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Faut-il restreindre l’accès des adolescents aux réseaux sociaux ?

Lundi 6 mars 2023 FRANCE CULTURE

Conditionner l’accès aux réseaux sociaux des adolescents de moins de 15 ans à l’accord préalable de leurs parents, voire l’interdire avant l’âge de 13 : voici ce que prévoit la proposition de loi adoptée jeudi par l’Assemblée nationale, qui introduit la notion de “majorité numérique”.

Avec

• Anne Cordier maîtresse de conférences HDR en Sciences de l’Information et de la Communication à l’université INSPE de Rouen Normandie, auteure de « Grandir connectés »

Alors que cyberharcèlement et désinformation inquiètent, l’objectif est d’encadrer les usages numériques des plus jeunes… Que sait-on de leurs pratiques numériques ? Les adolescents sont-ils plus vulnérables que les adultes face aux risques des plateformes ?

Anne Cordier est professeure en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Lorraine. 
Elle est l’autrice de : Grandir connectés, Les adolescents et la recherche d’information, paru chez C & F éditions en 2015.

Les réseaux sociaux, une instance de socialisation des enfants

Les réseaux sociaux participent de la socialisation des enfants. « A travers ces derniers, les enfants se projettent dans un espace social, apprennent à vivre ensemble, expérimentent des formes d’identité »,explique Anne Cordier, professeure en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Lorraine. « C’est aussi un espace d’accès à l’information qui participe de la construction adolescente. On néglige souvent cette pratique des réseaux qui est pourtant réelle : les adolescents accèdent à des sujets d’actualité et à de l’information qui, à leur âge, les intéresse ». Par exemple ? « Aussi bien les résultats des matchs de football, la culture K-pop, etc., que des contenus liés aux interrogations des adolescents sur le genre et la sexualité, et auxquels les adultes ne répondent pas forcément ».

« Faire le tri » dans le contenu en ligne : un défi pour les enfants comme pour les parents

Le problème se pose quant au tri entre contenu vérifié et information fausse, qui n’est pas effectué sur les plateformes. Les enfants sont confrontés aux « infox » – informations fausses, et à diverses théories dont on préférerait les tenir à l’écart. « Les réseaux sociaux donnent effectivement un accès large à l’information, mais il revient à l’usager d’être en mesure d’évaluer l’information », relève Anne Corider. « Et les enfants en ont pleinement conscience : lorsqu’ils évoquent les réseaux sociaux, ils mentionnent très souvent leurs parents, auxquels ils se réfèrent notamment pour vérifier la validité des informations auxquelles ils accèdent ». Pourtant, il semble difficile d’expliquer aux enfants qu’il faut discriminer les contenus publiés sur internet. « C’est pour cette raison qu’il faut que le dialogue soit ouvert. Car les enfants ont peur de ne pas distinguer l’information erronée de l’information vraie, mais cela ne veut pas dire qu’ils ont les outils pour faire ce tri ».

Une volonté de régulation

« En fonction de la façon dont la loi va être conçue, les parents vont disposer d’une marge de manœuvre ; mais c’est avant tout celle du dialogue,indique Anne Cordier. L’important est de revenir sur l’impact direct des réseaux sociaux qui mettent en lumière des phénomènes de société : les violences en ligne, la désinformation, mais aussi la solidarité, la sororité, et un accès à une information de qualité ».En somme, « les réseaux sociaux ne « provoquent » pas de comportements « en soi ». Les usages problématiques reflètent des usages qui sont également problématiques en société », rappelle la professeure en Sciences de l’Information et de la Communication à l’Université de Lorraine.

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