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DANS UN AN, LES MUNICIPALES (1)
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1. ARTICLE – Elections municipales : trois questions sur la réforme du scrutin à Paris, Lyon et Marseille, qui divise la classe politique
Le texte examiné à l’Assemblée nationale prévoit d’instaurer, dès les élections municipales de 2026, deux scrutins distincts pour les trois métropoles. Une grande partie de la gauche et Les Républicains s’y opposent.
franceinfo avec AFP. 07/04/2025
C’est un texte attendu et très clivant qui arrive à l’Assemblée nationale. A moins d’un an des élections municipales de mars 2026, les députés examinent, à partir de lundi 7 avril, la réforme du scrutin municipal à Paris, Lyon, et Marseille. Mais la proposition de loi, qui veut réformer ce système instauré en 1982, divise l’hémicycle. Une grande partie de la gauche et Les Républicains sont opposés à ce texte, qui a été adopté en commission des lois par Renaissance, le MoDem, le Rassemblement national (RN) et La France insoumise (LFI). Franceinfo fait le point sur cette réforme.
1 Que contient la proposition de loi ?
En vertu de la loi Paris-Lyon-Marseille (PLM) du 31 décembre 1982, les élections municipales à Paris, Lyon et Marseille se déroulent par arrondissements ou par secteurs, et non à l’échelle de la ville. Les électeurs votent ainsi dans chaque arrondissement pour une liste de conseillers, et les élus du haut de la liste siègent à la fois au conseil d’arrondissement et au conseil municipal. Ce mode de scrutin est décrié par une partie de la classe politique : il peut ainsi aboutir à l’élection d’un maire qui a réuni une minorité de voix, comme ce fut le cas en 1983 à Marseille où le maire socialiste Gaston Deferre avait été réélu avec moins de voix que Jean-Claude Gaudin.
La réforme, écrite par le député de Paris Sylvain Maillard (Renaissance), vise à permettre aux électeurs de Paris, Lyon et Marseille d’élire leur maire sur un scrutin de liste au suffrage universel direct sur l’ensemble de la commune, comme c’est le cas ailleurs en France. La proposition de loi prévoit de réformer le mode de scrutin en instaurant, dès les prochaines élections municipales en mars 2026, deux scrutins distincts pour les trois métropoles (au lieu d’un actuellement) : un pour élire les conseillers municipaux, sur une circonscription unique, l’autre pour élire les conseillers d’arrondissement ou de secteur. Le texte propose par ailleurs d’abaisser à 25% la prime majoritaire pour la liste arrivée en tête – actuellement, la liste qui arrive en tête aux municipales bénéficie d’une prime de 50% et obtient d’office la moitié des sièges à pourvoir.
2 Pourquoi les députés sont-ils divisés ?
L’examen du texte en commission des lois a mis au jour les profonds désaccords entre les députés. Il a été largement adopté grâce au soutien de Renaissance, du MoDem, du RN et de LFI, ainsi que du député socialiste de Marseille Laurent Lhardit. Le reste de la gauche et les Républicains ont voté contre, tandis qu’Horizons s’est abstenu. Mais les débats ont été vifs, et les différents camps se sont accusés de privilégier leurs intérêts électoraux à moins d’un an des municipales 2026.
Pour le rapporteur du texte, Jean-Paul Matteï (MoDem), « les villes apparaissent coupées en deux » en raison du mode de scrutin. « La raison en est que les mairies centrales choisissent de privilégier significativement les arrondissements qui leur ont permis de gagner », juge Sylvain Maillard. Des arguments rejetés par le président du groupe LR à l’Assemblée nationale, Olivier Marleix, qui juge que le texte changerait les règles « à moins d’un an des élections », contrairement « à toute tradition républicaine ». Le député PS et candidat à la mairie de Paris, Emmanuel Grégoire, a lui dénoncé une « usine à gaz dérogatoire, avec des fragilités constitutionnelles évidentes ».
La maire de Paris, Anne Hidalgo, a de son côté écrit au Premier ministre François Bayrou et évoqué une « réforme [qui] serait une régression démocratique ». Elle redoute que la mise en œuvre de deux scrutins distincts efface le rôle des maires d’arrondissements et parle d’un « tripatouillage » électoral taillé sur mesure pour faire gagner la « macronie parisienne ». A Marseille, le maire socialiste Benoît Payan y est en revanche favorable. La droite parisienne, scindée en trois groupes d’opposition distincts, est partagée sur la réforme. Mais la ministre de la Culture Rachida Dati, maire du 7e arrondissement de Paris, et probable future candidate à l’Hôtel de Ville, y est favorable.
3 Le texte a-t-il des chances d’être adopté ?
Si la proposition de loi a des chances de passer à l’Assemblée nationale, son examen au Sénat, à partir du 3 juin, pourrait s’avérer plus compliqué. La droite y est majoritaire et les sénateurs LR ne veulent pas entendre parler de cette réforme. Le président du Sénat, Gérard Larcher, y voit un « problème de méthode »et a estimé sur RTL(Nouvelle fenêtre) que le texte arrivait « tard », à moins d’un an des municipales.
Si l’adoption au Sénat paraît compromise, c’est l’Assemblée nationale qui a le dernier mot pour une éventuelle adoption. Mais le Premier ministre François Bayrou a déjà annoncé qu’il « n’imagine pas qu’un texte puisse être adopté sur ce sujet sans qu’il y ait accord de l’Assemblée nationale et du Sénat ». Le chef du gouvernement est pourtant favorable à cette réforme, comme le président de la République, qui souhaite « qu’un électeur puisse avoir les mêmes droits et compter autant à Paris qu’à Amiens, à Besançon ou ailleurs ».
2. ARTICLE – Municipales 2026 : les jeux politiciens derrière la volonté de changer les règles du vote à Paris, Lyon et Marseille
07/04/2025 Huffpost. Par Marceau Taburet
Les macronistes veulent réformer le mode d’élection des maires des trois plus grandes villes de France. Anne Hidalgo dénonce un « incroyable bidouillage électoral ».
Cette fois, c’est la bonne. Dans les cartons depuis deux ans, la réforme du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille (aussi appelée loi « PLM ») est enfin examinée dans l’hémicycle de l’Assemblée à partir de ce lundi 7 avril. Elle a été maintes fois repoussée, à tel point que certains doutaient que ce serpent de mer arrive un jour jusqu’au Parlement.
Mais à moins d’un an des élections municipales, les députés parisiens Renaissance Sylvain Maillard et David Amiel s’attellent, à travers une proposition de loi, à un chantier qui ne met personne d’accord. Le texte entend mettre fin au régime spécial dont bénéficient les trois plus grandes villes françaises dans l’élection de leur conseil municipal.
Les habitants de ces trois municipalités, qui ont la particularité d’être organisées par arrondissements, élisent, depuis une loi de 1982, leurs élus des mairies d’arrondissement mais pas ceux qui siègent à l’Hôtel de Ville. Une « anomalie » que le texte, défendu par François Bayrou mais critiqué par de nombreuses forces politiques, entend corriger.
« Chaque voix devrait compter de la même manière, dans une circonscription unique qui soit celle de la ville », défend Sylvain Maillard, rejoint sur ses positions par Rachida Dati, très probable candidate dans la capitale, qui estime sur BFM qu’il s’agit « d’une réforme très attendue par les Parisiens ». Modifier la loi actuelle permettrait selon elle de « rendre la démocratie » aux habitants de la capitale en impliquant un principe : « Un Parisien, un bulletin de vote ». Le texte a été adopté en commission des lois le 2 avril.
« Les macronistes cherchent à améliorer leurs scores »
Une intention louable en apparence, qui dissimule mal quelques visées politiques. La maire PS de Paris Anne Hidalgo n’a pas de mots assez durs contre ce qu’elle considère être un « incroyable bidouillage électoral ». « Une loi pour changer le mode de scrutin à Paris, comme si c’était une urgence démocratique ? Mais où on est ? », s’est-elle insurgée sur France Inter le 18 mars. L’ex-candidate à l’élection présidentielle estime que François Bayrou mène cette réforme « pour des raisons de circonscription dans laquelle il pourrait faire élire une de ses proches. Les autres arguments ne tiennent pas », assure-t-elle.
« Les macronistes ont mis Lyon et Marseille dans la proposition parce que le contraire aurait été trop gros, mais ils ciblent bien la capitale, où ils ne font que perdre leurs élections et cherchent un moyen d’y améliorer leurs performances », veut croire la députée socialiste Céline Hervieu, interrogée par Mediapart. En 2020, les macronistes avaient enregistré une déconvenue à Paris avec leur candidate Agnès Buzy (13 %).
Y compris des élus LR parisiens font part de leur opposition au texte. Certains maires d’arrondissement et sénateurs de droite ont publié un communiqué pour exposer leur « inquiétude pour l’avenir de la gouvernance parisienne », dénonçant « une méthode précipitée et un risque de décisions expéditives ». « Il y a plus qu’une gêne du côté du président du Sénat et de la présidente de l’Assemblée nationale, croit savoir Anne Hidalgo. Est-ce qu’il n’y a pas d’autres urgences à résoudre avant d’aller abîmer quelque chose qui fonctionne bien ? »
« On peut difficilement être contre », estime Bompard
Les partisans, comme les détracteurs, d’une réforme de la loi « PLM » sont accusés d’établir leur position en fonction d’intérêts purement électoraux. Dit autrement, ceux qui veulent le statu quo sont soupçonnés de vouloir verrouiller un système qui les avantage, quand ceux qui entendent révolutionner le système sont vus comme des mauvais perdants, fâchés avec les règles actuelles. Lesquelles sont perçues comme la seule explication de leur incapacité à conquérir le pouvoir. C’est ce que dénoncent, par exemple, La France insoumise et le Rassemblement national, deux partis bien moins implantés que le PS et LR.
« Avant de regarder l’impact sur nos propres intérêts, regardons le fond du sujet. D’un point de vue démocratique, cela me semble assez normal de vouloir aller vers 1 citoyen égal à 1 voix, expose le coordinateur de La France insoumise Manuel Bompardauprès du HuffPost. On peut difficilement être contre. Après, savoir si ça sert nos intérêts me paraît être une question secondaire ». Il dit regretter que dans les trois plus grandes villes françaises, un candidat minoritaire en nombre de voix puisse être élu maire. Cela a notamment été le cas de Gaston Deferre à Marseille en 1983, de Gérard Collomb à Lyon et de Bertrand Delanoë à Paris en 2001.
Reste qu’une révision de la loi « PLM » ne modifierait pas le résultat de l’élection à tous les coups. Ainsi, en 2020, Anne Hidalgo aurait tout de même été élue maire de Paris, réforme ou pas réforme. Avec, sans doute, une majorité encore plus large que celle dont elle dispose aujourd’hui.