
1. ARTICLE – «Président sans peuple», «Macron têtu» : la presse étrangère stupéfaite par le retour de Sébastien Lecornu à Matignon
Par Ségolène Forgar LE FIGARO
De Washington à Madrid, les médias étrangers décrivent une France en crise profonde après la reconduction surprise de Sébastien Lecornu au poste de premier ministre, quatre jours seulement après sa démission.
«Une décision choc.» Le titre de CNN résume à lui seul la stupeur de la presse internationale face au nouveau rebondissement politique français. Vendredi 10 octobre, Emmanuel Macron a reconduit Sébastien Lecornu à Matignon, quatre jours après avoir accepté sa démission. Une nomination qui intervient après l’effondrement de son premier gouvernement en seulement 14 heures et qui plonge bon nombre d’observateurs étrangers dans la perplexité.
De l’autre côté de l’Atlantique, le New York Times parle d’un «coup de fouet»destiné à calmer une «bouillante crise politique». «La France est en proie à des mois de blocage partisan à la chambre basse du Parlement, laissant le pays sans gouvernance stable et mettant en péril la capacité du pays à adopter un budget d’ici la fin de l’année alors même qu’il est confronté à une crise financière imminente», écrit le quotidien américain. Lequel souligne le paradoxe politique de cette nomination : «Juridiquement, rien n’empêchait M. Macron de reconduire…
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2. ARTICLE – Lecornu de retour à Matignon : un “kamikaze” pour “sauver” la Ve République
11 octobre 2025 Courrier international
Emmanuel Macron a reconduit vendredi soir Sébastien Lecornu au poste de Premier ministre, moins d’une semaine après sa démission. Un pari “risqué” pour le président français, et une opération “kamikaze” pour son protégé, juge la presse internationale.
Le président français Emmanuel Macron et le Premier ministre Sébasiten Lecornu, alors ministre des Armées, le 13 juillet 2025 à Paris (Photo by Ludovic MARIN / POOL / AFP) LUDOVIC MARIN / AFP
“Retour à la case départ”, constate Le Soir.“À l’issue d’une semaine aussi confuse que théâtrale, le président français l’a annoncé à 22 h vendredi soir : il y aura bien un gouvernement Lecornu II”.
“Le Président de la République a nommé Sébastien Lecornu Premier ministre, et l’a chargé de former un Gouvernement”, a ainsi glissé l’Élysée en toute fin de soirée, juste avant l’expiration du délai de 48 heures promis par Emmanuel Macron pour nommer un Premier ministre.
Une annonce de reconduction on ne peut plus “brève – une seule phrase, sans fioritures – comparée à la déclaration de quatre paragraphes publiée par le palais présidentiel de l’Élysée le 9 septembre, lors de la première nomination” de M. Lecornu, remarque le Washington Post.
“J’accepte – par devoir – la mission qui m’est confiée par le Président de la République de tout faire pour donner un budget à la France pour la fin de l’année et de répondre aux problèmes de la vie quotidienne de nos compatriotes”, a immédiatement réagi le “nouveau” Premier ministre.
« Sauver les meubles »
El País rappelle que M. Lecornu avait déclaré “mercredi dernier lors d’une interview télévisée qu’il n’aspirait pas à revenir à son poste” et que “sa mission était terminée”. Mais il a ajouté qu’il était “un soldat” et qu’il ferait “ce qu’on lui demandait. Et c’est exactement ce qu’on lui a demandé : revenir et tenter de sauver les meubles de la Ve République”.
“Macron renomme le kamikaze Lecornu sur un champ de ruines”, commente pour sa part Blick, estimant qu’Emmanuel Macron, après une journée de tractations, a finalement choisi “l’une des options les plus risquées pour diriger la France”.
Un avis partagé par La Stampa, qui pointe “un pari dangereux pour le président français qui, en accordant à nouveau sa confiance à son fidèle d’entre les fidèles, risque de braquer davantage une France incapable, du moins en apparence, de surmonter l’instabilité politique dans laquelle elle est plongée”.
Le président Emmanuel Macron “tente d’apaiser les troubles politiques qui secouent le pays et compromettent l’adoption du budget”, analyse le New York Times, soulignant cependant qu’il est “loin d’être évident que la reconduction de M. Lecornu contribuera réellement à stabiliser la situation”.
« Suspense » autour de la composition du gouvernement
“Ses opposants politiques”, Rassemblement national (RN) et La France Insoumise (LFI) en tête, “outrés que M. Macron ait une fois de plus nommé un allié politique, promettaient déjà vendredi de le renverser par une motion de censure à la chambre basse du Parlement”, note le quotidien américain.
“Il n’est même pas certain” que M. Lecornu “soit en mesure de former un gouvernement, mais il devra se mettre au travail sans tarder”, note la BBC. Car “le nouveau Premier ministre a jusqu’à lundi pour présenter au Parlement le budget de l’année prochaine”. Et “si Lecornu ne parvient pas à former un gouvernement, l’instabilité pourrait s’accentuer, ce qui pèserait encore plus lourd sur l’économie française”.
Sébastien Lecornu “aura carte blanche dans la composition du gouvernement, a annoncé l’Élysée, et c’est peut-être là que réside le faible espoir qu’il réussisse cette fois la tâche qu’il n’a pas réussi à accomplir ces trente derniers jours”, relève Il Corriere della Sera.
Mais “pour l’heure, le suspense est complet quant aux familles politiques de ceux qui le composeront”, remarque Le Soir. Sébastien Lecornu a donné une seule indication : “La nouvelle équipe gouvernementale devra incarner le renouvellement et la diversité des compétences” et “celles et ceux qui entreront au gouvernement devront s’engager à se déconnecter des ambitions présidentielles pour 2027”.
Tâche redoutable
En résumé, “Lecornu est désormais confronté à la même tâche redoutable qu’il y a un mois : former un nouveau gouvernement capable d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale et adopter un budget d’ici la fin de l’année pour réduire le déficit du pays”, écrit le Wall Street Journal.
Avec en toile de fond la réforme des retraites, autre nœud gordien, qui pourrait elle aussi décider de la survie ou non du gouvernement, les socialistes ayant promis vendredi soir la censure si la loi n’est pas intégralement suspendue.
Mais “toute tentative de revenir sur la réforme des retraites risque d’affaiblir la coalition centriste déjà fragile de Macron et d’aliéner le parti conservateur Les Républicains, qui a été le pilier du soutien parlementaire aux gouvernements de Macron au cours de l’année écoulée”, avertit le quotidien conservateur américain.
Pour Il Corriere della Sera, quoi que réservent les prochains jours, “le climat est celui d’un système politique en ruine, et les acrobaties orwelliennes de langage n’y changeront rien : le ‘socle commun’ (le centre droit qui a produit les derniers gouvernements) n’existe plus, même si le président le qualifie désormais de ‘plateforme de stabilité’”.