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LA RECHERCHE DE LA MÉTHODE : PRÉSIDENT « MINISTRE DE TOUT » ET « DES BONNES NOUVELLES » MISE À JOUR

NOUVELLE MÉTHODE – EN ATTENDANT UNE GOUVERNANCE ET UNE VISION ? : QUATRE ARTICLES

1. «Stratégie du tourbillon» : pour tourner la page des retraites, Emmanuel Macron choisit l’offensive

2. Réindustrialisation, Ukraine, Elon Musk : pourquoi Macron sature les médias

3. Emmanuel Macron : fini le « Père Fouettard des réformes » et place au « président des bonnes nouvelles »

4. « En devenant ministre de tout, Macron renonce à son magistère » : les limites de l’hyper-présidence

Les ministres s’éclipsent

Les exemples se comptent par dizaine depuis quelques semaines : Pap Ndiaye, à l’éducation nationale, François Braun, à la santé, ou Christophe Béchu, à la transition écologique… Plusieurs membres du gouvernement ont dû récemment s’éclipser devant le chef de l’Etat qui se réserve les annonces dans leurs secteurs, afin de retrouver le soutien d’une partie des Français.

ARTICLE 1 EXTRAIT

«Stratégie du tourbillon» : pour tourner la page des retraites, Emmanuel Macron choisit l’offensive

TITRE LE PARISIEN Marcelo Wesfreid Le 16 mai 2023 QUI POURSUIT :

« Pouvoir d’achat, consommation, investissements, diplomatie… Le chef de l’État s’est démultiplié ces derniers jours pour tenter de démontrer que le pays « avance » et que la réforme tant contestée est actée.

« La stratégie du tourbillon. En quelques jours, Emmanuel Macron aura enchaînédéplacements en région, interview à la pelle (Challenges, « La Voix du Nord », tribune dans le Financial Times, entretien fleuve àL’Opinion), réception de patrons sous les ors de Versailles, dîner surprise à l’Élysée avec «

…/…

ARTICLE 2 EXTRAIT

Réindustrialisation, Ukraine, Elon Musk : pourquoi Macron sature les médias

Par Grégoire Pinson le 15.05.2023 CHALLENGE

Lors de son intervention ce 15 mai, sur TF1, le président de la République a balayé large, des retraites à l’Ukraine, de l’inflation à la réindustrialisation. Depuis quelques jours, le chef de l’Etat multiplie les interventions pour tenter de relancer son quinquennat.

Le chef de l’Etat s’est donné cent jours, lors d’une allocution le 17 avril, pour se remettre en selle. Et ces derniers jours, joignant les paroles à cette promesse, il a décidé de saturer l’espace publique et médiatique, pour sortir de l’ornière de la contestation contre la réforme des retraites.

Dernier exemple en date, ce 15 mai, avec son intervention d’une vingtaine de minutes au journal de 20 heures de TF1. Emmanuel Macron a brassé large: la formation de pilotes de chasse ukrainiens par la France, qui est possible « dès maintenant »; la baisse d’impôts de deux milliards d’euros « dans ce quinquennat, dans cette mandature » qui devra se « concentrer sur les classes moyennes »; l’opposition, en particulier de droite, qui s’est « débinée » lorsqu’il s’est agi de défendre la réforme des retraites ; l’appel aux entreprises à mener un dialogue social sur les rémunérations… Et jusqu’à l’analyse du terme « méprisant » auquel il « récuse » d’être associé.

ARTICLE 3

Emmanuel Macron : fini le « Père Fouettard des réformes » et place au « président des bonnes nouvelles »

Renaud Dély. 16/05/2023 FRANCE INFO

Cette interview d’Emmanuel Macron lundi soir à TF1 s’inscrit dans le cadre d’une vaste contre-offensive médiatique… L’édito politique de Renaud Dély.Article rédigé par 

Parler et bouger. Parler, parler encore, et bouger, partout, tout le temps, c’est ainsi que le chef de l’Etat essaye de reprendre pied et de tourner la page des retraites. Côté médias, depuis trois semaines, il en est à une moyenne de deux interviews par semaine : une interview publiée dans plusieurs journaux régionaux, de longs entretiens dans deux quotidiens nationaux, un autre dans un hebdomadaire, et donc une interview télé lundi 16 juin : l’Elysée ressort la tactique du tapis de bombes médiatique.

Le tout sans compter les micros qui se tendent au fil de ses déplacements à travers le pays : déjà une demi-douzaine malgré les accueils houleux et les casserolades. En fait, pour se sortir de la crise sociale, Emmanuel Macron refait le coup du grand débat post-gilets jaunes, mais sur un autre mode, plus rude et plus solitaire, pour diffuser un message : « J’avance, je gouverne« . Clairement. Il y a un mois, Emmanuel Macron assignait à la Première ministre la charge de bâtir « des majorités élargies », de chercher une « coalition nouvelle« .

Renouer avec un ton plus optimiste 

Bon, c’était mission impossible, il n’y a pas de renfort. Tant pis. Pas question pour Emmanuel Macron de laisser s’installer l’idée d’un quinquennat englué, plombé faute de majorité absolue et condamné à l’immobilisme. D’où l’hommage rendu lundi soir à Élisabeth Borne : son « courage« , sa « détermination » et son gouvernement qui « avance pour permettre au pays d’être indépendant« . Et puis ce cap mis sur la reconquête des classes moyennes à coups d’allègements fiscaux. 

Fini donc le « Père Fouettard de la réforme des retraites » et place au « président des bonnes nouvelles », donc aux baisses d’impôts ou aux investissements étrangers records et créateurs d’emplois.

Depuis 2017, Emmanuel Macron a dû affronter bien des tempêtes : gilets jaunes, Covid, guerre en Ukraine, ou retraites. Il court le risque d’être réduit au statut de président de crises, dénoncé, comme le fait Marine Le Pen, comme étant lui-même porteur de désordre. Il y a donc urgence à conjurer le péril du grand déclassement agité par l’opposition. Avec la reprise du dialogue avec les syndicats invités aujourd’hui à Matignon, on veut croire, du côté de l’Élysée, que ce second quinquennat va enfin commencer. Avec un an de retard.

ARTICLE 4

« En devenant ministre de tout, Macron renonce à son magistère » : les limites de l’hyper-présidence

Solenn de Royer LE MONDE

En multipliant les prises de parole et en accaparant tous les dossiers, le président devient un agent de la politique gouvernementale comme un autre explique, dans sa chronique, Solenn de Royer, journaliste au « Monde ».

« Il court, il court, le furet, il est passé par ici, il repassera par là… » Désireux de faire oublier la séquence des retraites, Emmanuel Macon – qui s’était mis en retrait – est omniprésent (quatre médias en six jours !), sillonnant le pays pour tenter de réparer son lien avec les Français et multipliant les annonces pour montrer que le pays n’est pas bloqué. Ce faisant, le président de la République emporte tout sur son passage.

Déjà transparents, ses ministres se voient dépouillés de leurs dossiers et des communications afférentes : hausse de la rémunération des enseignants, délégation d’actes médicaux, sans compter le plan eau, qu’Elisabeth Borne avait prévu de dévoiler.

« Est-ce du niveau d’un président de la République ? », s’interrogeait-on déjà dans la majorité quand, le 8 décembre 2022, ce dernier annonçait la gratuité des préservatifs pour les 18-25 ans. L’intéressé assume. Dans l’entretien fleuve à L’Opinion mis en ligne dimanche 14 mai, il multiplie l’usage du « je », citant Elisabeth Borne du bout des lèvres. « J’aurais dû me mouiller davantage », avait-il même regretté, le 23 avril.

M. Macron sait qu’il a trouvé, seul, la parade aux « gilets jaunes », avec le grand débat. Il n’a pas oublié non plus la crise sanitaire et ses grands-messes télévisées – regardées par des millions de Français confinés –, à l’issue desquelles ses décisions étaient immédiatement suivies d’effets. Sa parole est performative, semble-t-il penser.

L’équilibre des institutions

A court terme, cette surexposition pourrait payer, infléchissant sa cote de popularité. Mais ce mode de gouvernance, pratiquée en son temps par Nicolas Sarkozy, a un coût qui semble de plus en plus élevé, alors que le pays – soumis à la pression des extrêmes et des radicalités, qui dévorent le débat public – aurait tant besoin d’une autorité de régulation, indispensable à l’équilibre des institutions.

En choisissant la potestas (« pouvoir ») plutôt que l’auctoritas (« autorité ») – selon la distinction établie par le droit romain –, le président devient un agent de la politique gouvernementale comme un autre. Et, en devenant le ministre de tout, il renonce, de facto, à son magistère, son autorité morale. « L’hypertrophie de la fonction présidentielle rabaisse en réalité celle-ci », se désole l’ancien ministre de Jacques Chirac Jean-Jacques Aillagon.Cours en ligne, cours du soir, ateliers : développez vos compétencesDécouvrir

Depuis six ans, ce chiraquien, passé par le MoDem, observe, stupéfait, la pratique solitaire du pouvoir de ce jeune président qu’il a pourtant soutenu avec enthousiasme en 2017. La réforme des retraites, imposée aux syndicats, au Parlement (par le biais du 49.3 notamment) et à l’écrasante majorité des Français, serait, selon lui, emblématique de ce dérèglement des institutions. Les légistes de la monarchie avaient inventé l’adage « ce qui plaît au prince a force de loi »,rappelle-t-il. Un principe aboli avec la Révolution française et l’affirmation de la souveraineté du peuple, venue se substituer à celle du monarque. « Or, on a presque l’impression ici que les préceptes juridiques de l’Ancien Régime sont rétablis », poursuit M. Aillagon, selon qui « on ne peut pas s’arc-bouter indéfiniment contre l’expression de la volonté populaire ».

Une analyse que semblait partager M. Macron avant d’arriver à l’Elysée. Dans un article intitulé « Les labyrinthes du politique », publié par la revue Esprit en 2011, il prenait ses distances avec le « pouvoir charismatique » d’un président « démiurge » et regrettait la « crispation césariste » liée à l’élection présidentielle. Prémonitoire, il mettait en garde contre la tentation de réduire l’action politique au seul programme électoral, qu’on mettrait en œuvre ensuite pendant cinq ans, « l’application stricte des promesses » pouvant conduire « à l’échec ou à des aberrations ».

L’avertissement des Français

« La présidentialisation pousse à ce modus operandi qui n’est plus adapté aux contraintes de l’action publique »,ajoutait-il, appelant à s’adapter à « la réalité », une fois l’élection passée. « Le théâtre de la décision ne peut être l’énoncé d’un programme qui sera ensuite débattu – de manière accessoire et préécrite – pour être appliqué verticalement », poursuivait-il. Avant de préciser – et c’est a posteriori délicieux – que la décision politique ne pouvait « plus avoir un locuteur unique ».

Depuis sa lente traversée solitaire de la cour du Louvre, chacun a compris que M. Macron ferait autrement, loin des diagnostics lucides et empreints de modération qu’il posait avant son élection. L’hypertrophie de la fonction présidentielle, liée au quinquennat et à l’inversion du calendrier – deux révisions constitutionnelles que l’on pourrait amèrement regretter –, ainsi qu’à l’accélération du temps politico-médiatique, n’est certes pas nouvelle. Mais elle s’est vue renforcée à l’aune de la verticalité macronienne, conduisant à une forme d’asphyxie. Il y a un an, les Français avaient pourtant mis en garde M. Macron en refusant de lui donner une majorité à l’Assemblée. Un avertissement qu’il semble avoir oublié, se comportant comme si rien n’avait changé.

Ses soutiens sont nombreux à lui enjoindre de prendre de la hauteur et de redonner de l’autonomie à son gouvernement, meilleur moyen de rétablir sa propre autorité. « Laisse ton premier ministre gouverner, lui a récemment glissé un ami. Si tu ne le fais pas, vous serez tous emportés. »

Même le Financial Times, qui l’avait porté aux nues en 2017, estime que « la France ne peut pas continuer ainsi », appelant à une VIe République « moins autocratique »« Il est temps d’en finir avec la Ve République, avec sa présidence toute-puissante, la plus proche dans le monde développé d’un dictateur élu », écrit le quotidien britannique. Il revient à M. Macron, qui ne pourra pas se représenter en 2027, de « restaurer une pratique plus équilibrée et apaisée des institutions, après les avoir conduites dans l’impasse », insiste M. Aillagon. En d’autres termes, il faudrait que Macron redevienne Macron.

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