
MISE À JOUR :
« Censure de la loi Attal sur la délinquance des mineurs : le Conseil constitutionnel ou l’impuissance organisée »
TITTE MARIANNE (Par Hadrien Mathoux 20/06/2025 ) QUI POURSUIT :
Le Conseil constitutionnel a censuré jeudi plusieurs articles clés de la proposition de loi de Gabriel Attal visant à durcir la justice des mineurs. Conséquence : il faudra désormais attendre des mois avant de pouvoir agir contre la délinquance des mineurs, un problème dont l’actualité nous rappelle pourtant quotidiennement l’urgence.
La proposition de loi pour rendre plus sévère la justice des mineurs, déposée par Gabriel Attal, a été presque entièrement vidée de sa substance par le Conseil constitutionnel. Le texte prévoyait que l’atténuation des peines pour les moins de 16 ans doive désormais être justifiée par le juge, ainsi que la création d’une procédure de comparution immédiate pour les jeunes récidivistes. Deux mesures clefs jugées anticonstitutionnelles par les « Sages » de la rue de Montpensier. Est-il permis de douter du fait que les rédacteurs de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ou du Préambule de 1946 avaient en tête des dispositions aussi précises, lorsqu’ils écrivirent les textes fondamentaux qui composent aujourd’hui notre bloc de constitutionnalité ?
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ARTICLE – La loi Attal visant à durcir la justice des mineurs largement censurée
Par Jean-Marc Leclerc 20 06 25 Le figaro
Pour le Conseil constitutionnel, le texte bousculait par trop l’équilibre d’un droit bien spécifique qui fait de l’éducation la règle et de la sanction l’exception pour ce jeune public.
Une semaine après avoir validé largement le texte du gouvernement sur la lutte contre le narcotrafic, le Conseil constitutionnel a choisi de ne pas ménager, ce 19 juin, la proposition de loi de Gabriel Attal (Renaissance) visant à durcir la justice des mineurs. Un texte qui bousculait manifestement beaucoup trop les équilibres subtils d’un droit bien spécifique qui, depuis 80 ans, fait de l’éducation la règle et de la sanction l’exception pour ce jeune public.
La philosophie générale de l’ordonnance de 1945 était donc, aux yeux du juge suprême, fondamentalement remise en cause par l’essentiel de ces dispositions, comme le prétendaient les élus de gauche qui ont porté le fer contre cette réforme. Le Conseil constitutionnel déclare ainsi contraires à la Constitution les articles 4 ; 5 ; 7, 12, 15, ainsi que partiellement l’article 6. Bref, toutes les dispositions qui tiraient dans le même sens et qui rapprochaient dangereusement la situation des mineurs de celle des majeurs au regard du droit pénal. «Tout ce paquet avait vocation à tomber en même temps», explique une magistrate.
Une réforme dictée par les émeutes de l’été 2023
Des dizaines de députés et sénateurs LFI, socialistes et communistes notamment avaient saisi les sages, estimant que le Parlement méconnaissait « l’intérêt supérieur de l’enfant » et les principes de la justice pénale des mineurs.
Le texte de l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, adopté définitivement il y a un mois, s’articulait autour de trois exigences visant à tirer les leçons des émeutes de l’été 2023 qui avaient impliqué, on s’en souvient, de nombreux jeunes : «restaurer l’autorité» de la justice, «responsabiliser» les parents et «juger plus vite» les mineurs délinquants récidivistes.
Les élus LFI et leurs collègues du groupe GDR avaient aussitôt dénoncé le manque de «clarté» et d’«intelligibilité» de la mesure prévoyant des sanctions pénales à l’encontre des parents défaillants dont la soustraction à leurs obligations aurait directement conduit à la commission d’un crime ou d’un délit par l’enfant dont ils ont la charge. Cet article premier de la loi n’est pas censuré cependant. Il est bien passé entre les mailles du filet constitutionnel.
Les craintes des élus de la gauche parlementaire
Ils avaient aussi mis en cause la création d’une procédure de comparution immédiate pour les jeunes récidivistes à partir de 16 ans (sous réserve de leur accord), couplée à une procédure d’audience unique, dès lors qu’ils encourent une peine supérieure ou égale à trois ans de prison et sont déjà connus de la justice.
En liant l’audience unique et la comparution immédiate, les élus de gauche qui sont montés au créneau craignaient que ce système ait pour conséquence de favoriser la détention des mineurs. Alors que l’éducation prime. Les juges de la rue Montpensier les ont confortés sur ce point.
Ils condamnaient également les entorses à « l’excuse de minorité », selon laquelle un mineur est sanctionné moins sévèrement qu’un majeur. En supprimant l’atténuation de responsabilité pour les mineurs de seize ans récidivistes, les élus auteurs de la saisine redoutaient que « le législateur ne priorise la répression sur le relèvement éducatif sans aucune prise en compte de la situation spécifique du mineur ».