Premiers résultats de l’appel à propositions pour stopper la violence et instaurer un dialogue
Le rappel de notre démarche
Nous avons produit un appel à suggestions pour ne pas réenclencher la spirale absurde du non-dialogue et de la violence.
Nous indiquions que le moment est certainement venu, pour l’exécutif en particulier, de changer radicalement de posture : établir un dialogue. Bien sûr, si une telle initiative pouvait venir du mouvement lui- même ce serait très bien. Mais compte tenu de sa forme, il n’est pas réaliste de l’attendre, et surtout il n nous semble pas, e démocratie, responsable de l’attendre ou de l’exiger sans rien faire par ailleurs.
Car, en démocratie, c’est l’écoute et la concertation qui doivent l’emporter, au-delà des colères, des peurs ou de l’amour-propre.
Le débat que nous avons ainsi suscité a porté ses premiers fruits
Mais vous pouvez continuer à nous ADRESSEZ-NOUS VOS SUGGESTIONS, dans la partie commentaires ci-dessous ou par mail à metahodos.lem@gmail.com. Vous pouvez également continuer à faire connaitre vos remarques sur LINKEDIN ( Plus de 200 réactions recueillies ).
Les nombreux contributeurs font état des difficultés d’un tel dialogue tant du côté du mouvement que de celui de l’exécutif. Deux « camps » semblent bien exister ? et ce n’était pas tout à fait un lapsus lorsqu’un représentant de l’Etat a utilisé ce terme.
Beaucoup, et il ne faut pas cacher qu’ils sont majoritaires ne voient pas de solutions, ou ne pensent pas qu’il faille – ou qu’il soit possible d’en chercher. Les raisons : la posture de l’une des deux parties, ou les postures des deux conjuguées. Certains ne croient plus en la démocratie. L’utilisation de ce concept parait incongrue pour nombre d’entre eux. Il y a un « décrochage » fortement exprimé !
Les pistes de solutions peuvent se résumer ainsi :
N’est-il pas normal que l’on cherche une solution pour trouver d’autres modes d’expression qui ne soient pas violentes ?
Ne doit-on pas à tous prix rechercher , et n’est pas le devoir des élus responsables de le faire, des voies de dialogue et des modalités d’écoute ?
Est de la « naïveté » peut être de la part de Metáhodos que d’entreprendre une démarche, de l’idéalisme aussi ?
Au sein de la Nation n’est-ce pas un objectif majeur que de garantir la libre expression de chacun sans que ce soit au détriment des autres citoyens et dans le respect des formes acceptées par les règles communes et la loi ?
Il en est de même dans une entreprise où l’expression syndicale est légitime mais où les conflits – sous forme de grève par exemple – n’ont pas vocation à devenir permanents et doivent déboucher – dans l’intérêt bien compris des deux parties – sur le dialogue.
Deux suggestions principales ont été faites
Peut-être que les savoirs faire et les bonnes pratiques mis en oeuvre dans les entreprises pour faire évoluer un conflit grave pourraient être utilisés.
Peut-être, les maires pourraient-t-ils servir de médiateurs et associer à cette médiation les Préfets, les commerçants, des citoyens, des syndicats…
Quelques extraits de contributions et du dialogue noué
« …la proposition des maires en tant que médiateurs est bonne, parce qu’ils connaissent mieux leur commune et ses habitants. L’intérêt de ce mouvement est qu’il est justement apolitique, donc vrai. Les leaders locaux et proches du peuple sont certainement un meilleur choix pour le dialogue que les journalistes parisiens des plateaux de télévision et les élus qui trônent à Paris. L’idée d’un comité de citoyens, local, est également une bonne idée je trouve…Et que tout le dialogue se rende bien aux oreilles attentives du gouvernement, bien entendu. »
« …Si l’on convient que la situation de violence et de non-dialogue est inacceptable … alors il faut bien chercher des solutions. Et cette responsabilité ne revient-elle pas à l’exécutif ? »
« Pourquoi (cette responsabilité) reviendrait-elle à l’exécutif uniquement ? Un dialogue s’établit entre 2 parties. Les solutions doivent être trouvées par les protagonistes. Et il me semble bien qu’il y avait eu un début de rencontre à Matignon entre 8 personnes se réclamant des GJ mais qui ont été aussitôt rejetées par d’autres GJ, car non représentatifs du mouvement. Les différentes chapelles n’ont pas su ouvrir le dialogue. »
« Il est vrai que les gilets jaunes ont une responsabilité, mais s’agissant d’une manifestation de colère multiforme, elle aurait du mal à coordonner une initiative de dialogue et d’apaisement. Dans nos institutions, c’est l’État, et en l’occurrence le Gouvernement, qui est en charge de la paix et de la sécurité. Il a aussi une responsabilité d’écoute et de dialogue avec ceux qui s’expriment dans l’espace démocratique.
Le débat se poursuit, à bientôt pour une suite N°2.
Nous reprenons ci-contre le raisonnement de B.H. LEVY sur cette question dans un article des Echos déjà ancien
B.H. LEVY présente deux solutions :
- « Ou bien on accompagne le mouvement social, on l’aide à trouver sa traduction républicaine et on travaille loyalement à améliorer le sort des déshérités. »
- « Ou bien on se moque de leur misère, on joue avec la vie et la dignité des gens et on fait des petites phrases. »
Prudent, il évoque peu l’exécutif actuel qui semble pourtant – implicitement – visé par la première solution . Il évoque davantage certaines élites, plutôt les extrêmes, qui choisiraient la seconde voie.
B.H. LEVY tient à préciser par ailleurs qu’il ne parle pas « des intellectuels qui, comme Emmanuel Todd ou Christophe Guilluy, expliquent tout par le fossé entre la France d’en haut et la France d’en bas, la France périphérique et la France des métropoles, etc. »
Fin de l’interview de B.H. LEVY :
« Quels sont, selon vous, les points communs à ces populismes antieuropéens ?
C’est la troisième grande crise, depuis un siècle, de l’idée démocratique. Il y a eu celle de l’affaire Dreyfus. Celle des années 1930. Et celle, aujourd’hui, sur le même fond de haine et de violence, des illibéraux hongrois, des « gilets jaunes » français et des branquignols italiens (Salvini, Di Maio…) qui s’en servent comme d’un levier pour tenter d’affaiblir la France. Le point commun entre les trois périodes, c’est l’idée que la démocratie représentative est un modèle périmé, qui a produit tout ce qu’il pouvait produire et qui doit être dépassé. Or, il n’y a, historiquement, qu’un « dépassement » de la démocratie – et c’est le totalitarisme.
Mais la démocratie n’est-elle pas, tout de même, malade ?
Si, bien sûr. Mais c’est son état naturel. C’est même la vraie différence avec le totalitarisme. Lui, le totalitarisme dit : « Je vais bien, tout va bien, j’ai trouvé la formule de la bonne société. » Alors que l’honneur du démocrate est de répondre : « Ça va mal ; ça pourrait aller mieux ; le lien social est toujours, par définition, mal noué et donc je le renoue. » J’ajoute qu’il y a cette nouvelle sacralisation du peuple, qui est une autre maladie de la démocratie. Jamais un Constant, un Tocqueville, même un Rousseau, même un révolutionnaire de 89, même un Robespierre, n’aurait dit : « La démocratie, c’est la souveraineté du peuple. » C’est, en partie, ça, bien sûr. Mais à la condition que ce souverain-ci, comme n’importe quel autre souverain, consente à limiter ses pouvoirs, à se plier à des lois fondamentales, à respecter les minorités, etc.
Comment relancer l’Europe, comme vous le souhaitez ?
En ayant le courage, déjà, d’opérer une vraie révolution copernicienne. Regardons les enjeux nouveaux. Le climat, par exemple. L’argent fou. La question de l’hospitalité due aux migrants. Les attaques dont nous sommes l’objet de la part des empires russes, chinois, ottoman, perse et arabe en train de se réveiller. Pour aucun de ces enjeux l’Etat-nation ne reste le cadre de délibération et de décision adéquat. Pour aucun, les ripostes, les résistances, ne peuvent se faire autrement qu’au niveau de l’empire européen au sens où l’entendaient Dante et Machiavel. La bonne agora, en d’autres termes, est aujourd’hui à Bruxelles. Eh oui ! Ça ne veut pas dire que Bruxelles marche bien. Et il y a, évidemment, un énorme travail de démocratisation à opérer. Mais ça veut dire qu’il faut sauver Bruxelles ou mourir. Construire l’Europe ou voir revenir les guerres, les tyrannies, la grande misère.
Vous plaidez donc pour une Europe fédérale.
Bien sûr. Prenez l’invention de la monnaie unique. Il y a deux précédents qui ont marché : la lire et le franc suisse, au milieu du XIXe siècle, parce que l’unité politique s’est faite en même temps que l’unité monétaire. Il y en a deux qui se sont fracassés : l’Union latine et l’Union scandinave, parce que les politiques fiscales, les budgets, créaient des « spreads » insupportables qui ont explosé avec la crise de 1929. Et puis vous avez le dollar qui, contrairement à ce qu’on croit souvent, n’a vraiment triomphé de la myriade de louis, francs, et autres thalers qui lui faisaient concurrence qu’avec la guerre de Sécession et la victoire des fédéralistes sur les confédérés. Alors, l’euro, c’est pareil. Il est solide. Il a sauvé la Grèce, par exemple, des démagogues. Mais, sans un grand bond en avant dans le sens de l’union politique, la digue finira par céder.
Pour autant, les peuples sont toujours enclins à se méfier de l’Europe.
Parce que les pro-européens eux-mêmes, ceux qui devraient porter haut les couleurs de l’Union, sont trop timides, trop silencieux. C’est même la raison profonde de cette tournée dans laquelle je me lance. Je veux leur dire, à ces Européens découragés : « Battez-vous, croyez-y, vous aussi devez reprendre la parole. »
Propos recueillis par Nicolas Barré et Daniel Fortin.