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LES PROCUREURS GÉNÉRAUX RÉCLAMENT LA SUSPENSION DE LA RÉFORME DE LA POLICE

NOTRE RÉCENTE PUBLICATION, ET LES LIENS VERS LES PRÉCÉDENTES :

« FUREUR, DÉSESPÉRANCE, RÉVOLTE » : LA RÉFORME DE LA PJ DANS LE MUR ? MISE A JOUR https://metahodos.fr/2022/10/10/mise-a-jour-colere-et-desesperance-revolte-la-reforme-de-la-pj-dans-le-mur/

UNE OPPOSITION SANS NUANCES

Ils estiment que la projet «nuirait durablement à l’efficacité» de l’institution.

« La criminalité organisée n’est pas soluble dans la lutte contre la petite délinquance de proximité ». La Conférence nationale des procureurs généraux l’a rappelé mardi, en exigeant solennellement la suspension immédiate de la réforme de la police, «s’agissant de son volet qui concerne la police judiciaire et uniquement celui-là», a précisé Frédéric Fèvre, procureur général de Douai et président de la Conférence.

Le projet de Gérald Darmanin de redéfinir l’organisation de la police nationale, fait monter en pression les magistrats. Leurs rencontres successives, mardi, avec Éric Dupond-Moretti, le garde des Sceaux, puis avec Frédéric Veaux, le directeur général de la police nationale, ne les ont pas rassurés, puisque les hauts magistrats ont décidé de fixer «des lignes rouges» à une réforme en cours d’expérimentation. À commencer par une petite question de principe: celle de l’article 66 de la Constitution… ARTICLE 1

Alors que la réforme de la police judiciaire fait des remous en interne, les sénateurs qui débattent actuellement de la loi de programmation et d’orientation du ministère de l’Intérieur ne semblent pas convaincus. La gauche se montre très critique, mais à droite de l’hémicycle aussi, les orientations proposées par le ministre de l’Intérieur les laissent circonspects. ARTICLE 2

1. ARTICLE

Les procureurs généraux réclament la suspension de la réforme de la police nationale

Publié le 11/10/2022 Olivia Dufour ACTUJURIDIQUE

Jamais sans doute un projet de réforme n’avait à ce point suscité un rejet unanime du monde judiciaire. Même les très discrets procureurs généraux ont décidé d’exprimer publiquement leur position à l’égard du projet de réorganisation de la police nationale à l’occasion d’une conférence de presse organisée ce mardi. Photo : ©Gérard Bottino/AdobeStock

« On n’est pas des pétroleuses, confie à la sortie l’un des participants à la conférence générale des procureurs généraux, si on s’exprime publiquement, c’est que les enjeux sont vraiment importants ». Et en effet, les procureurs généraux n’ont guère l’habitude de prendre la parole dans les médias. C’est pourtant ce qu’ils ont décidé de faire ce mardi soir, à l’issue de la réunion de leur Conférence à Paris.

Des assurances au plus haut niveau…

L’objet de leur inquiétude ? La réforme de la police judiciaire envisagée par le gouvernement. Le projet consiste à réunir police administrative et police judiciaire, à l’échelon départemental, sous l’autorité du préfet. Et donc à soustraire la police judiciaire à l’autorité et au contrôle des procureurs généraux. À l’occasion de leur réunion à Paris les 10 et 11 octobre, les procureurs généraux ont reçu des assurances, tant du garde des Sceaux que du directeur de la police. Eric Dupond-Moretti s’est dit attentif à ce que la police judiciaire demeure sous l’autorité de la justice et que soit maintenu le libre choix par le juge des équipes avec lesquelles il travaille. L’échelon supra départemental devrait aussi être conservé. Quant à Frédéric Veaux, Directeur Général de la Police Nationale (DGPN), il les a assurés que les réflexions étaient menées en concertation avec le ministère de la Justice.

…qui ne dissipent pas les craintes

Seulement voilà, les enjeux sont tels que les procureurs généraux attendent des garanties écrites. D’ici là, ils réclament la suspension du projet de réforme de la police nationale en avançant deux critiques de fond.

D’abord la question de principe. Pour la Conférence en effet, ce projet constitue une  « remise en cause de la place accordée à l’autorité judiciaire gardienne de la liberté individuelle dans un état de droit ». Ensuite, l’enjeu pratique. Il s’agit ni plus ni moins de préserver une police très spécialisée et compétente pour continuer à lutter efficacement contre la grande délinquance. Or,  les remontées d’expérience menées dans les départements où  la réforme est testée (Pas-de-Calais, Pyrénées-Orientales et Savoie à l’origine avec une extension incluant Calvados, Hérault, Oise, Puy-de-Dôme et Haut-Rhin) sont négatives. Comme ils le craignaient, il est arrivé que l’on confie à cette police ultra-spécialisée des missions d’ordre public. Mais leur grande inquiétude relève surtout du principe des vases communicants. La police administrative manque de moyens et d’effectifs, de sorte qu’inéluctablement la réunion des deux polices sous une autorité commune aura un impact sur l’allocation des ressources. En clair, on va déshabiller la police judiciaire pour habiller une police administrative en difficulté. Et donc en quelque sorte casser un corps d’élite, le dissoudre dans une fonction de police indifférenciée et perdre l’expertise professionnelle et les moyens nécessaires à la lutte contre la grande criminalité.

La réforme figure en annexe du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieurl dont l’examen a commencé début octobre au Sénat. Les différentes études et inspections en cours sur le sujet particulier de l’organisation de la police nationale donnent à penser que rien ne sera prêt à être formalisé dans un texte avant 2023. Mais cela ne veut pas dire qu’au détour d’un article du projet de loi, il n’est pas possible d’adopter une disposition qui validerait la réforme, renvoyant ensuite à des dispositions réglementaires ultérieures l’organisation effective de sa mise en place. L’examen du projet sera donc être suivi avec attention.

Pour tout savoir du projet de réforme, consulter notre dossier ici.

2. ARTICLE – VIDÉO

« Dangereuse », « mal engagée » … La réforme de la police judiciaire a du mal à convaincre au Sénat

Par Louis Mollier-Sabet PUBLIC SENAT

Le torchon brûle entre Gérald Darmanin et la police judiciaire. Une fois n’est pas coutume, pour un ministre qui a fait de la défense de l’institution policière un axe de son action, la grogne vient cette fois de l’Intérieur. Vendredi dernier, le directeur de la police judiciaire de Marseille, Éric Arella, a été limogé après une manifestation de policiers marseillais contre la réforme de la « PJ » à l’occasion d’une visite du directeur général de la police nationale, Frédéric Veaux. Dimanche, dans Le Parisien, Gérald Darmanin a estimé que « le lien de confiance » entre Frédéric Veaux et Éric Arella « était rompu » et que « certaines limites ne [devaient] pas être franchies » : « Quand des policiers manifestent pendant leurs heures de service, dans leurs locaux, en utilisant leur matériel et pour certains le visage masqué, ces limites sont franchies. Les images étaient choquantes. » Face à la fronde, le ministre de l’Intérieur a même écrit à tous les policiers relevant de la direction centrale de la police judiciaire, ce lundi.

« Pour mener une réforme, c’est quand même mieux de convaincre ceux qui vont devoir l’appliquer »

« Il infléchit très légèrement les choses sur le calendrier, mais cette affaire est bien mal partie », estime Jérôme Durain, sénateur socialiste, chef de file du groupe sur les sujets de police et de sécurité. « On est dans l’entêtement, alors que c’est une erreur. Il y avait déjà une contestation extérieure très forte, des magistrats notamment, et maintenant c’est une fronde à l’intérieur de la police. C’est assez mystérieux que le ministre en arrive à faire se mobiliser des spécialistes qui sont aussi loin du public. C’est que leur colère est vraiment profonde et que le Gérald Darmanin a généré ses propres difficultés », analyse-t-il.

Police: « Cette réforme de la PJ est une erreur », selon Jérôme Durain

De l’autre côté de l’hémicycle, Philippe Dominati, sénateur LR rapporteur des crédits de la police dans le budget, reste aussi circonspect sur la mise en œuvre de cette réforme de la PJ : « Pour l’instant, le process est plutôt mal parti. C’est un ministère où les réformes sont nécessaires, mais assez rarement menées, mais les points de crispation sont importants. Dans quelque organisation que ce soit, pour mener une réforme, c’est quand même mieux de convaincre ceux qui vont devoir l’appliquer. Et visiblement, ce n’est pas le cas. »

Vers une disparition de la « PJ » sous la « pression du quotidien » ?

Sur le fond, le ministre de l’Intérieur ne change pourtant pas de cap. Pour en finir avec « le fonctionnement en silo » de la police, Gérald Darmanin prévoit de fusionner les effectifs de la sécurité publique, de la police aux frontières, du renseignement et enfin de la police judiciaire sous l’autorité d’un unique « directeur départemental de la police nationale » (DDPN). Placé sous l’autorité du préfet de département, il aura autorité sur l’ensemble de ces services et les personnels de la police judiciaire pourront ainsi « faire bénéficier de leur expertise tous les effectifs de cette nouvelle filière d’investigation. » Dans une tribune publiée dans le JDD samedi dernier, l’ensemble des parlementaires socialistes dénonce une réforme « dangereuse » qui menace le modèle français historique d’une police judiciaire « disposant de temps et de moyens différents pour mener à bien leur mission et s’attaquer efficacement aux très gros délinquants. » Gérald Darmanin a beau marteler « qu’aucun policier de PJ ne fera autre chose que ce qu’il fait aujourd’hui, sur son lieu d’affectation actuel », les sénateurs spécialistes du sujet, de gauche comme de droite, ne sont pas totalement convaincus.

« Ce ne sera pas possible », pour Jérôme Durain : « Le jour où le DDPN se verra intimer l’ordre par Beauvau d’avoir des chiffres supérieurs parce que la petite délinquance est mal gérée, il dira à ses services de laisser tomber les affaires en cours et de se concentrer sur l’urgence. Comment résister à ça ? Frédéric Veaux nous a dit qu’il fallait mettre les compétences de la PJ au service de la petite et moyenne délinquance, c’est assumé dans cette réforme. » Le sénateur socialiste alerte sur « la pression du quotidien » qui pourrait faire dévier la force de travail de ces « spécialistes de tâches complexes et d’investigations qui demandent du temps », vers « la petite et moyenne délinquance. » Philippe Dominati assume « avoir du mal à se faire une opinion bien affirmée », mais reste sceptique sur ce point : « Il y a une vraie peur que la PJ se retrouve à faire du quantitatif. Je visitais un département où il avait 900 dossiers traités par la PJ et 9500 traités par la sécurité publique. Si l’on fusionne tout ça, cela suscite au moins des interrogations sur qui va traiter quoi. D’autant plus que le gouvernement est ambigu là-dessus. Il faudrait des garde-fous, et ceux que propose le gouvernement ne convainquent pas grand monde pour le moment. »

« Une réponse inadaptée à un vrai sujet »

Gérald Darmanin défend, lui, que « la criminalité a bien changé depuis Clemenceau », et la création des fameuses « brigades du Tigre », qui ont inspiré le fonctionnement indépendant de la police judiciaire. Le ministre de l’Intérieur voit dans cette réforme de la « PJ » l’occasion d’intégrer des évolutions de fond des affaires criminelles, comme leur dimension de plus en plus internationale et technologique. « C’est un peu incohérent de départementaliser et de restreindre la PJ à un champ d’intervention départemental », répond Jérôme Durain. « La dernière réforme poussait précisément à élargir le champ d’intervention de la police judiciaire pour répondre à ces défis », rappelle-t-il. « Le risque sur la départementalisation, c’est qu’avec assez peu de personnels, on focalise à terme les moyens de la PJ sur le département phare de la région », ajoute Philippe Dominati.

Enfin, le contrôle de la PJ par le préfet présente un « risque d’intrusion du politique qui n’est pas neutre », pour Jérôme Durain, qui y voit « une réponse inadaptée à un vrai sujet » : « la désaffection des policiers pour la fonction d’investigation et la PJ, qui conduit sans doute à un nombre insuffisant d’officiers de PJ. » Philippe Dominati mise, lui, plutôt sur le décalage du calendrier annoncé par Gérald Darmanin, avec une réforme qui entrerait en vigueur après l’été 2023. « Il faut laisser un peu de temps au ministre et au DGPN pour voir si cette réforme peut être amendée », explique le sénateur LR. Pour le moment, aucune piste sur le fond n’a été évoquée par Beauvau. La réforme de la PJ, n’est pour le moment pas traité en tant que tel par la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur, examinée cet après-midi en séance au Sénat, mais le sujet devrait sans aucun doute s’inviter dans les débats.

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