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250 MINEURS ÉTRANGERS CONDAMNÉS PAR L’ÉTAT À ERRER DANS LA RUE – (QUID DE LA PROMESSE PRÉSIDENTIELLE (206) DU « ZÉRO SDF » ?)

Une centaine de tentes forment plusieurs campements le long des quais de Seine. Les mineurs isolés, expulsés de la Gaîté Lyrique, ont trouvé refuge ici

ARTICLE – « Je n’ai plus d’espoir » : sur les quais de Seine, un campement de 250 mineurs isolés bientôt évacué

L’IMAGE : Une centaine de tentes forment plusieurs campements le long des quais de Seine. Les mineurs isolés, expulsés de la Gaîté Lyrique, ont trouvé refuge ici 

Écrit par Meryl Loisel 27/03/2025 France3 Régions

Après leur expulsion de la Gaîté Lyrique, les 450 mineurs isolés du Collectif des jeunes du parc de Belleville ont, pour la plupart, trouvé refuge dans des campements sur les quais de Seine, au cœur de la capitale. Mais le préfet de police de Paris a pris un arrêté ordonnant leur évacuation d’ici ce vendredi.

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Sous les ombres des ponts, il y a près d’une centaine de tentes colorées, disséminées entre le Quai de Bourbon sur l’île de la Cité, et la voie Georges Pompidou juste en face. Ces tentes sont celles de jeunes mineurs isolés expulsés de la Gaîté Lyrique. Après trois mois d’occupation de ce lieu culturel, les 450 jeunes migrants avaient été délogés il y a dix jours par les forces de l’ordre, sous de vives tensions.

Aujourd’hui, la majorité d’entre eux se retrouve à la rue, sans solution d’hébergement. « C’est très dur, on se sent mal, il y a des malades », raconte un adolescent de 15 ans, originaire de Côte d’Ivoire. « On se sent vraiment maltraités, rejetés ». A ses côtés, Ibrahim, venu de Guinée-Conakry, poursuit : « On a risqué notre vie pour venir ici, dans un pays de droits. Et on est contrôlés tout le temps, on est mal vus alors qu’on a tué personne, on a commis aucun crime. On doit dormir à la rue… Même les chiens ne dorment pas à la rue, même eux sont mieux traités que nous. Je n’ai plus d’espoir. »

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« Condamnés à vivre dehors »

La dizaine de jeunes exilés rencontrés sur place se disent tous inquiets, car la préfecture de police a pris un arrêté, pour ordonner l’évacuation de ce campement de fortune, d’ici vendredi 28 mars. Le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, y affirme que les campements sont« composés actuellement de plus de 250 personnes » et résultent « de l’évacuation du théâtre de la Gaîté Lyrique et du refus d’un nombre important de migrants de répondre favorablement à des solutions alternatives d’hébergement ».

La préfecture fait valoir que cette occupation « comporte des risques avérés pour la salubrité publique et la santé des occupants en raison de l’absence d’accès à l’eau » et « génère un trouble permanent à l’ordre public compte tenu des risques sanitaires et sécuritaires important qu’elle implique ».

Après leur expulsion de la Gaîté Lyrique, 250 jeunes mineurs isolés ont installé leurs tentes le long des quais de Seine, comme ici sur la voie Georges Pompidou

Après leur expulsion de la Gaîté Lyrique, 250 jeunes mineurs isolés ont installé leurs tentes le long des quais de Seine, comme ici sur la voie Georges Pompidou • © France 3 Paris Ile-de-France

« On ne fait que dormir ici, on nettoie tous les jours, on ne laisse pas nos déchets »,relate pourtant Ibrahim. « Ils ne nous ont pas proposé de vraies solutions d’hébergement en nous expulsant de la Gaîté Lyrique, il y avait un bus et il n’allait pas à Paris, on a été condamnés à vivre dehors », ajoute Abdourahamane, l’un des délégués du Collectif des Jeunes du parc de Belleville.

Le jeune homme de 16 ans, originaire de Guinée également, témoigne par téléphone entre deux heures de cours, car il est scolarisé dans un lycée du 10earrondissement de la capitale. Comme lui, ils sont une centaine à dormir dehors et aller en cours durant la journée. Il raconte une situation très difficile à vivre. « On ne sait pas si on va dormir, entre le froid et les risques de la nuit, on y pense sans cesse. Tout ça ne permet pas d’étudier sereinement. »

Inquiétudes pour l’évacuation

Utopia 56 qui leur vient régulièrement en aide exprime aussi des craintes. « Ça montre que la préfecture de police de Paris repart sur une politique d’interdiction des campements, en tout cas dans le centre de la capitale », selon Luc Viger, responsable du pôle mineurs non-accompagnés au sein de l’association. « Par ailleurs, ils expliquent que le campement pose des problèmes sanitaires et au niveau de la sécurité, mais plutôt que de proposer des solutions de mises à l’abri adaptées à l’ensemble des jeunes, ils préfèrent les expulser et les pousser à l’errance ».

Luc Viger précise aussi que ces jeunes sont laissés à la rue « en situation irrégulière, car ils sont en instance pour faire reconnaître leur minorité auprès de la justice. Mais au moins 50 % d’entre eux, à terme, seront reconnus mineurs d’après nos chiffres ». 

Les associations seront présentes sur les quais ce vendredi, au moment de l’évacuation. « On sera là en soutien, pour filmer et aider s’il y a des interventions violentes de la part de la police. Et si certains jeunes se font retirer ou détruire leur matériel, on fera notre maximum pour les rééquiper et qu’ils puissent se réinstaller autre part, pour au moins poser leurs tentes et se reposer un peu. ».

Audience au Conseil d’Etat

Le même jour, ce vendredi 28 mars, une audience en appel doit se tenir devant le Conseil d’Etat, contre l’arrêté d’expulsion de la Gaîté Lyrique. Dans un communiqué de presse, les mineurs isolés et leurs avocats demandent notamment « une évaluation individuelle de chaque situation » et « une orientation vers un hébergement adapté, stable et digne, avec accompagnement social ».

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Abdourahamane lui, souhaite simplement avoir bientôt un toit sur la tête – « même juste un gymnase » précise-t-il – et un peu d’apaisement. « Ils sèment la peur, mais nous, on est venus dans l’espoir.  Nous ne sommes épargnés de rien, on est chassés partout, la France traite mal les immigrés »,dénonce l’adolescent. « Pourtant, depuis deux ans que notre collectif existe, on demande le strict minimum : le logement, la santé, la scolarisation, c’est tout. »

Avec le Collectif des Jeunes du parc de Belleville, il déplore le racisme dont ils sont victimes, tout comme l’inaction des pouvoirs publics. « Toute cette répression, ça fait mal au cœur. On comptait beaucoup sur la mairie pour nous aider, mais depuis notre expulsion rien n’a été fait. Il y a eu beaucoup de mots, mais pas d’actes. On a vraiment besoin d’aide », conclut-il. 

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