
UNE POLITIQUE DU LOGEMENT EN ECHEC ?
Metahodos a régulièrement traité de la question du logement et de sa politique publique.
L’habitat est un enjeu de prospérité et de bien être pour chacun. Il marque également de graves inégalités en même temps qu’il ampute lourdement le pourvoir d’achat des catégories moyennes et populaires. (Même si le poids du cout du logement est largement sous-estimé dans les statistiques de l’INSEE )
L’action publique n’aura pas réussi durant ces 4 dernières années à relancer la construction de logements malgré des taux d’intérêt extrêmement faibles qui auraient du la favoriser.
POLEMIQUE SUR LE LOGEMENT INDIVIDUEL
Emmanuelle Wargon, ministre : la maison individuelle serait une aberration écologique.
Voici une émission récente de France Culture sur ces thèmes.
Émission
Habitat et territoires : les fractures françaises.
Réécouter Habitat et territoires : les fractures françaises. Avec Jean-Laurent Cassely et Damien Hereng
https://www.franceculture.fr/player/export-reecouter?content=09201f10-edda-41ef-ad62-e09c76ef8617
L’aménagement du territoire, les choix de résidences comme les politiques de logement en disent long sur les changements en cours dans la société et définissent largement nos visions politiques.
Le logement et l’aménagement du territoire sont deux sujets hautement politiques. Ils procèdent de volontés fortes : le soutien de l’accession à la propriété privée a ainsi succédé à la politique favorable au logement social. La déclaration de la ministre du Logement Emmanuelle Wargon sur le modèle obsolète de la maison individuelle a donc fait réagir.
Les choix de résidences disent aussi des choses de la société. Dans La France sous nos yeux, Jérôme Fourquet et Jean-Laurent Cassely étudient les stratégies et les motivations des Français. L’installation en ville ou à la campagne, en maison ou en appartement sont des choix parlants sur nos modes de vie, nos aspirations et ont parfois à voir avec nos choix politiques.
Qu’indiquent alors la tendance récente d’attrait pour les villes moyennes qui ont été jusqu’à alarmer des élus locaux à propos de la pression immobilière ? L’intérêt pour les campagnes relève-t-il d’une utopie écolo ? Les Gilets Jaunes sont ils aussi l’expression politique d’un univers périurbain ?
Nous en parlons avec Jean-Laurent Cassely, journaliste, essayiste, spécialiste des modes de vie et des questions territoriales, et co-auteur de La France sous nos yeux (Seuil, 2021). Il est rejoint en cours d’émission par Damien Hereng, président de la Fédération Française des Constructeurs de Maisons Individuelles.
La maison individuelle
Vous qui avez particulièrement étudié notre vie, quelle est la place aujourd’hui de la maison individuelle dans nos habitats ?
On sait par l’INSEEE qu’aujourd’hui, 1 Français sur 2 vit en maison individuelle. Dans les sondages, ce qui nous a frappés avec Jérôme Fourquet, c’est que la maison individuelle regroupe entre 2/3 et 3/4 des Français dans les préférences des Français. C’est vrai chez les Français de toute classe sociale. C’est aussi un mode de vie qui est associé à la voiture, au supermarché, à l’étalement urbain. On la voit comme un symbole du repli sur le privé, sur la famille, sur les amis. Jean-Laurent Cassely
La piscine, équipement assez élitiste à l’origine, s’est beaucoup démocratisée. La France est un des pays où il y en a le plus, même dans le Nord du pays. On se retrouve dans une forme d’urbanisme de la vie privée qui est parfois mal compris par les élites culturelles et intellectuelles. Mais les choses sont peut-être en train de changer, car avec les confinements, on a parlé d’une revanche des pavillons. Jean-Laurent Cassely
La polémique Wargon et l’enjeu écologique
Votre réaction au commentaire d’Emmanuelle Wargon, selon laquelle la maison individuelle serait une aberration écologique ?
Il est scandaleux, mais il reflète une politique du logement au long cours. La ministre n’a fait que mettre sur la table un discours que les constructeurs entendent dans les cabinets depuis des années. Damien Hereng
Le logement ne coûte pas la même chose dans l’ultracentre d’une métropole ou en périphérie. Donc depuis une dizaine d’années, en France, il y a des aides à la construction, comme le prêt à taux zéro. Il y a donc une forme de logique à ce que l’aide à la construction soit moins chère en métropole qu’en périphérie : c’est ce qu’on appelle le zonage. A travers ces mécanismes, cela a donné la possibilité de flécher l’argent vers les habitats collectifs. Damien Hereng
L’argument invoqué, c’est que le bâtiment collectif est plus économe, et peut-être aussi plus mixte socialement…
Pour l’écologie, c’est une aberration. Les faits démontrent que la maison individuelle n’est pas moins performante énergétiquement. En matière d’équipement, la question est de savoir de quel mode de vie les Français pensent avoir besoin. Damien Hereng
Une fracture ?
A-t-on affaire à deux France sur ces questions ?
Ces propos maladroits révèlent une fracture dans les quotidiens de vie, dans l’imaginaire. Les traces de la civilisation automobile disparaissent aujourd’hui du quotidien parisien. Dans les années 1970, un Parisien sur deux avait une voiture ; aujourd’hui, 2 habitants de Paris sur 3 n’en ont pas, alors que 9 Français sur 10 en ont une. Quand on vit dans une ville dense, aujourd’hui, on n’a parfois même plus en tête que la voiture est un sujet. C’est une fracture qui va peut-être se creuser. Jean-Laurent Cassely
BIBLIOGRAPHIE
La France sous nos yeux. Economie, paysages, nouveaux modes de vieJérôme FourquetSeuil, 2021INTERVENANTS
- Jean-Laurent CasselyJournaliste chez Slate.fr
- Damien HerengPrésident de la Fédération Française des Constructeurs de Maisons Individuelles.
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