
UNE INTERDICTION QUI SONNE COMME UN AVERTISSEMENT
Plus qu’une simple précaution judiciaire, la mesure sonne comme un rappel à l’ordre. Car les magistrats n’ont pas digéré la visite rendue par Gérald Darmanin à Nicolas Sarkozy, à la prison de la Santé, à la fin du mois d’octobre.
Les juges violent le principe de la séparation des pouvoirs et mettent en cause la probité du ministre de la justice.
DARMANIN « REMIS À SA PLACE » SANS PRÉCAUTIONS DE FORME
L’AFP -qui ne respecte pas l’objectivité des informations – a utilisé ce terme de « remis à sa place «.
Une rencontre de quarante-cinq minutes entre le garde des Sceaux et son ancien mentor politique, en présence du directeur de l’établissement — officiellement pour parler sécurité.
LE PROCUREUR Gl. HEITZ ÉTAIT DÉJÀ SORTI DE SES OBLIGATIONS DE RÉSERVE ET DE NEUTRALITÉ
Mais pour certains juges, cette entrevue n’aurait pas dû avoir lieu. À l’époque, le procureur général Rémy Heitz avait même mis en garde : une telle visite, disait-il, pouvait nuire à la sérénité du dossier.
LES JUGES DES SYNDICATS AVAIENT ÉGALEMENT CRITIQUÉ LE MINISTRE DE LA JUSTICE
L’annonce par Gérald Darmanin qu’il rendra visite en prison à Nicolas Sarkozy relève de la « démarche médiatique » et de la « confusion des rôles » entre celui de ministre de la Justice et d’ami de l’ancien chef de l’Etat, ont pour leur part dénoncé les syndicats de magistrats.
« Y va-t-il comme garde des Sceaux ou comme ami ? », s’est interrogé Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats (syndicat modéré et majoritaire), selon qui cette annonce « relève d’une démarche médiatique ».
Le ministre de la Justice « doit se garder de donner l’impression de pencher dans un sens ou dans un autre » dans une procédure et « doit veiller à se tenir à distance des affaires traitées par l’autorité judiciaire », a ajouté le responsable syndical. « Vérifier quoi ? Rien, parce que tout est fait » par l’administration pénitentiaire, « il n’y a pas besoin qu’il y aille », cela peut être contrôlé « à distance » et « il doit faire confiance à ses équipes pénitentiaires », a-t-il poursuivi.
Le Syndicat de la magistrature a dénoncé une « confusion des rôles » entre ceux de Garde des Sceaux et d’ami de l’ancien chef de l’État.
« J’irai le voir en prison ». Le ministre de la justice, Gérald Darmanin, avait annoncé lundi 20 octobre qu’il allait rendre visite à Nicolas Sarkozy, qui sera incarcéré mardi à la prison de la Santé, à Paris. Le Syndicat de la magistrature a dénoncé une « confusion des rôles » entre ceux de Garde des Sceaux et d’ami de l’ancien chef de l’État.
« Cette confusion conforte vraiment dans l’opinion l’idée d’un traitement de faveur à l’égard de certains justiciables. C’est clairement un traitement qui lui est exclusivement réservé », estime Manon Lefebvre, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature, invitée sur RTL.
Emmanuel Macron a aussi confirmé qu’il avait reçu Nicolas Sarkozy avant son incarcération. Une initiative qui irrite la magistrature. « Aujourd’hui, il y a plus de 83.000 détenus sous écrou. Il n’y a personne qui est reçu par le président de la République. Personne ne fait l’objet d’une visite individuelle par le garde des Sceaux », a-t-elle souligné.
Darmanin et Macron se sont défendus
Gérald Darmanin s’est défendu en assurant qu’il pouvait « aller voir n’importe quelle prison et n’importe quel détenu quand il le souhaite », ne voyant aucune atteinte à l’indépendance de la justice. « Il était normal que, sur le plan humain, je reçoive un de mes prédécesseurs, dans ce contexte », a déclaré Emmanuel Macron de son côté.
« Les réactions sont très surprenantes par rapport aux autres détenus, ça donne le sentiment d’une justice à deux vitesses« , selon Manon Lefebvre qui rappelle que Nicolas Sarkozy « s’est exprimé très ouvertement contre l’autorité judiciaire ».
À la suite de la condamnation de l’ancien chef d’État, la présidente du tribunal correctionnel qui avait rendu la décision contre Nicolas Sarkozy avait été visée par des menaces. L’Union syndicale des magistrats s’était inquiétée de « la désignation publique des magistrats, du parquet comme du siège, comme des ennemis politiques« .
ARTICLE – Libération de Nicolas Sarkozy : quand la justice en profite pour régler ses comptes avec son ministre
LE FIGARO Paule Gonzalès 10 11 25
L’une des conditions du contrôle judiciaire imposé à l’ancien président de la République porte sur une interdiction de rencontrer Gérald Darmanin.
La justice n’oublie rien. Elle vient de le prouver une nouvelle fois dans le dossier libyen au sujet de la détention de Nicolas Sarkozy dont la demande de mise en liberté vient d’être accordée par la Cour correctionnelle d’appel de Paris.
Le contrôle judiciaire auquel l’ancien président de la République est soumis précise qu’il lui est interdit de quitter le territoire national, de rentrer en contact avec les protagonistes du dossier et diverses personnes dont le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, et son cabinet. Ce que la justice peut difficilement interdire à son ministre, chef de ce service public, elle le peut en revanche envers un détenu. Et c’est bien une démonstration de force qu’elle vient d’effectuer.
Une visite qui a fait couler de l’encre
La Chancellerie aura beau jeu de rappeler qu’à sa prise de fonction, Gérald Darmanin s’était déporté de tout le dossier et de toutes les remontées d’information concernant l’ancien président de la République. Mais les magistrats dans leur ensemble ont peu goûté que le ministre, le…
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