
PRESENTATION
Le Centre Albert Hirschman pour la Démocratie
est activement impliqué dans la « Semaine de la Démocratie » qui est promue chaque année par la Chancellerie d’État de Genève.
Le thème de cette année est «Démocratie et alter-démocratie ». L’objectif est d’explorer la participation politique et l’activisme civique en dehors du domaine institutionnel formel, en abordant des questions telles que:
- Pourquoi les citoyens descendent-ils dans la rue pour tenir les gouvernements responsables au lieu d’utiliser uniquement les urnes?
- Comment la voix peut-elle être mobilisée et entendue dans les régimes autoritaires doux qui sont le nouveau visage des gouvernements majoritaires élus dans le monde?
Le concept de « contre-démocratie » ou « d’alter-démocratie »
a émergé au début des années 2000 et définit la forme de démocratie qui fait acte de défiance vis-à-vis de la démocratie traditionnelle issue des urnes. Aujourd’hui, on ne peut que constater l’existence de cette mouvance, qui réunit tous les mouvements sociaux, y compris ceux de désobéissance civile tels que les grèves pour les femmes, les mouvements dénonçant les violences policières aux Etats-Unis ou encore le mouvement des gilets jaunes en France.
Depuis 2019, la défense du climat est devenue le thème incontournable des agendas médiatiques et politiques avec, notamment, toutes les grèves pour le climat organisées à travers la planète mais également l’action inédite du collectif français de l’Affaire du siècle qui a assigné l’État français en justice pour inaction face aux changements climatiques.
Entretien avec Pierre Rosanvallon
Pour lancer le programme du Centre Albert Hirschman sur la Démocratie pendant la Semaine de la démocratie à Genève, dont le thème porte cette année sur la « Démocratie et alter-démocratie : quand la démocratie non-conventionnelle concurrence la démocratie conventionnelle », Alexandre Lercher, alumnus de l’IHEID et doctorant à Paris-Dauphine, a rencontré le théoricien du concept de « contre-démocratie », l’historien et politologue Pierre Rosanvallon.
Pierre Rosanvallon est historien et sociologue. Ses travaux portent principalement sur l’histoire de la démocratie et du modèle politique français ainsi que sur le rôle de l’État et la question de la justice sociale dans les sociétés contemporaines. Ils ont été traduits dans vingt-deux langues et édités dans vingt-six pays. Pierre Rosanvallon occupe depuis 2001 la chaire d’histoire moderne et contemporaine du politique au Collège de France tout en demeurant directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS). Liant son travail universitaire à une attention constante pour les urgences du présent, Pierre Rosanvallon est également actif dans la cité pour tenter d’éclairer l’actualité par les apports des sciences sociales.
VOIR NOTRE PUBLICATION D’HIER:
Emmanuel Macron porte une vision «limitée» et «simpliste» de la démocratie, estime l’historien et sociologue. Le pouvoir actuel connaît un lourd déficit de légitimité et peine à s’appuyer sur de nouveaux outils d’expression démocratiques pour y répondre.
Notre question: Contre-démocratie ou démocratie-négative ?
Comment éviter une dérive vers une démocratie négative, la démocratie du veto, du refus, de l’agressivité ? et la montée en puissance de la violence verbale et physique ?
D’où l’urgence de
- revenir à la démocratie du dialogue, de la participation, de l’équilibre des pouvoirs, de l’efficience de l’action, tout en
- la renouvelant ( participation citoyenne ) et
- la modernisant ( modalités d’expression, de communication, de vote )
ENTRETIEN Avec Pierre Rosanvallon – VIDEO
QU’EST-CE QUE LA CONTRE-DÉMOCRATIE ?
ALBERT HIRSCHMAN CENTRE ON DEMOCRACY 05 October 2020 Alexandre Lercher
L’entretien aborde les sujets clés qui seront développés pendant la semaine à travers les différents évènements du programme, notamment : contre-démocratie et mouvement pour le climat, contre-démocratie et violence politique, légitimité de proximité, genre et représentation politique, et innovations démocratiques.
Dans l’interview, Pierre Rosanvallon suggère que « le terme même de contre-démocratie est un peu provocant » mais qu’il a un rôle bien précis : « de rappeler que la démocratie n’est pas simplement définie par ses institutions, elle n’est pas simplement définie par le vote, elle est définie aussi par la place des citoyens. » La contre-démocratie, continue-t-il, est une pièce essentielle de la lutte pour le climat, dans laquelle le rôle de surveillance et de pression sur les institutions par les citoyens est décisif.
Mais la contre-démocratie a une autre facette: « l’ombre de cette vision positive de la contre-démocratie, ça pourrait être la démocratie négative, la démocratie du veto, du refus, de l’agressivité ». Citant la campagne présidentielle de Donald Trump, qui « conçoit son camp comme le camp des blancs contre les minorités », Pierre Rosanvallon constate une montée de la violence politique, qu’il voit comme « un signe du malaise démocratique ». En effet, rappelle-t-il, « le rôle même de la démocratie c’est de substituer à la violence-même la capacité de discuter ».
VOIR LA VIDEO
1 réponse »