtenu en 2023 le statut de réfugié après une décision favorable de la CNDA. Le Conseil d’État a confirmé cette décision, malgré l’opposition de l’Ofpra, soulignant l’évolution de son comportement.
Charlotte d’Ornellas 30/09/2024 JDD
Tout commence lorsque Medhi F., ressortissant algérien, demande l’asile à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Nous sommes alors en 2020. Un an plus tôt, en juillet 2019, il avait été condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement, ainsi qu’à une peine complémentaire d’interdiction du territoire français (ITF) pour des faits d’agression sexuelle sur un mineur de 15 ans.
L’Ofpra refuse sa demande en invoquant l’article L. 511-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) : « Le statut de réfugié est refusé ou il y est mis fin dans les situations suivantes : / (…) 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France (…) soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française. »
Cependant, Medhi F. ne s’arrête pas là et porte son dossier devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). En 2023, cette dernière casse la décision de l’Ofpra et lui accorde la qualité de réfugié. Pourquoi ? Parce qu’elle estime que le texte exige la réunion de deux conditions cumulatives : une condamnation et une menace grave pour la société « à la date de la décision ».
Pour la CNDA, si la condamnation est indiscutable, la menace, elle, ne l’est pas. En effet, Medhi F. s’était « volontairement engagé dès le début de sa détention dans de nombreux protocoles de soins et démarches d’insertion professionnelle ayant justifié la réduction de sa peine, qu’il avait obtenu en 2021 le relèvement judiciaire de la peine complémentaire d’interdiction du territoire prononcée à son encontre, qu’il avait exprimé des regrets et une volonté d’insertion sociale et professionnelle, et qu’il bénéficiait d’un suivi psychiatrique et d’un soutien associatif ». De plus, un médecin psychiatre avait estimé en 2022 qu’il n’y avait « pas d’élément appuyant l’hypothèse d’une récidive possible ».
2. NOUVELLE ORGANISATION ET PROCÉDURE DEVANT LA COUR NATIONALE DU DROIT D’ASILE AVEC LE DÉCRET DU 8 JUILLET 2024.
Par Patrick Lingibé, Avocat. LE VILLAGE DU DROIT
Cet article commente le décret n° 2024-800 du 8 juillet 2024 pris pour l’application de l’article 70 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration et relatif à l’organisation et à la procédure applicable devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).
Un décret n° 2024-800 du 8 juillet 2024 pris pour l’application de l’article 70 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration et relatif à l’organisation et à la procédure applicable devant la Cour nationale du droit d’asile a été publié au Journal Officiel du dimanche 14 juillet 2024.
Ce texte a été pris pour l’application de l’article 70 de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, lequel pour rappel dispose :
« Le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :1° La section 2 du chapitre unique du titre III du livre Iᵉʳ est ainsi rédigée :« Section 2 Organisation et fonctionnement :Art. L131-3.- Les formations de jugement de la Cour nationale du droit d’asile sont regroupées en chambres, elles-mêmes regroupées en sections. Le nombre de sections et de chambres est fixé par décret en Conseil d’Etat.La cour peut comprendre, en dehors de son siège, des chambres territoriales. Le siège et le ressort des chambres sont fixés par décret en Conseil d’Etat.Le président de la cour affecte les membres des formations de jugement dans les chambres.Il peut en outre spécialiser les chambres en fonction du pays d’origine et des langues utilisées.Art. L131-4.- Les membres de la Cour nationale du droit d’asile ne peuvent exercer leurs fonctions au-delà de l’âge de soixante-quinze ans.La durée du mandat des membres de la Cour nationale du droit d’asile est fixée par décret en Conseil d’Etat.Tous les membres des formations de jugement participent à plus de douze journées d’audience par an.Art. L131-5.- Chaque formation de jugement de la Cour nationale du droit d’asile est présidée par un magistrat permanent affecté dans la juridiction ou par un magistrat non permanent ayant au moins six mois d’expérience en formation collégiale à la cour, nommé :1° Soit par le vice-président du Conseil d’Etat parmi les membres du Conseil d’Etat ou du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, en activité ou honoraires, ou parmi les membres du Conseil d’Etat ou du corps des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel à la retraite disposant d’une compétence particulière en matière de droit d’asile ;2° Soit par le premier président de la Cour des comptes parmi les magistrats de la Cour des comptes et des chambres régionales des comptes, en activité ou honoraires, ou parmi les magistrats de la Cour des comptes ou des chambres régionales des comptes à la retraite disposant d’une compétence particulière en matière de droit d’asile ;3° Soit par le ministre de la justice parmi les magistrats du siège en activité et les magistrats honoraires de l’ordre judiciaire ou parmi les magistrats de l’ordre judiciaire à la retraite disposant d’une compétence particulière en matière de droit d’asile.Art. L131-6.- Lorsqu’elle siège en formation collégiale, la formation de jugement comprend, outre son président, les membres suivants :1° Un deuxième membre choisi parmi les personnes mentionnées aux 1° à 3° de l’article L131-5 ou une personnalité qualifiée de nationalité française nommée par le vice-président du Conseil d’Etat en raison de ses compétences dans le domaine juridique ou géopolitique ;2° Une personnalité qualifiée de nationalité française nommée par le vice-président du Conseil d’Etat, en raison de ses compétences dans le domaine juridique ou géopolitique, sur proposition du représentant en France du haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés.Art. L131-7.- A moins que, de sa propre initiative ou à la demande du requérant, le président de la Cour nationale du droit d’asile ou le président de formation de jugement désigné à cette fin décide, à tout moment de la procédure, d’inscrire l’affaire devant une formation collégiale ou de la lui renvoyer s’il estime qu’elle pose une question qui le justifie, les décisions de la Cour nationale du droit d’asile sont rendues par le président de la formation de jugement statuant seul.Art. L131-8.- Le rapport d’activité de la Cour nationale du droit d’asile est rendu public. Il comprend notamment des données quantitatives et qualitatives présentées par sexe et les actions de formation des agents et des membres des formations de jugement, en particulier sur les persécutions en raison du sexe.Art. L131-9.- Les modalités d’application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d’Etat. ;2° L’article L532-6 est ainsi modifié :a) A la première phrase, les mots : « en formation collégiale » sont supprimés ;b) A la deuxième phrase, les mots : « le président de la cour ou le président de formation de jugement qu’il désigne à cette fin » sont remplacés par les mots : « la cour » ;c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :Lorsqu’elle statue en formation collégiale dans les conditions prévues à l’article L131-7, la Cour nationale du droit d’asile statue dans le délai mentionné à la première phrase du premier alinéa du présent article » ;3° L’article L532-7 est abrogé ;
4° A la fin du premier alinéa de l’article L532-8, les mots : « L532-6 et L532-7 » sont remplacés par les mots : « L131-6 et L131-7 ».
Ce décret de 19 articles comporte ainsi des dispositions relatives à l’organisation de la Cour nationale du droit d’asile.
Son article 1 insère après l’article R131-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, deux nouveaux articles R131-5-1 et R135-5-2 dans ledit code.
Aux termes de l’article R131-5-1, la Cour nationale du droit d’asile comprend 23 chambres regroupées en 6 sections, dont 4 chambres territoriales et 18 chambres au siège de la Cour, à Montreuil.
L’article 2 du décret insère une section 1 bis intitulée « Chambres territoriales » après la section 1 du chapitre unique du titre III du livre Iᵉʳ du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et droit d’asile.
Aux termes du nouvel article R131-6-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile le siège et le ressort des 4 chambres territoriales de la Cour nationale du droit d’asile sont fixés comme suit :
1° Chambre territoriale de Bordeaux : Charente, Charente-Maritime, Corrèze, Creuse, Dordogne, Gironde, Landes, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques, Deux-Sèvres, Vienne, Haute-Vienne.
2° Première et seconde chambres territoriales de Lyon : Ain, Allier, Ardèche, Cantal, Côte-d’Or, Doubs, Drôme, Isère, Jura, Loire, Haute-Loire, Nièvre, Puy-de-Dôme, Rhône, Saône-et-Loire, Savoie, Haute-Savoie, Yonne.
3° Chambre territoriale de Nancy : Ardennes, Aube, Marne, Haute-Marne, Meurthe-et-Moselle, Meuse, Moselle, Bas-Rhin, Haut-Rhin, Haute-Saône, Vosges, Territoire de Belfort.
4° Chambre territoriale de Toulouse : Ariège, Aude, Aveyron, Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne, Hérault, Lozère, Pyrénées-Orientales, Gers, Lot, Tarn, Tarn-et-Garonne.
Ces quatre chambres territoriales seront opérationnelles à compter du dimanche 1ᵉʳ septembre 2024.
Il procède à l’extension de la compétence du juge unique et à la procédure devant la Cour nationale du droit d’asile concernant les communications avec les requérants et la production de notes en délibéré.
Ainsi l’article 4 du décret du 8 juillet 2024 modifie l’article R532-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile qui permet au président de formation de jugement de statuer seul, sauf si l’affaire est inscrite ou renvoyée devant une formation collégiale.
L’article 14 du décret du 8 juillet 2024 insère un septième alinéa à l’article R532-52 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, lequel précise que la décision ne mentionne que les notes en délibéré produites dans les deux jours francs suivant l’audience sauf lorsqu’il est fait application des dispositions de l’article R532-51 du même code (décision du président de la formation de jugement d’ordonner un supplément d’instruction).
L’article 17 du décret du 8 juillet 2024 prévoit qu’à titre dérogatoire, les articles R131-1 à R131-8 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile demeurent applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises dans la rédaction résultant du décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 portant partie réglementaire du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
- De même, il précise également qu’à titre dérogatoire, les articles R532-5, R532-7, R532-15, R532-17, R532-22, R532-23, R532-27, R532-32, R532-40, R532-41, R532-52, R532-53 et R532-72du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile demeurent applicables de plein droit à Saint-Barthélemy, Saint-Martin, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie dans leur rédaction résultant du décret n° 2020-1734 du 16 décembre 2020 portant partie réglementaire du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
S’agissant de l’entrée en vigueur des dispositions du décret du 8 juillet 2024, son article 18 prévoit que les dispositions de ses articles 1ᵉʳ et 2 sont applicables aux recours formés auprès de la Cour nationale du droit d’asile contre les décisions mentionnées à l’article L131-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (recours formés contre des décisions de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) notifiées à compter du 1ᵉʳ septembre 2024.
En revanche, les dispositions de l’article 14 (production d’une note en délibéré dans les deux jours) sont applicables aux audiences tenues à compter du lundi 15 juillet 2024.
3. ARTICLE – Immigration : le Conseil d’État limite le dispositif des «refus d’entrée»
Par Le Figaro avec AFP 03/02/2024
Le dispositif des «refus d’entrée», rétabli en 2015 pour lutter contre le terrorisme, ne permettra plus le refoulement aux frontières de la France des étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire de l’Union européenne.Le Conseil d’État a limité vendredi le dispositif des «refus d’entrée» aux frontières intérieures, rappelant qu’ils devaient s’inscrire dans le cadre d’accords bilatéraux prévoyant que les pays voisins reprennent les étrangers ayant transité sur leur sol. Concrètement, la plus haute juridiction administrative annule une phrase du code régissant le droit des étrangers (Ceseda) qui, en substance, permettait, dans un large cas de figure, le refoulement aux frontières intérieures de l’UE des étrangers entrés irrégulièrement sur le territoire.
Justification avancée: la disposition en question «ne limite pas» ces refus d’entrée «aux cas dans lesquels ils sont pris en vue de la réadmission» de l’intéressé vers l’État frontalier de transit.
Le refus d’entrée sur le territoire devra se faire dans une procédure d’admission
«C’est une victoire en ce sens où le refus d’entrée, qui était dans une zone grise, doit être soumis à la législation européenne et internationale», a affirmé Me Patrice Spinosi, avocat de l’ADDE (Association pour la défense des droits des étrangers) qui avait saisi le Conseil d’État. Assurant que le refus d’entrée devait désormais se faire dans le cadre d’une procédure de réadmission, il a promis: «nous serons très vigilants» sur l’application.
Le Conseil d’État précise qu’«il appartient au législateur de définir» les règles applicables à l’étranger «qui a fait l’objet d’un refus d’entrée dans la perspective de sa réadmission».
Un accord de réadmission permet de faciliter l’éloignement des étrangers en limitant les formalités, mais avec un cadre légal notamment sur la rétention, les recours et la possibilité de demander l’asile. La France a signé plusieurs accords, notamment en 1997 à Chambéry avec l’Italie, par où transitent de nombreux migrants.
Le refus d’entrée s’inscrit également dans une procédure balisée mais les défenseurs des étrangers dénoncent régulièrement des manquements au droit. Il peut intervenir aux frontières intérieures depuis que la France les a rétablies en 2015 pour lutter contre le terrorisme.
La France ne peut pas se soustraire à la règlementation européenne
La Défenseure des droits avait, dans des observations transmises au Conseil d’État, estimé que les procédures de réadmission vers l’Italie étaient «très rares». Elle avait alerté sur plusieurs points lors des procédures de refus d’entrée: recours variable à l’interprétariat, placement dans une zone de «mise à l’abri» exiguë et inconfortable, pas d’assistance juridique… «Cette décision nous satisfait, elle met fin au régime du refus d’entrée», a affirmé à l’AFP Patrick Henriot, secrétaire général du Gisti.
L’Anafé, autre association de défense des étrangers, a estimé sur X (ex-Twitter) que la décision «met un terme à huit ans de pratiques d’enfermement illégales» et «rappelle aussi l’obligation de respecter le droit d’asile». La Cour européenne de justice (CJUE) avait déjà estimé en septembre que la France ne pouvait pas, dans tous les cas de figure, refouler à la frontière les étrangers entrés irrégulièrement sur son territoire.
«En vue de l’éloignement de l’intéressé, les normes et procédures communes prévues par la directive “retour” doivent tout de même être respectées», avait précisé la CJUE, en allusion à la directive européenne prévoyant que le ressortissant non-européen puisse «bénéficier d’un certain délai pour quitter volontairement le territoire».
4. ARTICLE – Contrôles aux frontières, l’arrêt du Conseil d’État qui change la donne
Une décision rendue le 2 février alourdit considérablement les protocoles de prise en charge des étrangers entrés illégalement sur le territoire.
Par Erwan Seznec Publié le 20/02/2024 LE POINT
La loi immigration partiellement censurée par le Conseil constitutionnel le 25 janvier a suscité beaucoup de commentaires, sans guère de conséquences concrètes sur le terrain. En ce qui concerne la décision rendue sur un sujet proche une semaine plus tard par le Conseil d’État, c’est l’inverse. L’arrêt « ADDE » du 2 février est passé sous les radars, alors que ses répercussions vont très vite se faire sentir. Elles s’annoncent lourdes.
Saisie par l’Association pour le droit des étrangers (ADDE), la plus haute juridiction administrative a annulé une disposition importante du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). L’article concerné, le L.332-3, permettait les « refus d’entrée », dans le cadre des contrôles aux frontières intérieures, avec reconduite des étrangers vers l’Italie et l’Espagne, qui ont conclu des accords de réadmission avec la France en 2015.
La procédure, très rapide, déroge à la directive européenne « retour » de 2008. Lorsqu’un migrant majeur en bonne santé est interpellé dans la zone frontière, il n’est ni retenu, ni sanctionné, ni expulsé vers son pays d’origine, mais ramené sans délai et sans formalités hors de France. Les malades et les blessés sont pris en charge et les mineurs non accompagnés sont placés en centre d’accueil.
Retour au droit commun européen
L’arrêt du Conseil d’État met fin à cette pratique. Il pose que ces étrangers interpellés tout près de la frontière doivent se voir appliquer les dispositions de droit commun du Ceseda. « Si un étranger n’est pas en mesure de justifier, à l’occasion d’un contrôle, de son droit de circuler ou de séjourner en France, il peut être retenu aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français », dit la loi.
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Les personnes interpellées seront donc désormais conduites au poste, et éventuellement placées en centre de rétention administrative, ce qui implique de passer par un officier de police judiciaire (OPJ) et d’avoir le feu vert du procureur, puisque c’est une mesure privative de liberté. Les étrangers auront le droit s’ils le souhaitent de voir un médecin, de déposer une demande d’asile, d’exiger un interprète et de solliciter un avocat pris en charge par l’aide juridictionnelle. À cet égard, le recours de l’ADDE est une indéniable réussite corporatiste. Fondée en 1994, cette association regroupe 350 avocats.
Quelle est la proportion de migrants aux Emirats Arabes Unis en 2020 ?
Le Conseil d’État, en l’espèce, se contente de s’aligner sur une décision rendue en septembre par la Cour de justice de l’Union européenne, qui s’impose au juge national : un pays qui rétablit les contrôles aux frontières ne peut pas s’affranchir de toutes les procédures communes prévues par la directive « retour ».
Beaucoup plus de formalisme
Pour les nombreux migrants interpellés qui souhaitent seulement traverser la France, la portée de la décision est minime. La plupart d’entre eux, lorsqu’ils sont reconduits en Italie ou en Espagne, retentent leur chance dès que possible. Le passage de 24 heures à 48 heures en centre de rétention administrative leur fera simplement perdre un peu de temps. Il faut néanmoins s’attendre à une hausse des demandes d’asile, de la part de ceux qui veulent rester en France.
En ce qui concerne les forces de l’ordre, décrypte un gradé de la police nationale, « le travail va être décuplé. À moyens constants, on n’y arrivera pas. Le ministère le sait ». Au col du Montgenèvre, à la frontière avec l’Italie, dans les Hautes-Alpes, jusqu’à 80 étrangers peuvent être reconduits lors d’une seule journée d’été. Huit OPJ sont disponibles sur le secteur. L’arrêt du Conseil d’État les mobiliserait à temps plein sur des tâches répétitives : rédiger à la chaîne des « décisions motivées indiquant les raisons précises du refus », conformément à la directive européenne. Autre problème, celui des places en centre de rétention administrative (CRA). L’État en ouvre actuellement, dans le cadre d’un « plan CRA » visant à atteindre 3 000 places en 2027 contre un peu moins de 2 000 aujourd’hui. Il y en a dans les Pyrénées-Orientales et dans les Pyrénées-Atlantiques, mais pas dans les Hautes-Alpes ni dans les Alpes-de-Haute-Provence…
« La décision de la CJUE et du Conseil d’État nous oblige à repenser notre dispositif », convient le cabinet de Gérald Darmanin, qui précise que le ministre de l’Intérieur a donné des instructions aux préfets concernés pour maintenir « exactement le même niveau de contrôle » aux frontières. Le gouvernement avait anticipé les conséquences de cet arrêt du Conseil d’État, prolongement logique de celui de la CJUE. Les effectifs à la frontière italienne ont été doublés en 2023 et ils augmenteront encore en 2024. À plus long terme, la question d’une refonte du code Schengen est clairement posée, mais les discussions en cours au niveau européen prendront encore beaucoup de temps.
5. ARTICLE – Immigration : Ciotti alerte Darmanin sur la décision du Conseil d’État de limiter les «refus d’entrée»
Par Lucas Hélin 19/02/2024 LE FIGARO
Une décision du Conseil d’État, en date du 2 février, fait se réorganiser les effectifs de police aux frontières, dont ceux de Menton (Alpes-Maritimes), limitrophe de l’Italie. Les policiers ne peuvent plus refouler dans la quasi-immédiateté les étrangers en situation irrégulière sans un accord de réadmission des autorités italiennes.
Depuis 2015, afin de mieux lutter contre le terrorisme, un dispositif de «refus d’entrée» ou de «non-admission» s’appliquait au code régissant du droit des étrangers (Ceseda). Il permettait à la France d’éloigner les personnes tentant de rentrer sur son territoire de manière illégale dans un moindre délai, soit à peine quelques heures. Désormais, cela prendra au moins 24h et les individus interpellés devront temporairement être pris en charge dans les locaux de la PAF où leur situation sera examinée. L’avocat de l’Association pour la défense des droits des étrangers (l’ADDE), Me Patrice Spinosi, avait saisi le Conseil d’État en reprenant un avis en ce sens de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
Cette situation nouvelle à laquelle s’adaptent déjà les policiers a soulevé «l’immense inquiétude» du président des Républicains, Éric Ciotti, venu vendredi après-midi apostropher depuis le poste frontière de Saint-Louis, à Menton, le ministre l’Intérieur Gérald Darmanin. «Ces décisions juridiques incompréhensibles risquent d’aboutir à la suppression de tout contrôle à la frontière franco-italienne, a-t-il jugé. Je lance un cri d’alerte car on dépendra du bon vouloir des autorités italiennes». Pour lui, ce nouveau dispositif «va mettre des bâtons dans les roues» des forces de l’ordre.
Volumétrie
«Cela alourdit considérablement les procédures, on doit solliciter à chaque fois les Italiens», nous décrypte un fin connaisseur de ce dossier. Il ajoute que ce dispositif est «tenable» lorsque les policiers procèdent, comme en ce moment, à seulement 50 interpellations par jour en moyenne, mais que cela pourrait se compliquer lors des pics des tentatives de franchissement au printemps et en été, avec jusqu’à 300 arrestations par jour aux frontières entre mer et reliefs de Menton.
Ces nouvelles procédures seront donc à l’épreuve de la «volumétrie» des arrivées, qui sont pour les Alpes-Maritimes très dépendantes de celles en Italie. En 2023, 33.429 personnes ont été refoulées (pour 44.100 interpellations, soit une augmentation du 10,64%), avait indiqué la préfecture au Figaro.
«Beaucoup plus d’étrangers en situation irrégulière vont passer entre les mailles des filets, reste persuadé Éric Ciotti. Le travail procédural pour les policiers sera beaucoup plus long et cela nécessitera davantage d’effectifs», s’est-il encore inquiété aux côtés du président du département, Charles-Ange Ginésy. Pour le patron des LR, cela donne le sentiment que «les institutions accumulent les obstacles» en matière d’immigration.
23 demandes d’asile
Le préfet maralpin Hugues Moutouh a, au même moment, temporisé dans les colonnes du quotidien régional Nice-Matin en expliquant que ce nouveau régime «ne les prend pas au dépourvu». 130 personnes ont déjà fait l’objet d’une procédure de réadmission vers l’Italie, a-t-il indiqué. Le représentant de l’État rappelle que la «border force», avec 400 agents dont des militaires de l’opération Sentinelle, surveillent toujours activement la frontière franco-italienne. Les bonnes relations avec son homologue local côté italien permettraient de conserver une certaine fluidité dans les procédures, même si elles prennent plus de temps.
La fin des «non-admissions» décidée par le Conseil d’État le 2 février pourrait aussi faire augmenter les demandes d’asile côté français puisque sur un délai plus long après leur interpellation, les individus auront le droit d’en formuler alors qu’ils sont arrivés par les côtes italiennes. Depuis le 6 février, 23 demandes ont été enregistrées dans les Alpes-Maritimes, nous précise-t-on.
Le président des Républicains en a profité pour marteler sa volonté de réforme constitutionnelle qui serait approuvée par référendum. La seule option selon lui de redonner un pouvoir au législateur. «Nous sommes dans cette situation aujourd’hui alors que Monsieur Darmanin s’est glorifié sur les plateaux télé que le texte qu’il avait voté réglerait tout, a lancé Éric Ciotti avec un parfum d’élections européennes. On a la preuve qu’il n’a rien réglé, au contraire». Lundi, le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, viendra à son tour au poste frontière Saint-Louis de Menton.