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LE Cl CONSTITUTIONNEL A-T-IL BESOIN D’UN « SYMBOLE DE DÉLIQUESCENCE » SUPPLÉMENTAIRE ? – MISE À JOUR

MISE À JOUR :

3. ARTICLE – Conseil constitutionnel : « Il serait opportun que le président de l’institution soit choisi parmi des juristes aguerris »

Elina LemaireJuriste LE MONDE

La présence de nombreux « politiques » parmi les membres du Conseil soulève de délicats problèmes d’impartialité. Les nominations prévues en 2025 pourraient être l’occasion de réformer le processus de désignation, estime la juriste Elina Lemaire, dans une tribune au « Monde ».

A chaque vague de départs et de nominations, le constat est identique : la procédure de désignation des membres du Conseil constitutionnel conduit à politiser de façon excessive l’institution. S’ils sont effectivement nommés, les candidats aujourd’hui pressentis (Richard Ferrand, Renaissance, ancien président de l’Assemblée nationale, Laurence Vichnievsky, ancienne députée MoDem, et les Républicains Philippe Bas ou François-Noël Buffet, respectivement sénateur de la Manche et ministre délégué auprès du ministre de l’intérieur), quelles que soient par ailleurs leurs qualités, ici hors de propos, ne permettront pas de corriger la tendance.

Cette politisation pose de nombreuses difficultés. Elle sème d’abord le doute quant à la capacité des conseillers constitutionnels à s’approprier la culture de l’Etat de droit, dont le respect est au cœur de la justice en général, et de la justice constitutionnelle en particulier. Peuvent-ils, une fois nommés, se défaire de leur culture (très politique) de la raison d’Etat ? Cette dernière ne continue-t-elle pas de les guider lorsqu’ils se prononcent sur le respect de la Constitution par le législateur ?

Cette politisation pose ensuite la question cruciale de l’indépendance des membres de l’institution à l’égard des autorités de nomination (également politiques : le président de la République et les présidents des deux Assemblées parlementaires). Le doyen Georges Vedel (1910-2002) parlait d’un « devoir d’ingratitude » des membres du Conseil à l’égard de celui ou de celle qui les avait désignés. S’il est nommé, M. Ferrand, « fidèle d’entre les fidèles » de l’actuel chef de l’Etat, sera-t-il en mesure de l’assumer ?

Le soupçon du conflit d’intérêts

La présence de nombreux « politiques » parmi les membres du Conseil soulève également de délicats problèmes d’impartialité. Fréquents sont les cas où tel membre peut être conduit à se prononcer sur la conformité à la Constitution d’une loi adoptée par ses amis de la veille. Plus problématique encore, un membre pourrait être amené à examiner, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, la conformité à la Constitution de telle disposition législative qu’il a combattue ou, au contraire, qui a été adoptée de sa propre initiative ou, à tout le moins, avec son soutien (comme parlementaire ou comme membre du ..

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1. ARTICLE – Richard Ferrand au Conseil constitutionnel, le symbole d’une institution en déliquescence

HADRIEN MATHOUX Marianne

 
C’est devenu un secret de polichinelle : Richard Ferrand devrait être le candidat choisi par Emmanuel Macron pour présider le Conseil constitutionnel. Si les députés et sénateurs membres des commissions des lois des deux chambres ne rejettent pas son nom, ce très proche du chef de l’Etat prendra la tête de cette instance au rôle décisif… et controversé. On ne peut pas dire que le profil de M. Ferrand, ancien journaliste et dirigeant d’une agence de graphisme, dépourvu de compétences particulières en matière de droit, qui doit essentiellement sa nomination à sa fidélité à Emmanuel Macron, aide à dissiper les soupçons de partialité qui entourent le Conseil constitutionnel.

Méfiant à l’égard du « gouvernement des juges », et de la tendance des grands clercs à vouloir limiter la souveraineté du peuple, le général de Gaulle avait consenti à la création de cette cour suprême à la française, mais en limitant fortement son influence. Tout a changé le  16 juillet 1971, lorsque les « sages » du Conseil constitutionnel décidèrent d’étendre considérablement leurs pouvoirs, en s’octroyant dans une décision le droit d’interpréter le « bloc de constitutionnalité » pour faire et défaire les lois à leur guise. Bien sûr, les défenseurs sourcilleux d’un « Etat de droit » subrepticement redéfini en droit des juges de contrecarrer toute mesure qui déplairait au consensus des élites pousseront de hauts cris. Mais il y a bien longtemps que le Conseil constitutionnel ne joue plus ce rôle essentiel de garant des droits fondamentaux contre d’éventuelles velléités autoritaires du législateur.

D’éminents juristes, allant de la professeure à la Sorbonne Lauréline Fontaine à l’ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel Jean-Éric Schoettl, ont pointé les biais et les insuffisances des « sages ». Leur partialité, qui les amène à systématiquement prendre des décisions dans le sens du libéralisme, qu’il s’agisse d’immigration ou d’économie. Leur soumission au pouvoir en place, intimement liée à leur mode de désignation qui écarte les experts au profit des proches des gouvernants. La presse bruisse ces jours-ci d’analyses liant la possibilité pour Marine Le Pen de se présenter à la prochaine présidentielle aux humeurs de Laurent Fabius, actuel président du Conseil nommé par François Hollande, et à celles de son successeur pressenti pour être choisi par Emmanuel Macron, Richard Ferrand. Est-ce vraiment digne d’une démocratie moderne ?

2. ARTICLE – Richard Ferrand, le dernier grognard de Macron près de devenir Sage

Paris – C’est lundi qu’Emmanuel Macron devrait proposer le nom de Richard Ferrand pour la présidence du Conseil constitutionnel, en même temps que Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher désigneront deux autres de ses membres

Publié le 7 février 2025 L’OPINION

Vendredi 13 décembre 2024, 10h30, un nom s’affiche sur le téléphone de Richard Ferrand : François Bayrou. « Richard, il nous faut nous voir », souffle le patron du MoDem, à peine sorti du bureau d’Emmanuel Macron où il tente d’arracher sa nomination comme Premier ministre.

Pourquoi, en plein bras de fer, M. Bayrou passe-t-il une heure à écumer sa colère dans un appartement de la rive gauche de Paris ? Car il sait Richard Ferrand l’un des rares capables de décoder la psyché élyséenne, après dix années à côtoyer Emmanuel Macron. « Il a un positionnement unique auprès du président qui est de pouvoir vraiment tout lui dire, sans filtre, et le président l’écoute pour de vrai. Ce lien-là je ne l’ai jamais vu s’éteindre », témoigne l’ancien ministre Stanislas Guerini.

Commando originel. 

Un poids que M. Ferrand, 62 ans, s’emploie à minimiser auprès de ses interlocuteurs, faisant valoir qu’il y avait « des sujets sur lesquels » il pouvait « emporter la conviction » du président. « D’autres, ce sont des bouteilles à la mer », s’amuse-t-il. Sans mandat électif depuis 2022, désormais à la tête d’une société de conseil, M. Ferrand n’en conserve pas moins un pied en politique, au point d’être maintes fois cité pour Matignon.

Il est aperçu devisant avec François Hollande devant Notre-Dame le jour de la réouverture, à une table de restaurant avec les ex-ministres Eric Dupond-Moretti et Olivier Dussopt, tandis que fuitent des bribes de ses échanges avec Nicolas Sarkozy… Et cet adepte de la formule ciselée, amateur de bonne chère et de rugby, d’ironiser sur le taux de remplissage de sa messagerie à l’heure des remaniements, ou sur les floraisons de mots doux – et intéressés – qu’on lui susurre à l’adresse du président, y compris d’opposants notoires.

Du commando originel qui a contribué à amener M. Macron au pouvoir en 2017, beaucoup ont pris le large, usés, déçus voire balayés par les affres de la politique. Mais Richard Ferrand, qui végétait au mitan des années 2010 dans le marais des députés socialistes avant d’être propulsé sur le devant de la scène par l’aventure macroniste, est arrimé dans la garde rapprochée. Y compris après sa défaite aux législatives de 2022, après dix ans de mandat dans le Finistère où cet Aveyronnais d’origine avait jeté l’ancre.

Garant. 

Y compris aussi après avoir essuyé dès l’été 2017, tout juste nommé ministre de la Cohésion des territoires, une tempête judiciaire avec le dossier des Mutuelles de Bretagne. Mis en examen pour « prise illégale d’intérêts », il a vu le feuilleton se clore en octobre 2022, la Cour de cassation confirmant la prescription de faits que M. Ferrand estime de toutes façons « pas établis ».

Père de deux jeunes filles et d’un fils plus âgé issu d’un premier mariage, cet ancien journaliste et dirigeant d’une agence de graphisme s’est souvent dit meurtri par cette affaire. Cela l’a aussi amené à réserver sa réponse pour se porter candidat à la présidence du Conseil constitutionnel.

Pas tant une question d’envie : comment refuser de s’inscrire dans les pas de Laurent Fabius et Jean-Louis Debré, qui furent également ses prédécesseurs à la présidence de l’Assemblée ? Une manière aussi de se poser en garant des institutions en cas d’arrivée de forces populistes à l’Elysée en 2027.

Expérience. 

C’est lundi qu’Emmanuel Macron devrait proposer son nom pour la présidence du Conseil constitutionnel, en même temps que Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher désigneront deux autres de ses membres. Ses ennuis passés pourraient-ils amener députés et sénateurs à rejeter la candidature de M. Ferrand ? « Je pense qu’il prend une banane à la fin », prédit une ancienne ministre, notant que l’ombre portée d’Emmanuel Macron ne représentait guère un avantage.

L’adversité pourrait-elle même venir de son camp, où la page Macron commence à se tourner, avec la prise de contrôle du parti par Gabriel Attal ? Visant notamment M. Ferrand, l’entourage de l’ex-Premier ministre avait d’ailleurs moqué l’an dernier dans la presse l’influence des « boomers » qui voudraient faire de la Ve République un « Ehpad ».

A l’inverse, un cadre de la majorité fait valoir l’expérience au Perchoir (2018-2022) de M. Ferrand « qui a plutôt donné le sentiment de respecter chacun ». Avant de tempérer : « Comme on est dans un moment politique où tout le monde veut faire la peau de tout le monde, on ne sait pas ».

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