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IA : MENACE SUR LES VOIX HUMAINES

DES LIVRES AUDIO SANS VOIX HUMAINE

L’intelligence artificielle dans le monde des livres audio génère aujourd’hui des paroles fluides sans recourir à un narrateur humain rémunéré. Toutefois, l’emploi de cette technologie interroge : quid de la propriété intellectuelle ? En effet : pour obtenir une voix modélisée, la machine s’appuie sur des voix véritables…

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L’IA ET L’ÉDITION : QUELLES PERSPECTIVES ?

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ARTICLE – IA : quel avenir pour les professionnels de la voix ?

Le 22/05/2023 à 11:32 par Julie Mahé ACTUALITTÉ

D’après The Guardian, les ventes de livres audio, aux États-Unis, ont bondi de 25 % en 2022 en regard de 2021. En France, cette année, près d’une personne sur trois a déjà écouté un livre, avec une pratique nettement plus répandue chez les grands lecteurs (imprimé ou numérique) et chez les moins de 35 ans, un chiffre en hausse par rapport à 2017, selon une étude du Centre national du Livre.

Le marché de l’audio, surmédiatisé, représente donc un bel enjeu. Pas seulement culturel, mais aussi économique…

Dépenser moins, produire plus

Selon Mark Piesing, la voix artificielle réduit les coûts de production d’un audiobook. Le budget pour une fiction de longueur standard passe ainsi de 2500 $ à 400 $. La firme britannique DeepZen serait l’une des plus en avance : elle travaille à partir d’une base de données qu’elle a créée en enregistrant les élocutions de plusieurs acteurs qui expriment une variété d’émotions différentes.

D’ailleurs, Dima Abramov, PDG de Speechki, estime que « [l]a narration synthétique vient d’ouvrir la porte aux livres anciens qui n’ont jamais été enregistrés, et à tous ceux du futur qui ne seront jamais enregistrés pour des raisons économiques ». Et il précise qu’« ils [les acteurs] gagneront plus d’argent, ils feront plus d’enregistrements ». 

En somme, pas de pertes de revenus à redouter ? Pour l’heure — pour l’heure… —, Audible (filiale d’Amazon) propose une offre qui repose intégralement sur des ouvrages lus par des humains. Mais la pratique se généralisant, les professionnels dénoncent les conséquences néfastes sur leur métier.

En effet, la législation encadrant l’intelligence artificielle reste en construction dans plusieurs pays. Des entreprises se sont engouffrées dans ce vide juridique pour installer certaines pratiques.

Vols de droits

Tanya Eby, lectrice depuis une vingtaine d’années, déplore que certains nouveaux entrants dans le secteur manquent clairement d’éthique. Et se servent d’élocutions humaines pour alimenter les machines, sans contrepartie financière. « Ils prennent votre voix, ma voix, cinq voix d’autres personnes combinées, ce qui crée une voix distincte… Ils disent qu’elle n’appartient à personne », décrypte Kamis Taylan, directeur général de DeepZen. 

Les technologies d’intelligence artificielle reposent en partie sur l’apprentissage automatique : le programme traite une large masse de données — y compris vocales — afin de « s’entrainer » et devenir plus performant dans l’accomplissement des tâches.

Manque de transparence

Contactées par l’AFP, les structures utilisant cette technologie se défendent de telles pratiques. Pourtant, des milliers de livres sont conçus à partir d’une banque de données vocales déjà sur le marché.

En janvier 2023, Apple annonçait l’arrivée de Madison, une voix synthétique maison. Elle est conçue par des voix humaines provenant de lectures réalisées pour le fournisseur Findaway, filiale de Spotify. Or, les contractants n’avaient pas prêté attention à cette clause de leur contrat, noyée dans un ensemble — ou écrite en tous petits caractères ? 

De même, les auteurs des ouvrages lus s’estiment insuffisamment informés du devenir des productions. Auprès de Wired, Isobel Starling, autrice de polars, note que son contrat avec Findaway comportait bien une mention sur l’apprentissage automatique. Sauf qu’elle se trouvait « enterrée dans des sections plus banales du document, qui portent sur les discours de haine ou les contenus explicites ». 

Certains acteurs constatent aussi un ralentissement de leur activité. En six mois, souligne Tanya Eby, son carnet de commandes a été divisé de moitié.

Une question sociétale…

En outre, alors que leur nombre augmente, la qualité des enregistrements par une IA laisse dubitatif. Plusieurs professionnels s’élèvent donc contre ce procédé. « Le narrateur apporte une toute nouvelle dimension d’art dans la création […], et nous pensons que c’est une chose puissante. Ils créent quelque chose de différent du livre imprimé, mais qui apporte de la valeur », précise David Caron, coproducteur pour ECW Press, important éditeur de livres audio du Canada.

Et de poursuivre : « Lorsque vous avez une écriture virtuose à laquelle s’ajoute une lecture vraiment talentueuse, vous disposez d’un produit spécial. Cela vaut la peine d’investir. »

Pour Emily Ellet, responsable de l’Association des narrateurs professionnels de livres audio (Professional Audiobook Narrators Association, PANA), la narration demeure indispensable : « L’essence même de la narration est d’apprendre à l’humanité à être humaine. Et nous sommes convaincus que l’on ne devrait jamais confier à une machine le soin de nous apprendre à être humain. »

1 réponse »

  1. Bonjour, Thierry,Comme le dit et l’a écrit Luc Julia, « L’Intelligence Artificielle n’existe pas » (ed First, 24 janvier 2019). L’épistémologue Arnaud Upinsky (l’auteur de « Macron : le président ventriloque » Gallimard) renchérit : « Toute la ruse a été d’appeler ça intelligence alors qu’il s’agit en réalité de robotique et d’algorithmes ! » Nous savons qu’il manque de fait à l’IA, la conscience et l’imagination indispensables pour qu’il y ait intelligence. Cette CID (« Compilation Industrielle de Données »), comme on devrait la nommer, représente donc, de ce fait, une déshumanisation de nos systèmes économiques et de production. Comme ils sont, dans cette dynamique néolibérale, le coeur de notre société, il y a beaucoup de soucis à se faire si on souhaitait s’y soumettre. Nous assistons déjà à l’effondrement intellectuel et moral tant de nos élites que de la population… Ceci est aussi une stratégie politique où la mathématiques remplace l’intelligence. Dont acte !Bien amicalement Jean-Marc 

    Yahoo Mail : Recherchez, organisez, maîtrisez

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