
COMMENT PERMETTRE A CHAQUE CITOYEN DE S’ENGAGER EN POLITIQUE ?
Armel Le Coz, du collectif Démocratie Ouverte, parle des solutions pour permettre aux simples citoyens de s’engager en politique, ce monde dont ils se sentent exclus, notamment parce qu’ils n’ont pas été initiés. Interview.
Entretien
Apprentissage de la démocratie : « Il faut instaurer un statut et un parcours du citoyen”
Publié le 07/01/2022, L’Independant, Myriam Galy
Les citoyens sont méfiants envers les politiques. Mais ces derniers estiment aussi que les citoyens ne sont pas assez intelligents pour juger de certaines questions. Êtes-vous d’accord ?
Je ne suis évidemment pas d’accord. On est tous intelligents. Mais je confirme que l’on entend encore cela par endroits, de manière cash ou de façon plus déguisée : le peuple n’est pas en capacité de répondre à des questions complexes. Il y a deux sujets. La question des processus : si l’on fait des référendums sur tout, avec le système des Réseaux sociaux, des médias et de leur dysfonctionnement, le débat est en effet de savoir comment l’on construit une vraie réflexion en amont. Le deuxième sujet est la question de la formation du citoyen. Quand on regarde un parcours individuel, à quel moment on est amené à se poser la question de l’intérêt général, à apprendre à débattre, à se forger une opinion, à se confronter à l’avis de l’autre pour arriver à une forme de consensus ? Tous ces éléments existent très peu dans nos formations.
Où l’instruction civique de l’Éducation nationale pèche-t-elle ?
On a un peu d’éducation civique à l’école, où l’on va surtout apprendre le fonctionnement des institutions de manière rébarbative. Tout ce qui forge un citoyen indépendant, autonome, un habitant de la cité au sens où il va prendre des décisions pour l’intérêt général, tout cela est très peu présent dans notre éducation et notre formation. Il y a des gens qui ont, soit culturellement, soit par leur famille, ou leur réseau, accès à cela. D’autres qui , après des accidents de parcours, y arrivent parce qu’ils se tournent vers une forme associative, ou se forment avec l’éducation populaire. Mais une grande partie des jeunes ne passent pas par ces circuits. Là où je rejoindrais certains élus, c’est se dire : aujourd’hui on n’a pas un système qui permette d’avoir des citoyens suffisamment éclairés. Mais la solution n’est évidemment pas de dire : il ne faut pas de démocratie. Elle est de dire: il faut changer ce système de formation des citoyens.
Quelle est votre solution ?
Une des pistes est d’avoir un vrai parcours du citoyen, et un statut du citoyen. Pour l’Occitanie, quand une collectivité veut rétribuer un citoyen participant à une convention du même nom, elle est obligée de bricoler des trucs, contrats de vacation ou autres. Parce que rétribuer un citoyen pour de l’engagement citoyen, ce n’est pas possible légalement. Il faut faire un contrat de travail; c’est la galère. Il faudrait un statut citoyen, avec par exemple un congé pour se présenter à des élections. Cela permettrait aussi à des salariés qui ne peuvent pas prendre le temps, de faire du bénévolat dans une association. Ils pourraient être dégagés sur certains horaires qui leur permettraient de se consacrer à l’intérêt général. Il faut libérer du temps, du financement. De l’énergie.