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QUAND LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL NE RESPECTE PAS L’ÉTAT DE DROIT ( 3/4 )

VOIR LES PARTIES 1 ET 2 :

QUAND LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL NE RESPECTE PAS L’ÉTAT DE DROIT (2/4) https://metahodos.fr/2022/11/15/conseil-constitution/

QUAND LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL NE RESPECTE PAS L’ÉTAT DE DROIT (1/4) https://metahodos.fr/2022/11/14/quand-le-conseil-constitutionnel-ne-respecte-pas-la-constitution-partie-1/

PARTIE 3

V- DE TRÈS SÉRIEUX PROBLÉMES À TOUS LES NIVEAUX

Ils sont au moins de trois ordres:

1.au plan personnel pour chaque membre, comme pour chaque président, puisqu’aucun d’entre eux n’a eu le réflexe de vérifier ou de faire vérifier la régularité de sa propre rémunération ou des avantages qui y étaient attachés. N’oublions pas en effet que le Conseil est majoritairement constitué de juristes avertis (notamment plusieurs chefs de hautes juridictions des ordres tant administratif que judiciaire, plusieurs avocats et universitaires de renom, sans compter les ex-premiers ministres, ex-garde des Sceaux, ex-présidents de la République, ex-présidents de l’Assemblée Nationale et ex-ministres des Finances etc.). Bref, pour la plupart, d’éminents spécialistes rompus à la compréhension des textes pour qui:
– le désintérêt prolongé vis-à-vis du fonctionnement interne de leur propre Conseil, – le détachement absolu par rapport à l’origine, la légalité et la fiscalité de leur propre rémunération, – une vigilance relâchée quant au strict respect de la Constitution au sein même du fonctionnement interne du Conseil, qui en est pourtant le gardien,
ne peuvent évidemment manquer de surprendre les quelque 30 millions de Français, dont beaucoup pointent régulièrement les données et les bases légales de leurs bulletins de paye, pour des montants, il est vrai, généralement infiniment plus modestes.

2.au plan institutionnel, on distinguera ce qui s’attache au contrôle interne de ce qui relève du contrôle externe.

Pour les défaillances liées au contrôle interne, il faut signaler l’implication conjointe des services ci-après:
– le secrétariat général du Conseil, constamment dévolu à un Conseiller d’État, normalement au fait des impératifs constitutionnels qui s’imposent au Conseil; – tout le circuit budgétaire et comptable de la dépense: ordonnancement, contrôle des dépenses engagées et vérification de la régularité du payement, ordonnateurs, contrôleurs et comptables, tous ont oublié… la Constitution! – les services de la législation fiscale qu’auraient dû interroger les initiatives à la fois extra-législatives et extra-constitutionnelles du Gouvernement, à moins que la duplicité de ce dernier ait été telle qu’il ne les ait pas consultés!

Pour les défaillances impliquant différents contrôles externes, on citera entre autres:
– l’Inspection des Finances qu’aucune des différentes alertes publiques n’a réussi à mobiliser; – – le contrôle du Parlement indignement baladé par l’Exécutif dans ses réponses évasives ou ses fins de non-recevoir opposées aux questions des parlementaires; – la Cour des comptes, dont -sans doute pour des tas de raisons, parmi lesquelles les réticences du Conseil – la démarche de certification est passée outre, sans mettre fin énergiquement et d’urgence à un dysfonctionnement pourtant majeur et coûteux du Conseil; – – la HATVP enfin, que l’importance de la rémunération déclarée par Madame Belloubet par rapport à la grille indiciaire de la fonction publique n’a pas incitée à poursuivre plus avant ses vérifications.

Comment désormais améliorer la transparence du Conseil et comment repenser un audit juridique interne – pour l’instant hautement défaillant – que toute institution sérieuse doit s’appliquer spontanément à elle-même dans le cadre ordinaire de son indispensable contrôle interne? Le nombre et la gravité de tant de défaillances croisées pointent un naufrage en ligne de l’ensemble des contrôles d’État, qui fait incroyablement désordre.

3.au plan politique enfin, comment contenir l’effet délétère produit sur l’opinion saturée ces dernières années d’accommodements et de passe-droits en tous genres ? Que dire pour rassurer le contribuable qui se demande combien va lui coûter encore tout ce qui demain va se tramer discrètement en sous-main entre nos « élites » politiques, administratives et juridictionnelles pour faire le moins de vagues possible? Comment restaurer l’image du Conseil qui risque d’être mise à mal par ces révélations – ou plutôt par la confirmation de ces révélations, puisque les premières remontent pratiquement à 30 ans – plus que gênantes ? Les conclusions de l’Observatoire de l’éthique publique sont sans appel: « Il est inconcevable que la rémunération des membres d’une Cour suprême ne soit pas conforme au droit, mais relève d’un bricolage ».

D’un bricolage qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’ancien usage des épices, par lequel un plaideur cherchait à s’attirer la bienveillance du juge, sauf qu’en l’espèce le plaideur d’aujourd’hui, c’est … l’État et les épices … ce sont désormais nos impôts!

VI – DE FÂCHEUX RELENTS

Et les chiffres obtenus, sans doute modestes au regard des grandes gabegies d’État couramment dénoncées par la Cour des comptes, prennent un tout autre relief si on les rapporte à l’étroite cohorte de leurs bénéficiaires, pour lesquels les avantages accordés revêtaient indéniablement une importance individuelle tout à fait significative.

Or cette insistance de l’Exécutif à flatter financièrement son juge pose inévitablement question. Avec la circonstance aggravante qu’un simple coup d’œil à l’article 63 de la Constitution permettait à n’importe quel conseiller en poste, comme à tout collaborateur qualifié du Conseil, de tirer utilement la sonnette d’alarme sur chacune de ces deux anomalies en revendiquant haut et fort l’indépendance du Conseil. Surtout que la connaissance approfondie de la Constitution, qui ne fait au total qu’une vingtaine de pages (version Légifrance) tout en comptant guère plus d’une centaine d’articles, ne semble pas une exigence démesurée vis-à-vis de ceux dont, pendant neuf ans (et plus pour V. Giscard d’Estaing), la vigilance doit sans fléchir passer une bonne part du droit français au crible de ce texte.

Bref, si on se retourne ne serait-ce qu’un instant sur toute l’existence du Conseil constitutionnel, on s’aperçoit que
-du 1er janvier 1960 au 31 décembre 2000 et de la part d’un gouvernement de droite, le Conseil a indûment bénéficié hors loi organique et même hors loi tout court d’une défiscalisation indue du traitement de ses membres au taux exorbitant de 50%;
– du 1er janvier 2001 à ce jour, en contrepartie du renoncement à cet abattement, il a profité et continue à profiter en provenance cette-fois-ci d’un Gouvernement de gauche, mais toujours sans la moindre loi ni ordinaire, ni organique, d’un « complément » majorant indument d’au moins 57% la rémunération antérieure de ses membres et de son président.

Cela fait donc exactement six décennies que- pour des tas de raisons, sans doute toutes meilleures les unes que les autres- les rémunérations effectives des magistrats constitutionnels contournent (cf. l’abattement) ou excédent (cf. l’indemnité) sensiblement les plafonds fixés par la Constitution. Nul doute que le citoyen ordinaire aura beaucoup de mal à admettre que ce qu’on appelle le « Conseil des Sages » ait pu six décennies durant réunir collégialement tant d’éminents spécialistes, en laissant « dériver » si librement et si généreusement les rémunérations de tous ses membres, comme celle de son président, si loin à l’écart des lois, des principes et de la Constitution de la République.

…/…

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