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Notre travail collectif – fidèle à NOTRE PROJET https://metahodos.fr/2020/04/19/notre-projet-synthese/ enrichit et « outille » les trois types de démocratie qui doivent selon nous se compléter: représentative, participative, directe…c’est à dire une démocratie continue.
Nous vous proposons notre BILLET un article de Frédéric Manzini relatif au dernier ouvrage de Chloé MORIN Le Populisme au secours de la démocratie ? Elle y analyse les « vrais périls » qu’affronte aujourd’hui la démocratie et qui soulèvent les passions populistes. « Au lieu de dénoncer celles-ci comme une menace, il faut savoir y lire un rappel de nos régimes à leur inspiration d’origine. »
NOTRE BILLET
D’où vient la crise qui paralyse lentement mais sûrement la démocratie et qui provoque en retour les sursauts populistes ?
Sur la base d’études approfondies de l’opinion, Chloé Morin dégage les principaux facteurs qui ont créé cette situation. Les règles du jeu politique ont changé sans que son personnel s’en soit avisé. La défiance des citoyens envers les pouvoirs s’est installée sans que ses sources soient véritablement saisies et combattues.
Le « séparatisme » fait des ravages, mais il n’est pas là où l’on croit. Il est d’abord le séparatisme des élites par rapport aux peuples et il est ensuite fait des tribus dont le numérique encourage la fermeture sur elles-mêmes. Tels sont les vrais périls qu’affronte aujourd’hui la démocratie et qui soulèvent les passions populistes. Au lieu de dénoncer celles-ci comme une menace, soutient Chloé Morin, il faut savoir y lire un rappel de nos régimes à leur inspiration d’origine.
Le populisme est une réaction à l’absence de choix », selon la politologue Chloé Morin
Nos sociétés sont en crise et, pour Chloé Morin, cette crise est principalement démocratique. En relevant symptômes et causes de ce malaise dans son dernier livre Chloé Morin réhabilite les exigences de la démocratie :
- réelles alternances politiques,
- respect des intérêts et aspirations de chacun,
- volonté de dépasser les conflits,
- capacité à définir un avenir commun.
Elle rappelle que la crise a rendu saillants de nombreux dysfonctionnements, tant sur le plan administratif que politique.
« La multiplication des règles tatillonnes, parfois inapplicables, a révélé la déconnexion des élites par rapport au terrain. Le recours à des cabinets de conseil extérieurs a souligné combien certaines compétences essentielles avaient disparu au sein même de l’Etat. Le traitement souvent réservé aux élus locaux ou aux oppositions, voire au Parlement, a démontré combien le pouvoir exécutif peinait à déléguer, à faire confiance, voire à simplement partager l’information. Le fait de confiner un pays entier ne devrait plus relever du simple bon vouloir présidentiel :le Parlement devrait être consulté. Il est temps de changer les institutions. » a-t-elle déclaré au Monde.
La domination de l’exécutif sur le Parlement
« L’inversion du calendrier électoral entre présidentielle et législatives a affirmé la domination de l’exécutif sur le Parlement. Le gouvernement est redevable au président. Et la majorité présidentielle, caporalisée. Le président est la clé de voûte du système, tire sa légitimité directement du peuple, mais finit enfermé dans un dialogue direct, sans intermédiaire, avec lui. Nous concentrons sur sa personne des attentes démesurées, qui sont forcément déçues au bout de quelques mois d’exercice du pouvoir. Ce n’est pas sain.«
Une crise qui sert de révélateur de dysfonctionnements antérieurs et profonds
« La crise éprouve notre capacité à décider en commun, à être et à faire ensemble. Or, en France, c’est cela qui dysfonctionne. Plus qu’une crise économique, sanitaire ou sociale, c’est à une crise démocratique à laquelle nous sommes confrontés. Démocratique au sens premier du terme : comment le peuple, demos, exerce le pouvoir, kratos, c’est-à-dire comment il prend des décisions, et comment il se construit un avenir commun. Depuis quelques années, nous assistons à une désolidarisation et à une tribalisation. »
ARTICLE
“Le Populisme au secours de la démocratie ?”
Frédéric Manzini publié le 16 février 2021 PHILOMAG
La démocratie n’a jamais été une affaire simple puisqu’elle est, par définition, traversée de tensions et d’oppositions. Mais il faut reconnaître que rarement dans l’histoire son exercice aura été aussi compliqué qu’aujourd’hui. Après le succès public rencontré par son précédent essai, Les Inamovibles de la République (Éditions de L’Aube, 2020), qui mettait en exergue le rôle considérable des hauts fonctionnaires au sein des ministères, Chloé Morin publie Le Populisme au secours de la démocratie ? (Gallimard, 2021).
La jeune politologue spécialiste de l’opinion publique, ancienne conseillère à Matignon, s’intéresse à cette anomalie politique que semble constituer l’émergence de mouvances populistes. Elle y voit pourtant l’expression d’une aspiration démocratique authentique mais insatisfaite.
- Des défis d’une ampleur inédite. Chloé Morin commence par dresser un état des lieux de la situation actuelle et des défis que doit relever le politique. Et ces défis sont nombreux ! Citons-en quelques-uns : les opinions se montrent de plus en plus volatiles d’une élection à l’autre et sont capables de se radicaliser alors même que les idéologies perdent en crédibilité. Le développement des réseaux sociaux court-circuite les médias et les partis traditionnels comme relais d’opinion. La défiance grandit à l’égard des institutions politiques. Le fossé se creuse entre représentants et représentés.
- Une nouvelle donne politique. Ces différentes tendances sont la plupart du temps étudiées isolément les unes des autres alors que réunies, elles modifient en profondeur nos pratiques de citoyens et le fonctionnement même de la démocratie : elles définissent ensemble une « nouvelle donne » politique et médiatique dont il s’agirait de prendre enfin la mesure. Mais nous sommes-nous adaptés à cette situation ? C’est ce dont doute Chloé Morin, qui s’appuie notamment sur le cas des Gilets jaunes pour montrer que « l’image et le symbole ont pris le pouvoir sur la statistique, bousculant ainsi l’analyse et le décryptage ».
- Où est passé le « nous » ? Un exemple frappant de cette désorientation actuelle vient de ce que, selon Chloé Morin, le « nous » semble avoir disparu devant la montrée de l’individualisme, la fragilisation économique et la disparition des « lieux qui créaient autrefois du commun » comme les colonies de vacances ou le service militaire. Or ni l’État, ni les partis, ni les syndicats ne parviennent à gérer la baisse de ce sentiment d’appartenance et cette « crise d’identité collective ». Les citoyens eux-mêmes se retrouvent démunis et sont tentés de choisir un « bouc-émissaire » pour cimenter un groupe. Ou alors, ils se victimisent pour mieux trouver leur place dans une société dont ils ont le sentiment qu’elle ne les reconnaît pas suffisamment.
- Le populisme comme « instinct de survie des démocraties en péril ». « Partout, si les peuples semblent se dresser contre la démocratie, s’attaquer au “système”, c’est – au moins en partie – que ce système ne joue plus son rôle »,diagnostique Chloé Morin. Elle prévient du danger qui consiste à déconsidérer certaines idées en les qualifiant de « populistes ». Et appelle à revenir au débat. Faute de quoi, « n’étant plus entendues », les demandes authentiquement démocratiques, comme celle d’une égalité réelle, « se radicalisent, et finissent par s’extrémiser ou par renoncer à s’exprimer ». Bref, entre les citoyens, et la démocratie, c’est un peu « je t’aime, moi non plus ».
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