
MISE À JOUR 2
4. Conclave : pourquoi les chances d’avoir un pape français sont-elles minimes ?
Rome veut d’abord retrouver un pape italien, 47 ans après Jean-Paul 1er. Et puis, la France est jugée arrogante, avec seulement 4 à 6 % de pratiquants dans l’Hexagone.
Ouest-France Yves-Marie ROBIN. 06/05/2025 à
Possible, mais peu probable. Les chances d’avoir un pape français en cette fin de semaine, 655 ans après Grégoire XI, sont minimes. Même si le nom du cardinal marseillais Jean-Marc Aveline est souvent cité, sa victoire est loin d’être acquise. « Sur 266 souverains pontifes, la France n’en recense que seize », compte et recompte Bernard Lecomte, journaliste et écrivain.
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Mauvaise réputation
Selon lui, ce sont les Italiens qui bloquent et bloqueront encore ces prochaines heures. « Après le Polonais Jean-Paul II, l’Allemand Benoît XVI et l’Argentin François, Rome veut retrouver un pape italien. La France a assez mauvaise réputation au Vatican. Avec 4 à 6 % de pratiquants seulement, des décisions qui divisent (autorisation de la procréation médicalement assistée, IVG dans la Constitution, proposition de loi sur la fin de vie…), la fille aînée de l’Église est descendue de son piédestal. Son arrogance irrite. »
De Gaulle et Jean XXIII
Une arrogance d’ailleurs dénoncée il y a peu par les journaux conservateurs italiens, fustigeant le déjeuner pris par Emmanuel Macron avec quatre cardinaux français à Rome, en marge des funérailles du pape François.« Cette polémique repose sur du sable. Il est normal que le Président s’intéresse au futur pape. J’imagine mal l’Italienne Giorgia Meloni ne pas en faire de même », explique l’auteur du livre France-Vatican : deux siècles de guerre secrète (éd. Perrin).
Bernard Lecomte raconte d’ailleurs qu’en 1958, à la mort de Pie XII, Charles de Gaulle avait convoqué l’ambassadeur de France auprès du Saint-Siège. Ensemble, ils décidèrent de faire campagne pour le cardinal italien Roncalli, le futur Jean XXIII. « Je pense qu’Emmanuel Macron, proche de l’influente communauté de Sant’Egidio, milite pour le très progressiste Matteo Maria Zuppi », analyse le journaliste.
MISE À JOUR 1 –
LU DANS L’EXPRESS :
Venu dans la capitale italienne à l’occasion des funérailles du pape François, Emmanuel Macron ne s’est pas limité à des rencontres diplomatiques. Outre son entrevue avec Volodymyr Zelensky, le chef de l’Etat a aussi déjeuné avec quatre des cinq cardinaux français qui participeront au prochain conclave, qui débutera le 7 mai. Parmi les invités, l’archevêque de Marseille, Jean-Marc Aveline, est cité comme l’un des possibles prétendants au Saint-Siège. Un religieux honni par la presse de droite italienne, qui le décrit comme « progressiste et pro-migrants« .
Dans un long récit, Le Figaro soulignait après son déplacement qu’Emmanuel Macron « rêvait » de voir élu un pape français. Mais, à en croire plusieurs journaux italiens, son souhait serait en réalité accompagné de « manœuvres » du dirigeant français pour concrétiser cette volonté. Le quotidien libéral Libero a été parmi les plus incisifs à son encontre. « Le président français ambitionne d’entrer au moins par la fenêtre de la chapelle Sixtine », affirme le journal, assurant que « Macron a élaboré » un plan pour aider Jean-Marc Aveline à se placer lors du conclave.
Pour le conservateur Il Tempo, le locataire de l’Elysée se comporterait même avec « l’interventionnisme digne d’un Roi-Soleil moderne » dans l’optique de « favoriser l’élection d’un compatriote sur le trône de Saint-Pierre ». Le journal établit un drôle de parallèle entre les prétendues démarches du président français et une de ses précédentes initiatives dans le domaine… footballistique. Ce « geste inhabituel pour un chef de l’Etat […] rappelle l’appel téléphonique passé au champion de football Kylian Mbappé pour le convaincre de refuser l’offre du Real Madrid et de rester au Paris Saint-Germain », compare Il Tempo.
Au-delà du repas organisé avec les cardinaux français, l’autre grief reproché à Emmanuel Macron concerne sa proximité avec la communauté Sant’Egidio. Ce mouvement, créé dans les années soixante, fédère plusieurs dizaines de milliers de laïques dans le monde pour mener différents types d’opérations. Ses actions de lutte contre la pauvreté, mais aussi son discret rôle de médiation dans certains contextes diplomatiques, en ont fait une structure incontournable dans le monde catholique. Le pape François voyait d’un bon œil cette organisation, dont la ligne politique se rapprochait de la sienne. Or, la veille des funérailles du souverain pontife, Emmanuel Macron a dîné dans le centre de Rome avec le fondateur de Sant’Egidio, Andrea Riccardi.
De quoi nourrir un peu plus les suspicions des médias italiens. Selon le quotidien libéral Il Figlio, l’activité du président français lors de sa visite transalpine aurait en fait pour objectif de préparer un « gros complot » afin d’imposer ses vues au Vatican. Et, surtout, d’affaiblir la Première ministre italienne Giorgia Meloni, aux relations plutôt distantes avec l’exécutif français depuis son arrivée au pouvoir. Les positions traditionalistes de la dirigeante d’extrême-droite ne correspondaient pas non plus aux idées portées par le pape François lors de son passage au Saint-Siège.
La presse italienne de droite espère ne pas voir ce scénario se reproduire, par exemple avec l’élection de Jean-Marc Aveline ou celle de l’archevêque de Bologne, Matteo Zuppi, un des principaux soutiens de Sant’Egidio. D’après les rumeurs, toujours non vérifiées, ce dernier bénéficierait également d’un appui de la France pour le conclave. Dans son article, Libero estime qu’un pape apprécié à l’Elysée « apaiserait les tensions avec le Saint-Siège », en référence au refus de Françoisd’être présent lors de la messe de réouverture de Notre-Dame-de-Paris.
1. ARTICLE – ET IL MOULINAIT, IL MOULINAIT …
Emmanuel Macron en campagne pour un pape français : mais au fait, que pense réellement le reste du monde de l’activisme diplomatique du président ?
La rumeur monte : Emmanuel Macron chercherait à intervenir pour influencer le vote du conclave et le choix du prochain pape. Si cela peut sembler étonnant, que révèle cette accusation italienne de l’image de Macron de l’autre côté des Alpes ? En Europe aussi ? La grande activité du président de la République peut-elle nuire à l’image de la France ou porter sa parole plus loin ? Pour en parler Arthur Kenigsberg et Michel Duclos.
Michel Duclos est diplomate et conseiller spécial en géopolitique pour l’Institut Montaigne. I
Arthur Kenigsberg est Président fondateur d’Euro Créative, Think tank français spécialisé sur l’Europe centrale/orientale et les Balkans.
Atlantico : Emmanuel Macron est soupçonné par la presse italienne de faire jouer de son entregent pour « influencer le conclave » en faisant élire un pape à sa convenance. Pourquoi de telles rumeurs se font jour ? Que disent-elles de la perception de l’activisme diplomatique du président en Italie ?
Arthur Kenigsberg : Ces soupçons rappellent qu’il est très simple de créer des polémiques et des « complots » à partir de rencontres ou de photos. Leur instrumentalisation est très aisée à construire. Pour beaucoup de responsables politiques « populistes-conservateurs » ou de « populistes-nationalistes », Emmanuel Macron représente une figure du « progressisme » et des « élites mondialistes » avec lequel il peut être payant d’entretenir un match politique. Giorgia Meloni n’est pas la première à le faire en Europe, Viktor Orban en Hongrie ou le parti Droit et Justice en Pologne l’ont beaucoup fait ces dernières années. Dans l’élection présidentielle actuelle en Roumanie (premier tour ce dimanche), Emmanuel Macron fait partie des figures du débat public roumain sur lequel les populistes ne se privent pas de taper en caricaturant bien évidemment ses positions. Pour une partie de l’électorat européen, comme en France, il fait figure de repoussoir. Installer un match politique avec le président français peut-être payant. Durant des années, Emmanuel Macron a également joué ce match « progressistes » contre « conservateurs », comme lors de la campagne européenne de 2019.
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2. ARTICLE – A Rome, des rumeurs de complot ourdi par Emmanuel Macron pour influer sur le choix du futur pape
Une partie de la presse italienne soupçonne le président français de manœuvrer aux côtés du mouvement catholique Sant’Egidio, proche du défunt pape, pour pousser leurs candidats sur le trône de Saint-Pierre.
« Macron veut même choisir le pape », clamait ainsi la une de La Verità mardi 29 avril quand un autre journal du même bord politique, Libero, titrait « Macron s’incruste même dans le conclave ». Il Tempo, un quotidien romain conservateur, critiquait, pour sa part, « l’interventionnisme digne d’un Roi-Soleil moderne » du président français. En arrière-fond de ces manchettes accrocheuses se combinent la profonde méfiance de la droite italienne vis-à-vis des intentions de la France, les relations privilégiées de M. Macron avec le mouvement catholique Sant’Egidio, qui fut proche du défunt pape, et l’imbrication de cette communauté influente dans les tiraillements qui travaillent l’Eglise italienne, accentués par la période de transition en …
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3. ARTICLE – Election du prochain pape : les attaques et manœuvres se multiplient à moins d’une semaine du début du conclave
Les manœuvres d’influence s’intensifient avant le conclave, qui doit débuter mercredi 7 mai. En toile de fond : pressions, soupçons d’ingérence politique, et débats internes sur les scandales d’agressions qui menacent l’avenir de l’Église.
Radio France. 03/05/2025
L’organisation pratique du conclave, qui débutera le 7 mai, avance. La cheminée par où sortira la fumée blanche, si le successeur du pape François a été choisi, ou noire dans le cas contraire, a été installée dans la matinée du vendredi 2 mai sur le toit de la chapelle Sixtine. Tandis que les manœuvres pour influencer le conclave ont également commencé.
Le cardinal Parolin accusé de manque de transparence sur des agressions sexuelles
Le premier visé par les attaques est le cardinal Parolin. Il est l’un des cardinaux à ce stade les mieux placés. Un homme plutôt modéré, pas aussi réformateur que François, mais à qui les conservateurs reprochent l’accord avec la Chine pour la nomination en commun d’évêque entre Pékin et le Vatican. Le cardinal Parolin, qui était numéro 2 du Vatican pendant le pontificat de François, avait joué un rôle clé dans cet accord passé en 2018. Jeudi, un site conservateur américain a affirmé qu’il avait fait un malaise dû à une crise d’hypertension lors d’une des congrégations générales ces derniers jours. La salle de presse du Vatican a démenti vendredi matin.
Un autre tir est venu d’une ONG connue pour documenter scrupuleusement les cas d’abus sexuels au sein de l’Église. Vendredi matin, ses membres ont organisé une conférence de presse, dans une toute petite salle d’un hôtel romain, à un jet de pierre du Vatican, pour accuser le cardinal Parolin de s’être opposé à la transparence promise par François sur les agressions sexuelles. Il n’aurait pas répondu aux demandes d’information de commissions officielles sur les cas de dizaines de prêtres et religieux en Australie, au Chili, en Pologne ou au Royaume-Uni.
Anne Barrett Doyle, la codirectrice de cette ONG américaine, Bishop Accountaibility, assume cette action de lobbying à cinq jours du conclave. « Le cardinal Parolin comme secrétaire d’Etat a dissimulé des documents officiels venus de plusieurs pays dans le monde, affirme-t-elle. Il a fait disparaître des informations à propos de crimes sexuels commis sur des enfants contre des membres du clergé. C’est sans doute le plus grand détenteur de secrets dans tout le Vatican. »L’ONG pointe aussi le cardinal Tagle, l’un des favoris des progressistes, pour ne pas avoir suffisamment agi contre les abus dans son pays, les Philippines, et promet d’égrener d’autres noms dans les jours à venir.
D’autres scandales à venir ?
Lors de ces congrégations générales, la question des violences pédocriminelles a été mise au menu des discussions entre les cardinaux lors d’au moins deux réunions sur huit. Sans qu’on ne connaisse cependant les détails des discussions, mais cela signifie que le sujet est bel et bien identifié comme l’un de ceux qui engagent l’avenir de l’Église. Le rapport de la commission du Vatican sur ce sujet à la fin de l’année 2024 montrait que dans une série de pays, cette question est non seulement loin d’être réglée, mais à peine considérée comme importante. Il y a très probablement d’autres scandales à venir.
Pour ajouter au climat, un des cardinaux qui participent à ces réunions est lui-même accusé d’attouchements. Le Péruvien Mgr Cipriani a été l’objet de mesures disciplinaires, réitérées en janvier. Après la révélation des faits, François lui avait notamment interdit de porter les vêtements de cardinaux. Il s’est pourtant recueilli devant son cercueil en calotte rouge avant de participer aux congrégations générales.
La presse conservatrice italienne accuse Emmanuel Macron d’ingérence
La presse la plus à droite en Italie s’en prend à Emmanuel Macron, qu’elle déteste : « Macron veut aussi décider du Pape », titre la Verità. À l’origine, il s’agit d’un déjeuner du président de la République avec quatre des cinq cardinaux français à l’ambassade de France au Vatican, dans le nord de Rome. Un déjeuner médiatisé auquel a assisté un journaliste du Figaro
En off, un diplomate français qui travaillait régulièrement avec le pape François soupire : « Notre président ne connaît pas les usages au Vatican, les cardinaux détestent les ingérences politiques, c’est mauvais pour l’image de la France. » Un des participants à ce déjeuner essaye de minimiser : « Il n’a donné aucune consigne de vote. Il a posé des questions très générales et n’a pas cherché à savoir précisément ce qui se disait dans les congrégations générales. Mais il aurait pu éviter d’amener avec lui un journaliste du Figaro. » On peut lire aussi cette offensive de cette partie de la presse italienne comme une façon de torpiller la candidature de Mgr Aveline, plutôt proche des idées du pape François.
Les débats de ces congrégations générales sont censés être confidentiels, mais il émerge que le courant le plus réformiste, environ un quart de l’électorat, a presque trop de candidats et doit se mettre d’accord sur un. Les plus conservateurs représentent un tiers, et doivent trouver un homme que puisse approuver la majorité modérée. Les noms n’ont pas bougé depuis une semaine parmi les papabili envisagé : le Philippin Taglé, le Suédois Arborelius, l’Américain Prevost, le Français Aveline, les Italiens Zuppi et Pizzaballa.