
MC KINSEY ET LES CABINETS CONSEIL :
RELIRE CERTAINES DES PUBLICATIONS DE METAHODOS – LES ENTRETIENS DE LA MÉTHODE, EN FIN D’ARTICLE
« Pendant l’été, l’Etat passe un nouveau contrat avec McKinsey »
Titre LIBERATION qui poursuit :
« Le cabinet de conseil américain, qui fait l’objet d’une enquête du Parquet national financier pour « blanchiment aggravé de fraude fiscale », s’est pourtant vu attribuer en juillet un important contrat de conseil en stratégie par un organisme public, l’UGAP. Révélations
« Le 12 juillet, au cœur de l’été, l’Union des Groupements d’Achats publics (UGAP), la centrale d’achat de l’Etat, a passé un méga marché de 375 millions d’euros avec une quinzaine de sociétés de consultants pour des conseils en stratégie, organisation, finance et immobilier. Surprise, parmi les entreprises retenues figure la société McKinsey.
Le scandale McKinsey va-t-il tourner à l’affaire d’Etat ?
« La « Firme », qui n’a payé aucun impôt en France entre 2011 et 2020 – comme l’avait révélé en mars une commission d’enquête du Sénat –, est pourtant visée par une enquête préliminaire ouverte le 31 mars par le Parquet national financier pour « blanchiment aggravé de fraude fiscale ». Le 24 mai, son bureau français, situé au 90, avenue des Champs-Elysées, à Paris, a même été perquisitionné.
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NOUS VOUS PROPOSONS TROIS ARTICLES :
- Ce que l’on sait de ce nouveau contrat entre un organisme public et le cabinet de conseil McKinsey
- Cabinets de conseil : pourquoi les nouvelles règles ne changent pas le problème
- L’UGAP met sur les rails un marché de conseil à 375 millions d’euros
ARTICLE 1
Ce que l’on sait de ce nouveau contrat entre un organisme public et le cabinet de conseil McKinsey
Par Maxence Lambrecq Publié le vendredi 2 septembre 2022 RADIO FRANCE
Le cabinet de conseil américain McKinsey, visé par une enquête pour « blanchiment aggravé de fraude fiscale », vient d’être sélectionné dans le cadre d’un marché public dont le montant maximal est de 75 millions d’euros. Un procédure légale mais qui fait grincer des dents le gouvernement.
Peut-on parler d’un nouveau rebondissement dans l’affaire McKinsey ? Les dernières révélations de l’Obs, qui a découvert que le cabinet de conseil américain avait été sélectionné par un organisme public peu connu, l’Union des groupements d’achats publics (Ugap), pour un marché, le laissent penser. Le montant est effectivement impressionnant : 75 millions d’euros, sur quatre ans. Un montant maximum pour lequel les cabinets sélectionnés, dont McKinsey, se partageront le gâteau.
Mais cette fois-ci, McKinsey ne pourra pas se servir en premier : le cabinet ne récupèrera des contrats que si les autres entreprises se disent « défaillantes » pour remplir la mission demandée – elles sont dites au « premier rang », McKinsey au second.
Le code des marchés publics respecté
L’Ugap est un organisme au service des collectivités, des opérateurs de l’État. C’est une grande plateforme d’achat pour les collectivités, un organisme autonome rattaché à Bercy mais sans tutelle, donc sans lien direct avec le gouvernement : « Ils gèrent leurs affaires comme ils l’entendent« , assure un conseiller ministériel.
Et dans le cadre de cette affaire, l’Ugap et le cabinet McKinsey a bien respecté le code des marchés publics : le cabinet a fourni une attestation fiscale valide, et n’est sous le coup d’aucune condamnation. L’enquête qui le concerne, ouverte il y a cinq mois, peut d’ailleurs encore durer longtemps.
Le nom de McKinsey devenu un « chiffon rouge »
Mais cela agace tout de même le gouvernement, parce que McKinsey est devenu un chiffon rouge dans l’opinion. Peu importe où son nom apparaît, cela vient alimenter le feuilleton. Cet été, de nouvelles règles ont été fixées pour réduire de 15% les dépenses de conseil en stratégie dans les ministères.
Mais en janvier, le gouvernement devra choisir ses nouveaux prestataires pour les quatre prochaines années. A coup sûr, McKinsey sera candidate : « Le choix ne sera pas que technique« , soupire un fidèle du chef de l’Etat, « et une réflexion est en cours pour que toute la sphère publique soit sur la même ligne«
ARTICLE 2
Cabinets de conseil : pourquoi les nouvelles règles ne changent pas le problème
Affaire McKinsey
Par Pierre Lann Marianne Publié le 29/07/2022
Le gouvernement a publié le 29 juillet un encadrement de certaines missions confiées aux cabinets de conseil. Parmi les mesures phares, la limitation du montant des prestations à 2 millions d’euros. Un faux verrou qui évite de s’attaquer aux problèmes de fond.
Il n’y aura plus d’affaire McKinsey assure le gouvernement. De nouvelles règles sont publiées, ce vendredi 29 juillet, pour encadrer certaines missions confiées aux cabinets de conseil par les ministères. Pour remédier au « flou » qui régnait jusque-là, Stanislas Guérini promet « un cadre largement défini dans ses principes et dans ses montants », compris dans un accord-cadre pour la période entre 2023 et 2027. Le ministre de la Transformation et de la Fonction publiques avance une mesure phare : le montant maximum par mission est fixé à 2 millions d’euros. Le recours au même prestataire privé sera aussi limité à deux contrats consécutifs.
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Premier problème, très peu de prestations de conseil dépassent le plafond fixé. Selon le rapport de la commission d’enquête sénatoriale, qui s’est penchée sur l »emprise « tentaculaire » des cabinets de conseil sur les politiques publiques, le coût annuel moyen d’une prestation est généralement très inférieur à 2 millions d’euros. Il oscille entre 966 euros pour une expertise en assurance à 84 077 euros pour de l’audit et du conseil en stratégie. Cette limitation ne concernerait donc qu’une petite dizaine de prestations par an. À titre de comparaison, les ministères d’État ont passé 1 600 contrats depuis 2015, pour un montant global de plus en plus important.
RÉDUCTION DES DÉPENSES EN TROMPE-L’ŒIL
Sur ce point, le gouvernement assure aussi vouloir réduire les vannes. Le budget prévu sera de 150 millions d’euros pour les « conseils en stratégie, en cadrage, conduite de projets et en efficacité opérationnelle »entre 2023 et 2027. Beaucoup moins que les 226 millions d’euros dépensés lors de la précédente période (2018-2022), explique l’exécutif. Sauf que le nouvel accord-cadre prévoit tout de même qu’en cas de « situation particulière, crise ou difficultés majeures, le montant maximal sera plafonnée à 200 millions d’euros ».
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Dans cette hypothèse, le gouvernement ne respecterait pas l’objectif de réduction de 15 % des dépenses qu’il s’est lui-même fixé au début de l’année. La réduction ne serait que de 11,5 %. Il faut aussi préciser que ce budget ne représente pas l’ensemble des dépenses en cabinets de conseil des ministères. Les prestations informatiques, qui représentent 72 % des dépenses en 2021, ne sont ainsi pas concernées par ces nouvelles règles. Au total, la commission d’enquête sénatoriale estime que les ministères ont dépensé près 893 millions d’euros en prestations de conseil en 2021.
MANQUE D’ÉVALUATION DES BESOINS ET DES RESSOURCES
« Le gouvernement pose la question dans les mauvais termes. Le problème ne réside pas forcément dans les montants qui sont dépensés. Ce qui est important c’est que l’État fasse la démonstration qu’il a vraiment besoin de ces prestations et de leur intérêt », estime le professeur de droit public Jean-François Kerléo, auteur d’une note sur le sujet pour l’Observatoire de l’éthique en politique, interrogé par Marianne. La commission d’enquête sénatoriale abondait dans le même sens en préconisant de « cartographier les compétences au sein des ministères » et d’entamer « un plan de réinternalisation pour mieux valoriser les compétences internes et moins recourir aux cabinets de conseil ».
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En clair, n’utiliser les cabinets de conseil que de manière exceptionnelle, pour des besoins clairement définis, et non d’y recourir de manière presque automatique comme la commission d’enquête l’a démontré. Les nouvelles règles proposées par le gouvernement ne prévoient pas d’évaluation profonde des compétences de l’administration. Mais elles inaugurent tout de même une « évaluation » de la qualité de la prestation à l’issue de sa réalisation. En cas de « notes d’évaluation trop faibles ou de non-respect des obligations contractuelles » des pénalités sont prévues et seront renforcées, assure le gouvernement.
IDÉOLOGIE
Au fond, si le gouvernement semble avoir tant de mal à se détacher de l’expertise des consultants c’est que le « réflexe cabinet de conseil » est aussi guidé par un biais idéologique selon Jean-François Kerléo. « Les élus et les ministres commandent une prestation pour avoir les résultats qu’ils attendent et qui tendent souvent à pousser par exemple vers des suppressions de postes. Ils ne sollicitent pas les agents de l’administration, parce qu’ils savent qu’ils n’aboutiront pas au même résultat », considère le professeur de droit public.
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Dans sa note, celui-ci préconisait une réforme technique mais radicale pour empêcher le recours indu aux cabinets de conseil : interdire le recours aux accords-cadres, que la commission d’enquête appelait à « rationaliser ». Ce type d’accord permet de simplifier les procédures et d’éviter de multiplier les appels d’offres. L’acheteur public s’engage par avance à passer des marchés auprès de prestataires. « Le gros souci, c’est que cela n’amène pas à déterminer à l’avance quels sont les besoins et cela donne un blanc-seing aux prestataires », explique Jean-François Kerléo.
MAIGRES AVANCÉES DÉONTOLOGIQUES
Au-delà, ces nouvelles règles prévoient des avancées en matière de transparence. Alors que la commission d’enquête sénatoriale dénonçait « l’opacité » des contrats passés, désormais l’intitulé, le commanditaire, le prestataire et le montant seront publiés. Mais seulement à l’issue de la mission. Le rendu de la prestation devra aussi utiliser la charte graphique du cabinet de conseil, et non plus celui de l’administration comme c’était parfois le cas, ce qui renforçait l’opacité des prestations réalisées.
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Des avancées déontologiques sont aussi prévues, mais elles sont toutes relatives. « Les consultants devront attester sur l’honneur ne pas être en situation de conflit d’intérêts en amont d’une prestation », prévoit le gouvernement. « On est donc obligés de faire confiance à la personne, qui n’a pas l’obligation de mentionner ses intérêts, qui restent donc opaques. Il faudrait mieux imposer une déclaration d’intérêts pour avoir connaissance des questions de pantouflage et de rétro pantouflage », insiste Jean-François Kerléo.
ARTICLE 3
L’UGAP met sur les rails un marché de conseil à 375 millions d’euros
14/12/21 CONSULTOR
Sept cabinets ont été sélectionnés pour le lot de conseil en stratégie d’un montant initial de 25 millions d’euros et dont la valeur pourra aller jusqu’à 75 millions d’euros. En parallèle, trois lots de conseil en organisation, finance ou immobilier ont été attribués.
L’Union des groupements d’achats publics (UGAP), qui centralise auprès de ministères, collectivités territoriales et établissements hospitaliers, les commandes à des centaines de fournisseurs, vient de rendre publics les sept cabinets de conseil sélectionnés pour accompagner les réflexions stratégiques des clients de la centrale sur les prochaines années.
Et ce, avec quelques mois de retard que le contexte de polémique autour du recours aux cabinets de conseil dans le secteur public en France explique très probablement. L’UGAP avait en effet lancé le 22 octobre 2021 le renouvellement du marché. Il devait clôturer en décembre 2021, et les attributaires être connus en avril 2022. Le marché aura finalement été conclu en juillet et l’attribution publiée le 13 août.
« Quand c’est complexe, 23 114 euros » : le prix du conseil à l’UGAP
Trois ans après que l’Union des groupements d’achats publics (UGAP), qui centralise auprès de ministères, collectivités territoriales et établissements hospitaliers, les commandes à des centaines de fournisseurs, avait lancé son premier marché de conseil en stratégie d’une valeur de 12 millions d’euros, son directeur a détaillé au Sénat comment ils sont dépensés.
Ainsi que Consultor l’avait annoncé (relire notre article), PwC est le mandataire du marché. Trois cotraitants sont sélectionnés avec lui : l’ADIT, Havas Paris et Landot & associés. Des noms qui peuvent surprendre sur un lot de conseil en stratégie dont ils ne sont a priori pas des spécialistes.
Tous quatre pourront intervenir seul ou ensemble sur des sujets tels que l’accompagnement des 100 premiers jours des nouveaux maires (comme ce fut le cas lors du précédent marché – voir notre article), ou sur la stratégie de vente en ligne de l’UGAP, la centrale ayant eu elle-même recours aux services de McKinsey.
Ces quatre cabinets sont au rang 1 du marché, c’est-à-dire qu’ils auront la primeur de toutes les missions de conseil en stratégie via l’UGAP. Puis viendront les cabinets de rang 2, en cas de défaillance au rang 1.
Au rang 2, on retrouve McKinsey et Eurogroup, des noms plus familiers en matière de conseil en stratégie dans le secteur public. Le cabinet d’avocats Seban & Associés est également retenu.
Lors du précédent marché (2019-2022), McKinsey (mandataire) et Eurogroup Consulting (cotraitant) avaient été choisis au rang 1 du lot de conseil en stratégie. Avaient également été retenus au rang 2 Ernst & Young Advisory en tant que mandataire, et le Boston Consulting Group et KPMG comme cotraitants. Roland Berger avait été retenu au rang 3.
McKinsey et Eurogroup restent donc présents sur le nouveau marché mais au rang 2 – et exit tous les autres.
Les prestations de conseil sont plutôt récentes pour l’UGAP, la centrale qui a été créée en 1968. En 2012, elle a lancé son premier marché de prestations intellectuelles informatiques. En 2016, elle lançait un marché de conseil en organisation (dont Eurogroup était mandataire). Un dernier marché qu’elle reconduisait en 2019 en le divisant en quatre segments : conseil en organisation, conseil immobilier, conseil financier et conseil en stratégie.
Les prestations intellectuelles et les prestations intellectuelles informatiques représentaient 207 millions d’euros d’achats via l’UGAP en 2018, sur un total de 3,39 milliards d’euros d’achats. Dans cet ensemble, le marché de conseil en organisation confié à Eurogroup en 2016 jusqu’en 2019 cumulait 17 millions d’euros de commandes par an (soit 8 % des prestations intellectuelles et les prestations intellectuelles informatiques).
En 2020, les prestations intellectuelles et les prestations intellectuelles informatiques représentaient 253 millions d’achats, toujours via l’UGAP. Sur ce montant, seulement 50 millions sur le conseil en stratégie, organisation, finance et immobilier (19 % du total des prestations intellectuelles). Dans cet ensemble, le conseil en stratégie restait ultra marginal, avec 12 millions d’euros sur quatre ans.
Le nouveau marché attribué mi-août marque un doublement avec un montant minimal de 25 millions d’euros.
RELIRE CERTAINES DES PUBLICATIONS DE METAHODOS – LES ENTRETIENS DE LA METHODE
AFFAIRE MC KINSEY / AFFAIRES DE L’ETAT – suite. https://metahodos.fr/2022/03/23/affaire-mc-kinsey-suite/
Cabinets conseils et Action Publique. Excès de pouvoir ? https://metahodos.fr/2021/10/13/cabinets-conseils-et-action-publique-exces-de-pouvoir/
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