
Le président de la République n’a toujours pas rendu publics les contrats du premier quinquennat ?
« Après un premier semestre marqué par des controverses sur le recours aux cabinets de conseil et alors que le Conseil national de la refondation s’ouvre à Marcoussis (Essonne), une des zones d’ombre de la République perdure : la transparence des contrats publics de l’Elysée fait toujours défaut.
« En effet, malgré un avis favorable de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) en avril, l’Elysée n’a toujours pas rendu publics les contrats du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. »
Peut on lire dans Le Monde, à l’occasion d’une tribune qui propose de donner un sens juridique réel – par la mise en œuvre d’une sanction – aux décisions de la CADA.
VOIR NOTRE PUBLICATION D’HIER :
La transparence doit s’imposer à tous les responsables publics https://metahodos.fr/2022/10/09/transparence/
LES PUBLICATIONS ANTÉRIEURES DE METAHODOS :
CABINETS CONSEIL – SUITE : L’ÉLYSÉE RETIENT LES CONTRATS DU QUINQUENNAT PASSÉ https://metahodos.fr/2022/09/07/cabinets-de-conseil-lelysee-tarde-a-rendre-publics-les-contrats-du-premier-quinquennat-macron/
CABINETS CONSEIL : DE NOUVELLES RÈGLES, ET RIEN NE CHANGE ? DOSSIER. https://metahodos.fr/2022/09/05/cabinets-de-conseil-pourquoi-les-nouvelles-regles-ne-changent-pas-le-probleme/
ARTICLE EXTRAIT
« Dotons la Commission d’accès aux documents administratifs d’un véritable pouvoir de sanction à l’encontre de l’administration »
Raphaël Maurel Maître de conférences en droit public LE MONDE 15 SEPTEMBRE 2022
Afin de lutter contre la culture de l’obscurité de l’administration française, le spécialiste de droit et d’éthique publics Raphaël Maurel propose, dans une tribune au « Monde », de donner davantage de pouvoirs et de moyens à la Commission d’accès aux documents administratifs.
Après un premier semestre marqué par des controverses sur le recours aux cabinets de conseil et alors que le Conseil national de la refondation s’ouvre à Marcoussis (Essonne), une des zones d’ombre de la République perdure : la transparence des contrats publics de l’Elysée fait toujours défaut. En effet, malgré un avis favorable de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) en avril, l’Elysée n’a toujours pas rendu publics les contrats du premier quinquennat d’Emmanuel Macron.
Au-delà de la responsabilité éthique et politique de la présidence de la République face à cette demande légitime, c’est la question des compétences et du rôle de la CADA qui est posée. La loi du 17 juillet 1978 a en effet consacré un droit d’accès aux documents administratifs de l’Etat au bénéfice de tout citoyen, sous réserve d’exceptions telles que le secret-défense, le droit au respect de la vie privée ou encore le secret médical. En cas de refus de l’administration de transmettre le document demandé, tout citoyen peut saisir la CADA. Cette commission, instituée précisément pour veiller au respect de ce droit d’accès, a notamment compétence pour rendre des « avis » et statuer sur le caractère communicable, ou non, du document requis auprès de l’administration.
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C’est ici que le bât blesse : la CADA, toute autorité administrative indépendante qu’elle soit, n’a aucun pouvoir de contrainte sur l’administration. Si elle peut l’inviter à communiquer le document, elle ne peut ni lui enjoindre de le faire ni la sanctionner en cas de silence. Autrement dit, lorsqu’une administration refuse, malgré un avis favorable de la CADA, de communiquer le document, les citoyens n’ont d’autre choix que celui d’engager une procédure contentieuse lourde, complexe et souvent longue devant un tribunal administratif. Cette perspective décourage nombre d’entre eux et grève profondément l’effectivité du droit d’accès aux documents administratifs.
Obscurité administrative
Le suivi des avis favorables de la CADA est également un sujet épineux. En témoigne la page désespérément vide consacrée au « Suivi des avis de la CADA » sur son site, qui demeure « en cours de construction » depuis des années… Malgré l’obligation théorique qui pèse sur l’administration d’informer la commission des suites qu’elle entend donner à l’avis, le rapport 2021 de la CADA relève que moins des deux tiers des administrations (61,5 %) font effectivement suite. Alors que journalistes, parlementaires et universitaires n’ont de cesse de réclamer des documents que cette autorité administrative a pourtant déclarés communicables, l’administration a tout loisir d’indiquer qu’elle n’entend pas donner de suite favorable à la demande. Le même rapport indique ainsi que, parmi les réponses adressées, 69,6 % seulement des administrations font part de leur intention de suivre l’avis de la commission… laquelle relève au passage que « ce taux est en baisse constante depuis cinq ans, ce qui ne peut qu’être déploré ». Il est donc urgent d’agir.