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LA RETRAITE : VERS UNE NOUVELLE RÉFORME – POURQUOI PAS UNE PART DE CAPITALISATION ?

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LA RETRAITE PAR CAPITALISATION EXISTE DÉJÀ – DISCRÈTEMENT OBLIGATOIRE POUR LES FONCTIONNAIRES – ET SI ON LA DÉVELOPPAIT ?

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RETRAITE : LA VOIE LOGIQUE DE L’EXTENSION DE LA CAPITALISATION ?

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LA RETRAITE PAR CAPITALISATION – DONT LA GAUCHE ET LES SYNDICATS NE VEULENT PAS – EXISTE DÉJÀ POUR 5 MILLIONS DE FONCTIONNAIRES – DOSSIER

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1. ARTICLE – 74% des Français jugent une nouvelle réforme des retraites inévitable, 57% estiment que la suspension est « un gain minime »

SONDAGE BFMTV. 14 11 25

Six Français sur dix considèrent que la suspension de la réforme des retraites votée ce mercredi 12 novembre n’est « qu’un gain minime ».

Le sujet bientôt de retour sur la table? Près de trois quarts des Française (74%) jugent qu’il sera « inévitable » de faire une nouvelle réforme des retraites dans les années à venir, selon le sondage Opinion en direct réalisé par l’institut Elabe pour BFMTV. 68% des interrogés estiment que le système actuel est « à bout de souffle » et « ne peut pas continuer de fonctionner sur les mêmes bases qu’aujourd’hui ».

Seuls 25% considèrent en revanche qu’il est possible de « continuer avec le fonctionnement actuel ».

Pour rappel, l’Assemblée nationale a adopté le 12 novembre en première lecture la suspension de la réforme des retraitesjusqu’au 1er janvier 2028, à 255 voix pour et 146 contre. Entrée en vigueur en septembre 2023, elle prévoyait notamment de repousser l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Le vote de cette mesure gèle l’âge de départ à 62 ans et 9 mois. 57% des Français jugent que cette suspension est cependant un « gain minime ».

Les Français partagés sur la suspension de la réforme

Les plus âgés sont les plus nombreux à demander une nouvelle réforme. Ainsi, 81% des 65 ans et plus considèrent que cela est nécessaire, tandis que les 18-24 ans ne sont que 57%. Entre 25 et 64 ans, les taux ne varient que légèrement, ils oscillent entre 71 et 78%.

Parmi les autres enseignements de cette étude, seuls 21% des actifs jugent qu’ils disposeront d’une bonne pension lorsqu’ils seront à la retraite et 64% souhaitent l’introduction d’une dose de capitalisation au sein d’un système financé majoritairement par répartition.

Enfin, 57% des personnes interrogées approuvent la décision du gouvernement d’avoir accepté la suspension de la réforme des retraites, contre 42% qui pense que le gouvernement « n’aurait pas dû accepter au vu de l’état des finances publiques », et ce « même si cela aurait abouti à une éventuelle censure ».

2. ARTICLE – La capitalisation en France, de la théorie à la pratique

Bertrand Martinot. 13 novembre 2025. TELOS

Notre pays, on le sait, adapte fréquemment son système de retraite par répartition. Il le fait toujours dans l’urgence et sans jamais parvenir à définir une stratégie à long terme dans une matière où précisément c’est bien le temps long qui devrait primer.

Avec la réforme Borne qui ne réglait pas, loin s’en faut, les déséquilibres de nos retraites, mais qui améliorait sensiblement les perspectives financières, nous pensions avoir au moins gagné deux ou trois ans de paix sociale. Las, avec sa suspension, nous sommes bien obligés de relancer prématurément le débat. Cette fois, et après deux échecs successifs (l’échec de la réforme Borne succédant à celui d’Edouard Philippe en 2020), de nombreux experts et acteurs politiques ont la conviction qu’il faut cesser de procéder par de nouveaux rafistolages du système actuel. L’heure est donc à la créativité et aux « big bangs »… ! Et parmi les pistes évoquées, l’introduction d’une dose de capitalisation revient en force dans les débats publics après de nombreuses années d’absence de réflexion sur le sujet.

En théorie, le passage à un système intégrant une dose significative de capitalisation aurait plusieurs avantages décisifs compte tenu de nos perspectives démographiques. Le premier repose sur des considérations d’équité intergénérationnelle. Notre système aboutit en effet mathématiquement à ce que le taux de rendement des cotisations versées diminue au cours du temps[1]. Dit autrement, chaque génération voit la générosité du système diminuer alors même qu’elle devra cotiser toujours plus. La capitalisation a l’avantage d’offrir des rendements, ceux des actifs financiers et de l’immobilier, qui ne seraient pas a priori tendanciellement en diminution.

Le deuxième est la possibilité, du moins à long terme, de financer un niveau donné de pensions avec de moindres taux de cotisations, dans un contexte où notre pays bat des records en matière de charges pesant sur le travail. C’est le cas notamment lorsque les fonds de la capitalisation sont investis dans des actifs suffisamment diversifiés géographiquement pour permettre d’aller chercher des relais de croissance et de rendements à l’étranger.

Le troisième est la perspective qu’une partie des fonds de capitalisation soit investie dans l’économie française et concoure à renforcer les fonds propres de nos entreprises, leur permettant ainsi d’investir.

Au regard de ces avantages, les inconvénients sont faibles. Les contempteurs de la capitalisation mettent généralement en avant les risques financiers. C’est oublier la robustesse donnée par la taille des fonds de pensions géants et qui n’ont pas besoin d’être liquides, par exemple ceux de type Calpers (gérant les fonds de pension des fonctionnaires californiens) ou encore des fonds de capitalisation suédois. De tels fonds parviennent sur le long terme à dégager des rendements supérieurs à 4% réels. En outre, toute une littérature économique démontre l’intérêt des systèmes hybrides capitalisation – répartition en matière de diversification des risques[2] : risque politique et sur la croissance économique nationale pour la répartition, risque financier international pour la capitalisation.

Au total, il ne fait guère de doute que si nous devions construire un système de retraite ex nihilo dans le contexte démographique actuel, nous choisirions un système mixte. Bien entendu, nous ne partons pas d’une feuille blanche, mais au contraire d’un système par répartition pure qui, en outre, ne dispose que de très peu de réserves financières. La question qui se pose est donc celle de la transition d’un système à un autre. Et c’est sur cette question qu’achoppent la plupart des propositions. En réalité, deux visions sont possibles.

La première consiste à encourager l’accumulation d’épargne retraite dans des dispositifs de type plan d’épargne retraites d’entreprise ou individuels, par exemple via des incitations fiscales renforcées. Si ce mouvement s’effectue sur une base volontaire, il a de nombreux atouts : pas de hausse des cotisations obligatoires, réorientation de l’épargne existante vers les retraites, neutralité bienveillante des syndicats, fort soutien de la population qui démontre une forte appétence pour ce type de produits financiers, notamment depuis les incitations et les simplifications opérées par la loi PACTE de 2019… Ce système comporte toutefois un inconvénient de taille : il risque, comme c’est le cas aujourd’hui, de ne profiter qu’à ceux qui peuvent mobiliser une épargne existante ou qui ont la chance de travailler chez un employeur ayant les capacités d’abonder le plan d’épargne. Généraliser ce type de dispositif, ce que font certains pays, nécessiterait la création d’une nouvelle cotisation retraite, en plus des 28% actuels qui nous placent déjà dans le top 3 des pays de l’OCDE.

La seconde consiste à construire un pilier par capitalisation à l’intérieur du pilier actuel par répartition, et donc réduire progressivement ce dernier et le recentrer sur une retraite de base comportant une large proportion de solidarité (donc faiblement contributif). Cette méthode serait la seule à autoriser une véritable « capitalisation pour tous » permettant de protéger la totalité des salariés du secteur privé contre le déclin inéluctable de la répartition.

Mais ne nous voilons pas la face : pour ne pas créer une double cotisation (nécessité de financer les retraites par répartition actuelles tout en amorçant la création d’un pilier par capitalisation), les efforts ne sont pas négligeables. Dans une note récente publiée par la Fondapol[3], mes co-auteurs et moi-même explorons et simulons différents scénarios de montée en charge d’un tel système qui représenterait à terme 25% des pensions versées aujourd’hui, sous différentes hypothèses de taux de rendement des fonds investis. Sans surprise, cette transition sans hausse nette de cotisations suppose dans tous le cas une contribution significative de la part des retraités actuels (sous forme de sous-indexation temporaire des pensions et de suppression de l’abattement de 10 % à l’IR) et des salariés (via une hausse de la durée du travail, par exemple de deux jours de travail par an, consacrées à financer la capitalisation).

Enfin, il est proposé que ce fonds soit piloté par les partenaires sociaux de l’AGIRC-ARRCO. Dans la mesure où il s’agirait de remplacer une partie des retraites existantes et que ce régime recyclerait les réserves de l’AGIRC-ARRCO pour contribuer à l’amorçage, ce schéma institutionnel paraît assez naturel.

Les voies de passage pour introduire un pilier par capitalisation profitant à tous les salariés existent donc, mais elles sont exigeantes.

Terminons sur une remarque qui va de soi, mais qui pourrait bien refroidir les ardeurs de certains promoteurs de la capitalisation : en aucun cas un tel dispositif ne peut et ne doit servir au rééquilibrage d’un pilier par répartition. Car il serait pour le moins absurde de viser à accumuler plusieurs dizaines de points de PIB en capitalisation tout en laissant le pilier répartition d’endetter à un niveau quasi équivalent… !

C’est dire que l’introduction, aussi souhaitable soit-elle, d’un pilier par capitalisation dans le système de retraite doit nécessairement s’accompagner d’un rééquilibrage, par ailleurs, du pilier par répartition, ce qui ne se fera pas, là encore, sans un effort partagé des actifs et des retraités.

Les termes du débat étant clarifiés, il n’y a plus qu’à le laisser prospérer.

3. ARTICLE – Retraites : la réforme de 2023 suspendue, le débat sur le futur de notre système s’installe pour 2027   

Publié le 14/11/2025 LA DÉPÊCHE Philippe Rioux

En votant la « suspension » de la réforme des retraites de 2023, l’Assemblée a évité la censure du gouvernement Lecornu au prix d’une fracture à gauche et de tensions dans le bloc central. Le texte doit encore affronter un Sénat hostile, tandis que les partis affûtent déjà leurs scénarios de réforme en vue de la présidentielle de 2027.

Emmanuel Macron n’aura pas assisté depuis l’Elysée à la suspension par l’Assemblée nationale de la seule grande réforme de son quinquennat : la controversée réforme des retraites de 2023, imposée au forceps contre les syndicats unanimes et une majorité de Français dont des millions étaient descendus dans la rue. En déplacement à Toulouse pour un « face aux lecteurs » à La Dépêche et la présentation de la stratégie nationale spatiale, le chef de l’État n’a pu que faire le constat de ce recul, condition de la survie politique de Sébastien Lecornu.

Car la réforme emblématique était devenue une monnaie d’échange politique : en approuvant mercredi la « suspension » de la réforme maudite, l’Assemblée nationale a, en effet, sauvé le gouvernement Lecornu de la censure que lui promettait le Parti socialiste, mais sans clore le débat ni apporter de la clarté aux Français sur le devenir de notre système de retraites.

Une suspension qui fracture

Intégrée au budget de la Sécurité sociale, la mesure a été adoptée par 255 voix contre 146. Concrètement, l’article 45 suspend jusqu’en janvier 2028 la marche vers le départ en retraite à 64 ans et le relèvement du nombre de trimestres. La génération née en 1964 partirait à 62 ans et 9 mois, comme la précédente, avec 170 trimestres au lieu de 171. Sauf nouvelle réforme, la mécanique Borne reprendrait ensuite, avec un trimestre de décalage. Le gouvernement a par ailleurs élargi le périmètre pour inclure notamment les carrières longues, faisant grimper le coût de la suspension à 300 millions d’euros en 2026 et 1,9 milliard en 2027, selon l’exécutif.

Cette suspension voulue par le PS a fracturé la gauche. Le PS et les écologistes revendiquent une « victoire importante ». À l’inverse, LFI et le PCF dénoncent un simple « décalage ». Jérôme Guedj, chef de file des socialistes sur le PLFSS, fustigeait les Insoumis qui ont « une propension à toujours transformer les victoires en défaites, l’or en plomb ».

Le clivage traverse aussi le champ social : la CFDT voit dans ce vote un « premier coup d’arrêt » et appelle à soutenir la suspension, quand la CGT parle « d’enfumage » et insiste sur le fait que les 64 ans ne sont que repoussés d’une génération. Le patronat, par la voix du président du Medef Patrick Martin, a fustigé une « erreur fatale ». Pour autant, rien n’est acquis. La suspension doit maintenant affronter un Sénat décrit comme « terrain hostile »…

À chacun ses lignes rouges

Sur les bancs de l’Assemblé, la lisibilité n’était pas de mise. Renaissance, affaiblie par l’impopularité de la réforme lors des législatives post-dissolution, a choisi majoritairement l’abstention – un crève-cœur pour certains –, tout en défendant le principe d’un changement de système plutôt qu’un ajustement permanent des paramètres d’âge et de durée de cotisation. Le MoDem a assumé un vote favorable. Horizons, le parti d’Edouard Philippe, a rejeté une concession jugée dangereuse pour les finances publiques. LR, déjà très critique, voit dans cette suspension un leurre et appelle à « dire la vérité » sur l’équilibre financier et plaide pour rouvrir le débat sur la capitalisation et l’allongement de la durée d’activité.

La suspension de la réforme, si elle franchit les étapes parlementaires, ne réglera en revanche rien de la question centrale qui se pose à la France : quel système de retraite choisir capable de préserver notre modèle social tout en étant financièrement soutenable ?

Premières pistes pour 2027

Dans ce contexte incertain, la présidentielle de 2027 devient l’horizon de vérité alors que la majorité des pays européens ont augmenté l’âge de départ jusqu’à 70 ans au Danemark en 2040 ! Du côté présidentiel, Renaissance réfléchit à un changement plus systémique : un dispositif universel, plus lisible, avec un pilier de capitalisation, sans âge légal trop rigide, mais sans architecture définitive assumée publiquement à ce stade. Le PS et les écologistes se concentrent sur la défense du système par répartition et la relance d’un large dialogue social, sans annoncer un nouvel âge légal précis.

À l’autre bout du spectre, LFI et le PCF maintiennent leur cap : retour à 60 ans et rejet des réformes paramétriques jugées injustes. Le RN se pose en artisan d’une « abrogation » de la réforme à 64 ans, pour revenir à 62 ans. LR pousse à la fois une réflexion sur la capitalisation et sur l’allongement de la durée de travail, au nom de la sincérité budgétaire. Liot et une partie des centristes, enfin, ont soutenu la suspension au nom de la stabilité politique immédiate, tout en renvoyant les choix structurels à plus tard.

Derrière un compromis fragile arraché pour éviter la chute du gouvernement, on voit bien que le vote de mercredi n’a rien réglé, ni le financement, ni la philosophie du système. Les prétendants à l’Elysée en 2027 devront toutefois se garder de faire de la question des retraites l’unique sujet de la présidentielle alors que le monde est chamboulé par une nouvelle géopolitique, des guerres hybrides et informationnelles, l’intelligence artificielle et les rivalités commerciales. Autant de sujets abordés à Toulouse par Emmanuel Macron…

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