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DÉCIVILISATION (4) : « RÉCUPÉRATION POLITIQUE » ?

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MISE À JOUR – PROMESSE (9) ET ENGAGEMENT : « CONTRER UN PROCESSUS DE DÉCIVILISATION » (1) ET « ÊTRE INTRAITABLE » – À SUIVRE DANS L’ACTION ? https://metahodos.fr/2023/05/25/promesse-16-et-engagement-contrer-un-processus-de-civilisation-et-etre-intraitable-a-suivre-dans-laction/

ÉMISSION

“Décivilisation” : histoire de la violence (et de sa récupération politique)

Mardi 30 mai 2023. FRANCE CULTURE

En utilisant le terme de « décivilisation » pour qualifier la multiplication des violences en France ces derniers mois, Emmanuel Macron fait appel à des notions controversées et contradictoires pour désigner ce qu’il considère être aujourd’hui une réalité politique. Qu’en est-il vraiment ? 

Avec

  • Sebastian Roché Sociologue, directeur de Recherche au CNRS, spécialiste de la comparaison des systèmes de police
  • Arnaud-Dominique Houte Professeur d’histoire contemporaine à Sorbonne-Université

Pour en parler, Guillaume Erner reçoit le sociologue Sebastian Roché et l’historien Arnaud-Dominique Houte.

Peut-on parler de recrudescence de la violence en France ?

« La violence est un terme extrêmement polysémique, rappelle le sociologue Sébastien Roché. Il est donc compliqué de faire une assertion comme celle-ci. Cependant, sur long terme, on constate une diminution de la violence physique et notamment de l’homicide. Depuis le XIIIᵉ siècle, les taux d’homicides n’ont pas cessé de décliner et c’est un déclin que l’on observe dans tous les pays d’Europe.

Comment l’expliquer ? « Il y a d’abord une tendance générale à la pacification, précise Sébastien RocherEt puis il y a des contrastes spatiaux et l’Europe et une partie de l’Asie sont les régions dans lesquelles les taux d’homicides sont vraiment les plus faibles. A**u fil du temps se sont constitués des Etats qui ont régulé les comportements des individus avec un certain nombre d’instruments que sont les administrations, et la mise en place de ces cadres étatiques s’est associée à une transformation des sensibilités ».

Le professeur d’histoire contemporaine à Sorbonne-Université Arnaud-Dominique Houte rappelle également la théorie développée par Norbert Elias pour décrire l’histoire française des XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles : “le premier élément du processus de civilisation des mœurs repose sur un contrôle renforcé de l’État – et donc un renforcement des structures de l’État, mais aussi de son appareil policier – et son articulation avec une auto-contrainte des individus qui changent leur manière de fonctionner et leur rapport à la violence”.

L’historien relève par ailleurs que “la question de la violence dépend moins des faits objectifs mesurables que d’un ressenti. Et tout le problème du ressenti, c’est qu’il fonctionne à un double niveau : c’est une construction sociale et historique évolutive – quelle est notre sensibilité personnelle à la violence ? Et puis il y a la caisse de résonance médiatique. La violence, on la vit rarement de manière directe, précise Arnaud-Dominique Houte. Elle est médiatisée par des images, par des sons, par des perceptions, et par des discours. De ce point de vue, on touche à une évolution majeure, notamment sur les dix à vingt dernières années avec l’explosion des médias en continu, des chaînes d’information qui changent radicalement le regard sur la violence”.

Qu’en-est-il de la violence de l’Etat ?

Michel Foucault considère que le procès de civilisation peut très bien s’accompagner d’un regain de cruauté, non pas du point de vue des individus, mais du point de vue de l’État. En d’autres termes, l’État peut être de plus en plus cruel au fur et à mesure qu’il se modernise – un processus que l’on retrouve notamment dans les pratiques de répression de masse. A-t-on affaire à un processus de « décivilisation » des forces de l’ordre, autrement-dit à une police qui oublierait son devoir et son contrôle sur soi ?

“Je pense que la violence policière et sa dénonciation participent du mouvement de civilisation des mœurs, indique le spécialiste de la comparaison des systèmes de police, Sébastien Rocher. C’est-à-dire qu’aujourd’hui, il n’est plus acceptable, bien sûr, de se faire assassiner. C’est le cumul de deux choses : la sensibilité à la violence qui évolue, et puis la visibilité de cette violence. Et c’est très intéressant de constater que le président de la République dénonce la violence contre la police, car s’il l’on s’en réfère aux chiffres, il n’y a eu aucun policier et gendarme tué depuis trente ans sur la gestion des foules. La gestion des manifestations, que l’on nous présente comme étant toujours plus sauvages, ne correspond pas aux faits”.

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