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MISE À JOUR – LE CRASH D’UN SERVICE PUBLIC QUE L’ÉTAT NE PEUT CACHER PLUS LONGTEMPS : INCAPACITÉ TOTALE À GÉRER LES PRIMES RENOV – « FARCE » ET « RECUL »

LA FAILLITE D’UN SYSTÈME OÙ L’ADMINISTRATION N’ASSURE PAS À MINIMA SES MISSIONS ET DEVOIRS

La Prime Rénov a été suspendue sous le prétexte des fraudes. En fait , outre les problèmes de planification budgétaire, les services de l’Etat et l’Anah sont dans l’incapacité technique à gérer ( instruire, arbitrer, verser et contrôler) .

Le dispositif centré sur un logiciel qui fait « travailler «  les bénéficiaires et les artisans et entrepreneurs n’est pas maîtrisé par les fonctionnaires ou collaborateurs en charge : manque d’implication, de supervision, de conseil, d’appui… de contrôle… c.a.d. tout ce qui définit la mise en œuvre d’un service public de soutien financier à la rénovation.

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1. ARTICLE – MaPrimeRénov’ : anatomie d’un pillage de l’Etat

2. ARTICLE – La farce de MaPrimeRénov’ ou le triomphe du recul en politique

MISE À JOUR

3. ARTICLE -,Bientôt une proposition de loi pour décentraliser MaPrimeRénov’

Sébastien Martin, président (LR) de l’association d’élus Intercommunalités de France, élu député de Saône-et-Loire le 25 mai dernier, prépare un texte pour confier la gestion de MaPrimeRénov’ aux intercommunalités ou aux départements.

César Armand. Publié le 19/06/25 LA TRIBUNE

Le député (LR) de Saône-et-Loire Sébastien Martin prépare un texte d’ici à l’été en ce sens.

Les vicissitudes de MaPrimeRénov’ inspirent les parlementaires. Élu député de la 5e circonscription de Saône-et-Loire le 25 mai dernier, Sébastien Martin planche déjà sur une proposition de loi pour décentraliser la principale aide à la rénovation énergétique. À savoir en confier la gestion aux départements ou aux intercommunalités.

Une demande historique des intercommunalités

Et pour cause, c’est une demande historique de l’association d’élus Intercommunalités de France, qui représente les communautés de communes et les agglomérations, et qu’il préside encore. « Cela fait des mois qu’on indique qu’une gestion nationale allait aboutir à une fraude. Il est temps qu’on nous laisse changer les fenêtres et que l’État rénove ses prisons », a lancé, mercredi midi, Sébastien Martin à quelques journalistes.

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1. ARTICLE – MaPrimeRénov’ : anatomie d’un pillage de l’Etat

La fraude à la rénovation énergétique des logements touche de plus en plus les travaux de grande ampleur. Au point d’obliger l’Etat à interrompre temporairement le versement de MaPrimeRénov’ pour les gros chantiers. Les pouvoirs publics font face à de véritables organisations criminelles.

Par Elsa Dicharry, Isabelle Couet. Publié le 17 juin 2025 LES ÉCHOS

Nous vous offrons la lecture de cet article, normalement réservé à nos abonnés, pour vous faire découvrir le travail de la rédaction.

L’annonce, le 4 juin, par le gouvernement, de la suspension de MaPrimeRénov’, a fait l’effet d’une bombe, tant pour les professionnels de la rénovation énergétique des logements que pour les ménages ayant prévu des travaux chez eux. L’une des principales justifications à l’arrêt, cet été, de l’aide publique (finalement limité aux chantiers d’ampleur) ? La fraude.

Depuis la création de MaPrimeRénov’ en janvier 2020, dans le but d’accélérer la rénovation énergétique du parc de logements en France, les escrocs en tout genre n’ont pas manqué d’idées pour tenter de détourner l’argent public. Le phénomène est difficile à évaluer, mais il est massif. Le ministère du Logement donne cette indication : le montant de la fraude évitée en 2024 s’est élevé à 229 millions d’euros pour 3,29 milliards d’euros d’aides versées.

Selon nos informations, l’Office national antifraude (ONAF) est saisi de 14 dossiers d’ampleur, représentant un préjudice total pour l’Etat de pas moins de 50 millions d’euros. Ce service de pointe, qui a conduit l’enquête sur la tentaculaire arnaque à la TVA carbone,s’attend à une nette augmentation du nombre d’affaires.

Les rénovations d’ampleur ciblées

Il y a encore quelques mois, la fraude portait plutôt sur les rénovations dites « monogeste », se limitant à une simple isolation sous toiture, par exemple. Elle a pris de nouveaux visages, en même temps que montaient en puissance les rénovations dites d’ampleur, qui consistent à réaliser un bouquet de travaux permettant d’améliorer de façon très importante la performance énergétique de son logement.

Au total, 38.000 dossiers de ce type ont été validés depuis le début de l’année, soit plus qu’un triplement par rapport à l’an dernier, a relevé la ministre du Logement, Valérie Létard. Si ces rénovations globales attisent les convoitises des fraudeurs, c’est qu’elles portent sur des sommes élevées. La prise en charge, pour un ménage très modeste, est de 80 %, plus 10 % supplémentaires si le logement sort du statut de passoire thermique, c’est-à-dire qu’il n’est plus étiqueté énergétiquement F ou G, dans la limite d’un plafond de dépenses éligibles de 70.000 euros hors taxe.

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« Depuis le début de cette année, il y a de nouveaux schémas de fraudes, plus sophistiqués qu’avant, avec des intermédiaires véreux – Accompagnateurs Rénov’et mandataires financiers – qui se placent entre le ménage et l’Anah », détaille le cabinet de la ministre. Des suspicions portent actuellement sur 16.000 dossiers et 106 Accompagnateurs Rénov’sur un total de 1.336 structures.

Recourir à un Accompagnateur Rénov’agréé par l’Anah, l’Agence nationale de l’habitat, est devenu obligatoire depuis 2024 pour tous les particuliers qui souhaitent se lancer dans une rénovation d’ampleur. « L’Accompagnateur Rénov’vient visiter le logement, indique les points de mauvaise performance du logement et lui attribue une lettre d’étiquette énergétique. Il propose aussi des scénarios de travaux », explique Audrey Zermati, directrice de la stratégie du groupe Effy, dont la filiale Assistant Rénov’réalise cet accompagnement.

Faux diagnostics énergétiques et devis gonflés

Charge à lui également d’aider le ménage à monter son dossier de demande d’aide auprès de l’Anah, et de lui soumettre une liste d’entreprises de travaux. Mais « l’Accompagnateur Rénov’n’a pas le droit de conseiller le ménage sur son choix, ni d’avoir un accord partenarial avec une entreprise de travaux », insiste Audrey Zermati.

Voilà pour la théorie. En réalité, certains sont de mèche avec les entrepreneurs. L’Accompagnateur Rénov’attribue au logement une étiquette F ou G qui ne correspond pas à son état réel. L’entreprise de travaux, elle, gonfle son devis et s’arrange pour être mandataire financier du ménage et percevoir l’aide à sa place. Au final, la subvention perçue est décorrélée du montant réel des travaux nécessaires et réalisés.

Jusqu’à présent, les mécanismes utilisés par les fraudeurs étaient assez basiques. Par exemple, des demandes pour de faux clients. Les escrocs usurpent l’identité des ménages, notamment via des simulateurs d’impôts en ligne qui incitent les visiteurs à fournir leurs données fiscales. Les cas de travaux inexistants ou de mandataires financiers sans activité réelle sont aussi monnaie courante, tout comme les cas de travaux dont la facture a été gonflée.

Une demande au nom de Keanu Reeves

Des bizarreries sont de nature à alerter les services instructeurs : un numéro de téléphone associé à plusieurs demandes, un indicatif téléphonique qui ne correspond pas à la localisation du bien ou des identités « farfelues », comme cette demande qui avait été réalisée au nom de Keanu Reeves – l’acteur canadien ! Pourtant, sur la masse de dossiers, tous examinés au moment de la demande et du versement de l’aide, des anomalies grossières leur échappent.

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Il faut dire que les moyens de contrôle de l’Anah sont limités. Un rapport alarmiste de l’Inspection générale des finances (IGF) de septembre 2024 – révélé par « Le Point » – pointait le faible nombre d’inspecteurs de l’agence : huit ! En réalité, tempère le gouvernement, l’Anah n’est pas seule face à cette tâche immense. « Le tuyau financier tout en haut, c’est l’Anah, mais il y a des dossiers instruits par l’Etat ou des collectivités qui ont pris une délégation », explique-t-on dans l’entourage de la ministre.

Et l’Anah sous-traite à des acteurs privés : Docaposte pour la partie administrative et Bureau Veritas pour une part des contrôles sur place, visant à vérifier la réalisation des travaux. Ces derniers indiquent réaliser environ 50.000 visites et comptent monter à 80.000 en 2028. Actuellement, « le taux de contrôle sur site global se situe entre 10 % et 15 %. On aimerait le porter à 20 % », poursuit-on au ministère.

Nous sommes face à des gens qui appartiennent à des réseaux basés à Dubaï, au Maroc, en Israël et pratiquent toutes les fraudesChristophe Perruaux, directeur de l’Office national antifraude (Onaf) 

Pour enrayer la fraude, les pouvoirs publics se sont dotés de nouvelles armes. Depuis l’adoption de la loi de finances pour 2025, l’Anah peut accéder au fichier Ficoba des comptes en banque, afin de croiser l’identité des demandeurs de subventions et leurs coordonnées bancaires.

Une loi du député et ancien ministre du Budget Thomas Cazenave contre les fraudes aux aides publiques, adoptée mais pas encore promulguée, doit par ailleurs donner à l’Anah une base légale pour ne pas verser l’argent quand elle soupçonne une malversation. Cette disposition, qui semble tomber sous le sens, est d’autant plus essentielle que les fraudeurs disparaissent une fois les subventions perçues.

Une nouvelle loi

« Il faut être beaucoup plus scrupuleux avant le versement des aides, insiste Thomas Cazenave. Il y a souvent derrière tout ça des réseaux criminels qui naviguent d’une aide publique à l’autre, en passant par des entreprises éphémères. » Christophe Perruaux, le directeur de l’ONAF, confirme : « Nous sommes face à des gens qui appartiennent à des réseaux basés à Dubaï, au Maroc, en Israël et pratiquent toutes les fraudes ; ce sont des businessmen qui connaissent les failles du système. » Le magistrat a repéré des protagonistes qu’il avait croisés dans la fraude à la TVA carbone ou des trafiquants de drogue qui diversifient leurs activités.

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La loi Cazenave va aussi permettre de corriger une aberration : il était extrêmement fastidieux d’enlever son agrément à un Accompagnateur Rénov’sorti du droit chemin. « Le texte nous donne les outils juridiques pour lui retirer plus facilement », se félicite Martin Lagane, porte-parole de l’Anah. Les mandataires financiers seront également plus aisément entravés.

Signalements de Tracfin

La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) pourra par ailleurs, « en cas d’anomalies graves constatées », retirer à une entreprise son label RGE (« reconnu garant de l’environnement »). « C’est énorme, car aujourd’hui, le RGE, c’est un sésame », commente la dirigeante d’Effy, alors que les entreprises RGE sont les seules habilitées à réaliser les travaux subventionnés.

Enfin, le service de renseignements financiers Tracfin pourra saisir l’Anah en cas de soupçon de fraude organisée, ce qui n’était pas le cas jusqu’à présent. « Si une entreprise de rénovation énergétique transfère de l’argent vers Dubaï, Israël ou les îles Caïman, on peut se dire que ça vaut le coup d’alerter l’Anah », commente-t-on au cabinet de Valérie Létard.

Une révolution ? « C’est une avancée très utile, même si je préconisais d’aller plus loin en mettant dans un fichier partagé toutes les informations recueillies par les organisations étatiques et déléguées, qu’il s’agisse d’un mail, d’un compte bancaire frauduleux, etc., expose le directeur de l’Office national antifraude. Cela permettrait à l’Etat de faire des économies monstrueuses. »

Croisement des données et IA

Maillon important de la chaîne de contrôle des entreprises, les greffiers qui gèrent le registre du commerce et des sociétés (RCS) ont aussi leur idée. « Croiser les données de l’Urssaf, du fisc et du RCS est indispensable pour lutter contre le fléau des sociétés éphémères », martèle Victor Geneste, président du Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, alors que le nombre de sociétés radiées d’office a justement explosé en début d’année.

Le sujet des données suppose toutefois de trouver une solution compatible avec le RGPD, le règlement général de protection des données. Enfin, comme pour la chasse à la fraude fiscale, les espoirs se tournent vers l’IA, qui permettra de détecter beaucoup plus facilement les incohérences dans les demandes de subventions.

« La suspension prévue cet été va en tout cas nous permettre d’assainir le secteur », assure Martin Lagane, de l’Anah. Pour rendre les rénovations d’ampleur moins alléchantes pour les fraudeurs et éviter un afflux de dossiers, l’exécutif prévoit par ailleurs de revoir les conditions de l’aide.

Elsa Dicharry et Isabelle Couet

2. ARTICLE – La farce de MaPrimeRénov’ ou le triomphe du recul en politique

Objet de fraudes à répétition, suspendu puis partiellement rétabli, ce dispositif coûteux illustre la préférence française pour l’immobilisme.

Par Sophie Coignard. Publié le 17/06/2025 LE POINT

Dur, dur d’être ministre de l’Économie et des Finances par les temps qui courent ! Éric Lombard en a fait la douloureuse expérience depuis le début de ce mois, avec le feuilleton de MaPrimeRénov’. Cet épisode tragi-comique illustre à merveille le fonctionnement politico-administratif hexagonal, à mi-chemin entre Georges Courteline et Alfred Jarry.

Premier tableau : le ministre confirme, le mercredi 4 juin, la suspension du dispositif MaPrimeRénov’, qui subventionne les travaux de rénovation énergétique. Au Sénat, lors des questions au gouvernement, il justifie cette décision par « un encombrement…

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